Essai - Toyota GR Supra A90 Final Edition : attachante... mais perfectible ? (+ images)

Attachante mais perfectible, l’actuelle Supra n’a jamais pleinement réussi à nous séduire. Mais la voilà qui, au crépuscule de sa carrière, se décline dans une série limitée ultra-exclusive, plus puissante et plus affûtée. Toucherait-on enfin au but ? Il aurait hélas fallu un peu plus que cette séance de "speed dating" pour convaincre Sport Auto…
"C'est du 100 % circuit, et le temps qui nous est accordé sera malheureusement assez court." Quand même le représentant de Toyota lance un tel avertissement quelques jours avant l’essai, le journaliste-essayeur fort d’une bonne vingtaine d’années d’expérience en roublardises de la part des constructeurs s’attend à une journée d’essai assez compliquée.
Et autant l’avouer tout de suite, je n’ai pas été déçu du voyage ! Pourtant, cette Supra méritait tellement mieux… D’autant que le coupé Toyota nous a toujours un peu laissés sur notre faim, avec son châssis manquant de mise au point.
Train arrière aux réactions parfois brouillonnes, suspensions mal tenues, freinage à l’endurance restreinte l’ont toujours empêché d’inquiéter les Porsche 718 Cayman ou Alpine A110. Hélas, Toyota n’aura pas beaucoup fait évoluer sa copie, et c’est curieusement à l’approche de la retraite (sa production doit s’arrêter début 2026) que la Supra s’énerve enfin !
Elle se décline en effet dans cette série spéciale Final Edition plus radicale, plus puissante (441 ch) et limitée à 300 exemplaires dans le monde, dont 100 pour l’Europe et… 5 pour la France. Oui, seulement cinq… tous attribués depuis début mai, à la suite d’un tirage au sort parmi les clients prétendants. Et si ces derniers n’étaient qu’une quinzaine, c’est du fait d’un tarif plutôt costaud : 144 000 € (plus 70 000 € de malus) !
C’est peu ou prou le double de la version 3.0 BVA de 340 ch, et cela rapproche dangereusement cette Supra d’un Cayman GT4 RS (162 500 €), tout aussi radical mais offrant les 500 ch d’un fabuleux flat 6 atmosphérique.
C’est également, pour rester chez Porsche, le prix d’une 911 Carrera de base (140 000 €), qui se contente certes de 394 ch mais octroie un blason plus réputé et deux places arrière en dépannage. Aurait-on perdu les pédales chez Gazoo Racing ?
Beaucoup de modifications
Pour justifier ce tarif perché, les ingénieurs maison nous font l’article des modifications apportées à la voiture… et il faut reconnaître qu’il y en a beaucoup ! D’abord, la caisse a été copieusement rigidifiée, avec une nouvelle barre anti-rapprochement à l’avant, un genre de mini-arceau derrière les sièges, ainsi que des renforts sous caisse devant comme derrière.
Ensuite, les suspensions ont été complètement revues, en ‘‘C’ particulier avec l’adoption de combinés filetés réglables KW qui permettent notamment d’ajuster le carrossage, mais aussi de barres antiroulis plus rigides, de nouveaux triangles inférieurs à l’avant ou encore de silent-blocs spécifiques à l’arrière.
Quant aux jantes alliage forgées (19 pouces à l’avant, 20 à l’arrière), elles reçoivent des pneus Michelin Pilot Sport Cup 2 élargis, et abritent des disques avant ventilés et perforés de 395 mm de diamètre pincés par des étriers majorés actionnant des plaquettes plus performantes.
Toyota a même été jusqu’à remplacer les durits de frein en caoutchouc par des éléments renforcés de type aviation. Tout cela est au service d’une mécanique repensée : admission re-dessinée, carter cloisonné, refroidissement musclé, échappement Akrapovic spécifique et calculateur reprogrammé se traduisent par une puissance qui bondit de 101 ch, tandis que le couple grimpe de 51 à 58,2 mkg.
Et pour que le quidam comprenne mieux qu’il ne s’agit pas de n’importe quelle Supra, la Final Edition arbore un accastillage qui ne passe pas inaperçu : peinture noir mat, appendices aérodynamiques en fibres de carbone, prise d’air amovible en carbone sur le capot…
Raviver sa mémoire…
Notre prise en main express se fera sur le circuit Parcmotor Castellolí, non loin de Barcelone, un tracé vallonné, très technique et réputé piégeux qui m’est encore inconnu. Seules trois sessions d’essai de deux ou trois tours figurent au programme… sachant que je ne toucherai la fameuse Final Edition qu’à l’ultime session !
On m’invite d’abord à reprendre une Supra 3.0 BVM normale, histoire de me rafraîchir la mémoire. Je retrouve un habitacle à l’ergonomie typiquement BMW (jusqu’à la course d’embrayage longue), même si l’instrumentation, les sièges ou encore… la fine jante du volant nous rappellent que nous ne sommes pas à bord d’une Béhème.
Le 6 en ligne mélodieux et extrêmement souple réjouit, mais la boîte aux verrouillages agréablement fermes pâtit d’un guidage lent : mieux vaut bien décomposer le mouvement. Sur ce circuit, la Supra affiche une très bonne motricité et un comportement fidèle, mais elle tend aussi à élargir la trajectoire dans les grandes courbes, souffre d’étranges mouvements de lacet à mi-virage et ses freins fatiguent vite. Quant à la direction, elle 73 apparaît précise et assez directe, mais distille peu de sensations.
Après un tour tout aussi bref dans la 3.0 Evo (voir encadré ci-contre), on touche enfin au Graal : la Final Edition ! Spectaculaire à l’extérieur, celle-ci l’est également dans l’habitacle, où trônent en majesté deux sièges baquets à coque en carbone, l’un vêtu de rouge, l’autre de noir.
S’installer à bord ne tient d’ailleurs pas de la sinécure, car les renforts latéraux de l’assise, très saillants, pourraient faire mal à bien des coccyx ! En outre, mieux vaut ne pas avoir le bassin trop large, au risque de peiner à boucler sa ceinture de sécurité. Je sais, c’est moche de vieillir !
Un goût de trop peu
Dès la première accélération en quittant les stands, la centaine de chevaux supplémentaires saute aux yeux, et la (très) longue côte à la sortie du cinquième virage est avalée considérablement plus rapidement.
Mais ce qui frappe surtout, c’est la sensation de conduire une tout autre voiture. Quand la Supra normale apparaît gauche, un peu empruntée, un brin lourdingue et globalement guère précise, la Final Edition donne l’impression d’être taillée d’un seul bloc.
Résultat, ses réactions sont nettement plus vives, avec un train avant plus incisif et un essieu arrière qui n’hésite pas à accompagner la mise en virage. Le freinage renforcé encaisse les décélérations plus brutales sans broncher, et si la direction manque toujours de feeling, elle gagne en précision.
La Toyota joue tout à coup les ballerines, virevoltant d’une courbe à l’autre ! Dans le même temps, elle laisse entrevoir un caractère châssis, une complexité et une richesse de répertoire qui donnent envie d’en savoir plus, comme un oignon que l’on épluche, découvrant chaque fois une nouvelle couche.
Las, la fête est finie, et les commissaires de piste agitent déjà le drapeau à damier. Deux tours, c’est court, beaucoup trop court. La Supra Final Edition méritait bien mieux que ce rendez-vous manqué.
L'avis de Vincent Desmonts
Ces deux petits tours m’ont permis d’entrevoir les formidables capacités de la Final Edition. Plus rapide, plus agile, plus précise, elle semble enfin déverrouiller tout le potentiel de la Supra A90. « Semble », car cette prise en main trop brève reste insuffisante pour explorer véritablement ses qualités… ou relever un éventuel loup. Ce sera donc seulement quatre feux verts pour l’instant… en attendant une deuxième manche en Supertest ?
Toyota GR Supra A90 Final Edition : sa fiche technique
- Moteur : 6 en ligne turbo, injection directe, 24 S
- Cylindrée : 2 998 cm3
- Puissance maxi : 441 ch à 6 000 tr/mn
- Couple maxi : 58,2 mkg à 4 500 tr/mn
- Transmission : roues AR, 8 rapports auto
- Antipatinage/autobloquant : de série déconnectable/de série
- Poids annoncé : 1 795 kg
- Rapport poids/puissance : 4,1 kg/ch
- L - l - h : 4 379 - 1 867 - 1 276 mm
- Empattement : 2 470 mm
- Voies AV/AR : 1 595/1 585 mm
- Pneus AV & AR : 265/35 R 19 & 285/30 R 20
- Réservoir : 52 l
- Prix de base : 144 000 €
- Prix des options/malus : 0/70 000 €
- Prix du modèle essayé : 214 000 € (malus compris)
- Production : 300 exemplaires, dont 5 pour la France
- V. max. : 275 km/h
- 0 à 100 km/h : 4’’3
Retrouvez notre essai de la Toyota GR Supra A90 Final Edition dans le Sport Auto n°764 du 29/08/2025.