Essai - Audi R8 GT RWD : 500 kilomètres à bord de l'ultime R8 (+ images)
L’ultime Audi R8, nommée GT RWD signe la fin d’une ère. Mais impossible de la laisser partir ainsi. Alors, une dernière balade ?
Elle est blanche, elle hurle, elle vibre. Et elle sait que c’est sa dernière danse. L’Audi R8 GT RWD est la version d’adieu d’une icône qui a fait entrer la marque d’Ingolstadt dans le club très fermé des constructeurs de supercars. Pas de turbo, pas d’excuse : juste un V10 atmosphérique à l’ancienne. La puissance sur les seules roues arrière, et une volonté farouche de brûler les derniers litres de sans-plomb avec panache. Alors, que vaut cette dernière R8 thermique sur un parcours de 500 kilomètres mêlant route et circuit ? Spoiler : mes oreilles s’en souviennent encore.
Audi R8 GT : le dernier cri d’un dinosaure
Dans la savane des supercars, la R8 GT RWD fait
figure de T-Rex en smoking. Une gueule identifiable entre
mille, un moteur d’un autre temps et un châssis affûté comme
jamais. À l’heure où les moteurs s’électrifient et les
échappements se taisent, Audi a choisi de nous offrir un dernier
baroud d’honneur. On parle de 620 chevaux à 8.000 tr/min,
uniquement sur les roues arrière.
C’est 50 chevaux de plus que la R8 Performance RWD, une boîte S
tronic raccourcie pour des passages de rapport 30% plus
rapides, un différentiel autobloquant mécanique, et
surtout, une édition limitée à 333 exemplaires dans le monde. En
France, il faudra se contenter de 26 exemplaires. Pas un de
plus.
Cette Audi R8 radicale offre un 0 à 100 km/h en 3,4 secondes, un 0
à 200 en 10,1 secondes et 320 km/h de vitesse de pointe. Des
chiffres digne de ce badge, envoyés sans fioriture ni
hybridation, et qui claquent comme un dernier coup de canon avant
le silence. Soyons honnête : personne n’achètera une R8 GT
pour faire Paris-Biarritz. Pourtant, c’est ce que j’ai presque
fait. Un road-trip de 500 kilomètres
sur route, ponctué par quelques tours de circuit pour libérer la
bête.
On ressent tout ce qu’il se passe
Très vite, une chose saute aux yeux (et aux
lombaires) : c’est raide. Très raide. Les suspensions
fixes, plus fermes encore que celles des versions classiques, ne
laissent rien passer. Les sièges baquets en carbone vous
plaquent comme dans une centrifugeuse, et le moindre raccord de
bitume devient une expérience tactile. Et ce n’est pas vraiment un
reproche. C’est l’ultime Audi R8 après tout.
Elle n’est pas là pour être une GT confortable… Même si
elle s’appelle GT. Mais une fois lancé, tout cela
s’efface. Le V10 atmosphérique sonne comme rien d’autre. Rauque,
métallique, envoûtant. À chaque montée en régime, on frôle
l’hystérie mécanique. Le tout sans artifice sonore, ni
haut-parleurs truqueurs : juste un moteur d’orfèvre,
hurlant jusqu’à 8.700 tr/min comme si c’était la dernière
fois.
Et pour cause, c’est la dernière fois ! Et malgré sa brutalité
apparente, l’Audi R8 GT RWD sait se montrer
docile. La direction est précise, le châssis incroyablement
équilibré, et les aides à la conduite laissent juste ce qu’il faut
de liberté pour jouer sans se faire peur.
© Timothé
Lambert
Très vite, une chose saute aux yeux (et aux lombaires) : c’est raide. Très raide. Les suspensions fixes, plus fermes encore que celles des versions classiques, ne laissent rien passer.
Une Audi R8 oui, une GT oui… mais pas comme les autres
Audi R8 GT comme Grand Tourisme ? Disons plutôt GT
comme Grande Tarée. Car après deux heures au volant, entre
la rigidité du châssis et les décibels du V10 qui s’incrustent dans
votre boîte crânienne, on comprend que cette auto n’a rien de
paisible. Mais ce qui surprend, c’est que sur autoroute, à allure
stabilisée, la bête sait se tenir.
À vitesse réglementaire, sur un long trajet autoroutier, la
consommation moyenne mesurée est restée en dessous de 11,5 l/100
km. Pour une auto de 620 chevaux avec un V10
atmosphérique, c’est presque raisonnable. C’est même étonnamment
sobre pour une mécanique aussi noble et démonstrative. Autant dire
que, malgré son look et son pedigree, l’ultime supercar Audi peut
aussi rouler pépère quand on le lui demande.
Pas longtemps, certes, mais assez pour savourer un peu de confort…
relatif. D’ailleurs, ce n’est pas elle qui s’énerve. C’est vous.
Difficile de se priver de faire chanter le V10. D’autant
que même quand on a l’occasion de l’essayer, on sait que ce n’est
jamais pour longtemps. Et qu’il va falloir rendre cette
Audi R8 à Audi… Triste, surtout lorsque l’on sait qu’Audi n’a pas
prévu de nous rendre la R8.
Sur piste : la vraie révélation
Il a fallu quelques tours de circuit pour vraiment
comprendre ce que cette R8 avait dans le ventre. Libérée de toute
contrainte de circulation, elle révèle un châssis d’une précision
redoutable. La direction communique, la répartition des
masses est parfaite, et le différentiel autobloquant
mécanique permet de doser les dérives avec finesse. Un
vrai scalpel, sans filtre, sans artifice. La boîte raccourcie
permet de mieux exploiter la plage de régime du V10, et les freins
carbone-céramique encaissent sans broncher.
Chaque virage devient une occasion de sourire comme un
idiot dans son casque. Sur circuit, la R8 GT révèle toute
sa noblesse. Et toute sa différence par rapport à une R8 classique. Elle est
évidemment plus pointue, plus extrême… Plus vivante, en somme ? En
fin de roulage, le circuit des Écuyer nous a offert une asphalte
mouillée. Parfait pour un essai bien complet. Mais surtout
pour s’amuser, sans trop de fumée. Là, on se rend compte que c’est
tout de suite plus pointu.
La R8 GT peine à faire passer la puissance au sol, même avec les
aides électroniques. Et pour cause, la rigidité de l’ensemble
n’aide pas lorsque la piste est humide. Mais qu’importe.
Faire hurler le V10 pourrait
suffire. Avouons-le, même si elle ne dépassait pas les 130
km/h, ce bruit démoniaque donne la banane !
© Timothé
Lambert
En fin de roulage, le circuit des Écuyer nous a offert une asphalte mouillée. Parfait pour un essai bien complet. Mais surtout pour s’amuser, sans trop de fumée.
L’Audi R8 GT a-t-elle de vraies concurrentes ?
Dans ce format, il ne reste plus grand monde pour
rivaliser. La Lamborghini Huracán Tecnica, cousine
italienne partageant le même V10, offre un tempérament plus
sauvage et un style plus démonstratif. Plus radicale
encore, la Huracán STO joue dans une autre cour, plus proche du
circuit que de la route. Chez McLaren, la Artura mise sur la
technologie avec son V6 biturbo hybride. Plus légère, plus
moderne… mais sans la même magie mécanique ni la furie sonore.
Quant à la Porsche 911 GT3, elle offre un
autre genre d’extase : moins brutale, plus fine, mais presque aussi
musicale avec son Flat-6 atmosphérique. Reste
que la R8 GT est unique. C’est la seule propulsion dotée
d’un V10 atmosphérique du
marché... Depuis le départ de la Huracan.
La seule supercar allemande sans filtre ni électricité, et la seule
Audi aussi viscérale.
La R8 GT RWD, c’est un peu comme la dernière cigarette d’un
condamné à mort. Intense, nocive, mais inoubliable. Elle
ne cherche pas à vous séduire par des artifices, elle vous balance
son V10 en pleine figure. Un peu comme un doigt d’honneur à l’air
du temps. Et après 500 kilomètres à son bord, on se dit qu’on a
vécu quelque chose. Quelque chose de rare. Quelque chose qui
n’existera plus jamais.
Le jeu en vaut-il la chandelle ?
Pour parler de chose qui fâchent, parlons
prix. 245.000 euros. C’est le tarif demandé pour cette R8 GT
RWD. Une somme particulièrement corsée quand on sait que
la R8 RWD « classique » s’affichait à 160.250 euros. Le
supplément ? Il couvre une présentation plus exclusive, un kit
aérodynamique en carbone, des freins céramique, une barre
antiroulis allégée, des jantes spécifiques et un châssis
affûté.
Mais sur un plan purement rationnel, le V10 de 620 chevaux
revient moins cher sur une R8 Performance quattro,
facturée 226.130 euros. Pire encore pour les comptables : la
Lamborghini Huracán Tecnica,
plus puissante avec ses 640 ch, est moins chère, à 231.640 euros.
Alors pourquoi payer plus ? Parce que cette GT est unique.
Sur les 333 exemplaires produits pour le monde, seulement
26 seront ainsi commercialisés en France. Et dans un monde
où les moteurs atmosphériques disparaissent, l’exclusivité se
monnaie au prix fort. On peut même espérer que cette R8 GT coûte un
jour bien plus cher que son prix actuel… Quant au malus écologique… N’en parlons
pas. Mais il est évidemment… plein pot !



























