Supertest - Audi R8 GT (2024) : un dernier tour de chant au Vigeant !
Pour son dernier tour de chant, l'Audi R8 GT prend la direction du Circuit du Vigeant, sous nos applaudissements !
Pour une fois qu’une Audi a tendance à survirer, on ne va pas
s’en plaindre ! Du TT RS à la S8, de la RS 3 à la RS 6, c’est
souvent la même rengaine : un train avant chargé et un système
Quattro pas franchement rigolo, bref, c’est efficace mais pas
cocasse.
En revanche, avec la R8 GT, les ingénieurs d’Ingolstadt brouillent
les pistes. Non seulement son train avant s’accroche à la corde,
mais l’arrière un poil léger décroche sans trop se faire prier.
Chaud… derrière !
Pour mémoire, la GT est à l’Audi R8 ce que la Tecnica est à
la Huracán de chez Lamborghini (sans les roues arrière
directrices), à savoir un condensé de plaisir : 620 ch tirés du V10
atmosphérique, dont le couple maxi arraché à 6 400 tr/mn est
distribué aux deux seules roues arrière.
Le poids ? Il y a débat. La R8 GT accuse 1 608 kg avec tous ses
pleins sur notre balance de Mortefontaine. Ce n’est pas si léger
pour une propulsion à coque alu. C’est même élevé comparé aux 1 379
kg officiellement revendiqués par la Huracán Tecnica. Mais il
convient de rappeler que Lamborghini parle de poids à sec avec une
propension à noyer le poisson.
C’est ainsi que nous avions vérifié 1 724 kg pour la Huracán Evo
RWD Spyder, tous pleins faits, au lieu des 1 509 kg annoncés, soit
215 kg de différence avec la réalité.
Pour résumer, la R8 GT n’a rien d’ultra-léger
mais reste dans la moyenne, surtout à l’heure où cette dernière ne
cesse de croître. A titre d’info, une BMW M2 dépasse aujourd’hui
les 1 700 kg. Quant à la répartition de la masse entre les trains
roulants de l’Audi, elle est, on s’en serait douté, prépondérante
sur l’arrière (60/40).
Outre l’absence de roues arrière directrices, on note une relative
simplification technologique. Cela se retrouve notamment au niveau
des contrôles électroniques. Ceux de chez Audi sont moins fins que
ceux de chez Lamborghini, où le P-TCS (Performance Traction Control
System) autorise une gestion plus précise du couple sur les roues
arrière et permet d’améliorer l’adhérence en sortie de courbe sur
le mode Corsa ou de favoriser la motricité en conduite quotidienne
sur le mode Normal.
C’est l’un des reproches qu’on peut faire à la R8 : sous la pluie,
même en Pilot Sport 4 S, il vaut mieux réfléchir à deux fois avant
d’appuyer sur l’accélérateur comme un forcené. En clair, et même
pour des bonnes notes aux partiels, ce n’est pas le genre d’auto à
prêter à vos enfants venant d’avoir le permis.
Christophe Tinseau le confirme : « Si l’on déconnecte tout,
elle devient survireuse et difficile à emmener. J’aime bien, mais
c’est compliqué. Pour pouvoir vraiment l’exploiter, il faut garder
un peu d’ESP, de façon à conserver de la stabilité en sortie de
virage. Sinon, c’est fun, mais on a vite fait de partir en toupie,
en tête-à-queue ou dans le mur. Ça survire facilement et ça m’a
gêné dans les courbes rapides. Dans mon souvenir, le train arrière
de l’ancienne R8 à 2 roues motrices était plus fixé au sol, et le
train avant pas autant. Là, ils ont beaucoup amélioré le train
avant, mais l’arrière ne suit pas. Par exemple, quand tu freines,
l’arrière vient, comme s’il y avait trop de roulis à l’avant. Il
faudrait qu’elle plonge un peu moins. Ce serait moins pénalisant
pour freiner tard. Il faut se bagarrer avec la voiture. C’est
dommage, car si elle avait été plus radicale, avec des suspensions
plus dures et un train arrière mieux posé, ça aurait été une super
auto. La base est là ! »
De beaux restes
Bon sang ne saurait mentir, bien qu’il soit amusant de constater
qu’avec la même plateforme et la même base mécanique, Audi et
Lamborghini présentent des autos très différentes au volant. Sur le
plan mécanique, tout d’abord, le V10 est toujours en forme mais
davantage muselé dans l’Audi, moins sonore et moins impétueux que
son homologue italien à l’approche du rupteur.
Cela dit, les accélérations et les relances du 5,2 litres demeurent
tout à fait explosives. Avec 3”5 mesurées de 0 à 100 km/h et à
peine plus de 20” pour passer la première borne kilométrique à 266
km/h chrono, la R8 GT essoufflera plus d’une supersportive.
Et les relances de 100 à 140 km/h sont tout aussi énergiques. Sur
le plan du comportement routier, Audi a beau verrouiller la
suspension, on note que la raideur des ressorts et le tarage des
amortisseurs restent mesurés.
Christophe abonde dans ce sens : « Je n’ai jamais eu ce style
de train arrière sur une Huracán. Là, c’est plus souple. Ça donne
l’impression que les metteurs au point vont réellement chercher le
compromis. La R8 GT est moins extrême que l’Huracán, davantage axée
route, où elle est relativement civilisée, mais sur circuit, ça la
rend un peu molle. En revanche, la boîte est très rapide sur cette
R8, je ne me souvenais pas que c’était aussi véloce sur la
Lamborghini. A la montée des rapports, ça passe vraiment vite.
»
La question des pneumatiques vaut le détour. Tout
d’abord pour indiquer que notre R8 GT d’essai n’était pas équipée
de semi-slicks, comme la plupart de ses camarades aux premiers
rangs de notre classement. Le tour chrono est réalisé en Sport Cup
2 classiques, après des tours de chauffe en Pilot Sport 4 S.
Christophe précise : « En Cup 2 R, on pourrait gagner 1’’5 ou
peut-être 2”. En revanche, je suis surpris de voir le faible écart
entre les 4 S et les Cup 2 sur cette auto (1’44”9 contre 1’45”8,
NDLR). Il n’y a que 9 dixièmes de différence sur un tour, je
m’attendais à plus. Ce qui pénalise, c’est qu’avec les Cup 2, on
retrouve davantage de train avant qu’avec les 4 S, et par
conséquent, l’auto devient encore plus sensible de l’arrière. En
fait, les Cup 2 augmentent l’écart entre l’avant et l’arrière et
amplifient la tendance au survirage. En 4 S, quand on commence à
tourner le volant, ça perd un peu de grip à l’avant et ça fait
moins bouger l’arrière, c’est plus équilibré finalement. C’est pour
ça qu’on n’a pas beaucoup d’écart au chrono entre les deux. En
clair, elle est plus neutre en 4 S et plus pointue à appréhender en
Cup 2. »
Christophe embraie sur la fiabilité que lui inspire la R8 GT. «
Elle tourne comme une horloge. Même après les chronos et tous les
tours de baptême avec les membres du Club Sport Auto, elle ne
montre aucune anomalie, aucun signe de faiblesse. Ça rappelle les
Porsche. Le genre d’auto avec laquelle on peut venir rouler sur
circuit et reprendre la route à la fin de la journée, sans problème
et sans se poser la question. On sent que c’est fiable. Il y a de
la marge, même si l’on roule fort, comme là, où je n’ai pas fait
semblant. Elle est très aboutie, cette voiture ! »
En revanche, le freinage (céramique de série) pourrait être
amélioré selon notre pilote préféré. « Si l’on freine tard,
donc très fort, ça ralentit mais c’est tout. En tapant dans les
freins comme avec une voiture de course, c’est-à-dire vraiment
fort, ça ne s’arrête pas… mais le tour d’après, on freine 10 m plus
tôt en appuyant moins fort sur la pédale et là, ça freine. Donc on
ne peut pas sortir la grosse attaque. Il faut toujours garder de la
marge, sans repousser le freinage au maximum. Pourtant,
potentiellement, les pneus pourraient accepter de plus fortes
décélérations. Peut-être qu’il faudrait changer la qualité des
plaquettes, avec une surface plus agressive. »
Remettons
les choses dans leur contexte : ces bémols émis dans le cadre bien
spécifique de notre Supertest n’enlèvent rien à la
prestation extraordinaire de la R8 GT, qui reste une auto
fantastique. Peut-être pas parfaite, mais très aboutie et surtout
attachante.
L'avis de notre essayeur Laurent Chevalier
A ceux qui reprochent aux Audi d’être trop efficaces ou trop sérieuses, la R8 GT envoie un message clair. Avec un train avant bien posé sur le bitume et un train arrière plus léger, elle réclame un certain doigté. On ne va pas blâmer les ingénieurs d’Ingolstadt de s’être lâchés, surtout pour la fin de carrière d’une auto aussi emblématique. Profitons-en d’ailleurs pour saluer des prestations extraordinaires et encore d’actualité, malgré les quinze ans d’ancienneté de la R8 à moteur V10.
Audi R8 GT : quelles performances sur circuit ?
Audi R8 GT : fiche technique
- Moteur : V10 atmosphérique, 40 S
- Position : AR, longitudinale
- Cylindrée : 5 204 cm3
- Alésage x course : 84,5 x 92,8 mm
- Rapport volumétrique : 12,5
- Régime maxi : 8 800 tr/mn
- Puissance maxi : 620 ch à 8 000 tr/mn
- Puissance au litre : 119 ch/l
- Couple maxi : 57,6 mkg à 6 400 tr/mn
- Couple au litre : 11,1 mkg/l
- Transmission : roues AR, 7 rapports à double embrayage
- Autobloquant : de série
- Antipatinage : de série + correcteur de trajectoire
- Suspension AV/AR : triangles superposés, combinés ressorts/amortisseurs pilotés, barre stabilisatrice
- Direction : crémaillère, assistance électromécanique
- Tours de volant/diamètre de braquage : 2,1 tours/11,2 m
- Freins : disques ventilés percés en carbone-céramique
- Poids annoncé/contrôlé : 1 570/1 608 k
- Répartition AV/AR : 647/961 kg (40/60 %)
- Rapport poids/puissance : 2,6 kg/ch
- L - l - h : 4 496 - 1 964 - 1 237 mm
- Empattement : 2 650 mm
- Voies AV/AR : 1 645/1 599 mm
- Réservoir : 83 l
- Roues AV & AR : 8,5J & 11,5/20
- Pneus AV & AR : 245/30 & 305/30 ZR 20
- Prix de base : 245 000 €
- Options/malus : 10 110/60 000 €
- Prix du modèle essayé : 315 110 € (malus compris)
- Production : limitée à 333 exemplaires (tous vendus)
Retrouvez notre Supertest de l'Audi R8 dans le Sport Auto n°748 du 26/04/2024.



