Supertest sur circuit - Lamborghini Revuelto : 1000 ch face au chrono !
Quand la Lamborghini Revuelto toque à la salle d’examen du Supertest de Sport Auto, le message est clair : l’italienne est venue en découdre. Mais gare aux excès…
Qu’une sportive aussi flamboyante que la Revuelto traîne désormais un fil
à la patte n’a plus rien d’étonnant aujourd’hui. On ne s’offusque
plus de la présence d’une petite batterie de 3,8 kWh au centre de
l’auto, surtout lorsque cet apport d’énergie n’a clairement aucune
vertu écologique : à peine 8 ou 9 km d’autonomie en réel, et un
grammage de CO2 qui flirte encore avec les 300 g.
En revanche, le boost électrique est sensible. En écrasant la
pédale de droite, le V12 atmosphérique s’envole dans les tours à la
façon d’un moteur de course. Inertie inexistante, régime maximal
perché à 9 500 tr/mn et sonorité terrifiante : l’essentiel est
là.
La poussée est brutale, presque à la manière d’une zéro émission,
bien aidée par le flux permanent des trois moteurs électriques. La
remise des gaz au régime opportun aboutit systématiquement à un
uppercut violent, jouissif. La sonorité, moins stridente
qu’auparavant, n’a rien perdu de son charme.
Que les inquiets se rassurent : Lamborghini a fait en sorte que la
Revuelto soit toujours et justement une Lamborghini, la modernité en
plus. Cette fanfare est désormais orchestrée par une boîte
automatique à double embrayage et 8 rapports qui transfigure
littéralement la supercar de Sant’Agata.
Positionnée dorénavant à l’arrière du V12 6.5 (qui a fait
volte-face pour l’occasion), elle est rapide à la montée comme à la
descente des rapports et impose un tempo d’enfer sans que son
fonctionnement soit altéré par le générateur électrique dont elle
dispose.
Bref, l’antédiluvienne (et parfois violente à l’excès) boîte
robotisée de l’Aventador n’est plus qu’un lointain cauchemar. Sur
les différents modes de conduite, les ingénieurs maison ont dicté
une stratégie étonnante mais qui s’entend. Le mode Sport est plus
permissif que le mode Corsa, situé un cran plus haut.
Sans déconnecter les aides, le premier offre plus d’angle de
dérive, que ce soit à la réaccélération ou en freinage appuyé. Une
philosophie plus fun qui laisse davantage la possibilité de jouer
avec l’équilibre un poil piégeux de la Revuelto. On y
reviendra.
En mode Corsa, l’efficience prime. La transmission se permet
quelques familiarités ponctuées d’à‑coups, histoire de renforcer le
caractère féroce de l’ensemble. Si le comportement est plus lisse,
plus sage qu’une Aventador, le gain en efficacité est
remarquable.
La Revuelto synchronise, avec une certaine simplicité, la
complexité de sa machinerie pour délivrer un niveau de performance
inédit pour la marque.
Catégorie poids lourd
Pour cela, le pilote dispose de deux molettes situées sur le
volant. L’une fait basculer d’un mode de conduite à l’autre (Città,
Sport, Corsa). La seconde laisse le choix entre un mode automatique
du système hybride, une optimisation de la recharge (en quelques
minutes, le tour est joué) ou à l’inverse une exploitation de tout
le jus nécessaire pour les performances.
C’est finalement assez intuitif, malgré les 13 configurations
possibles annoncées par Lamborghini. Reste que cette surenchère se
paie au prix fort. Aussi longue qu’une routière allemande (4,95 m),
large comme un utilitaire (2,03 m hors rétroviseurs) et bardée de
technologie, la Revuelto s’est ainsi laissé aller sur la
balance.
Si la fiche technique évoque 1,7 t à sec – c’est déjà 200 kg de
plus que l’Aventador –, nos mesures sont implacables : 1 961 kg !
Nous avons donc dépassé les 2 t, même avec le plus léger des
pilotes à bord.
Et pourtant, les ingénieurs ont été généreux avec le carbone, que
ce soit pour les entrailles de la bête (jusqu’à la crash box) ou sa
spectaculaire carrosserie. Une telle masse ne disparaît pas
une fois en piste, et malgré un
équilibre relativement favorable (44/56 %) pour une sportive de
cette trempe, le résultat est sans appel : la Revuelto fuse d’un
virage à l’autre mais arrive constamment avec un avant alourdi par
une inertie sensible.
Difficile de garder le point de corde sans significativement
réduire la vitesse de passage. En milieu de virage, on perd de
précieux dixièmes. Ce poids finalement démentiel pour une vraie
sportive se ressent également sur les courbes plus rapides, où
l’italienne a tendance à vous aspirer vers l’extérieur, des quatre
roues, là où bon nombre de sportives surpuissantes passent à
fond.
L’équilibre est donc à manier avec précision et dextérité, d’autant
plus que la remise des gaz n’arrange rien à l’affaire. D’abord, ce
fameux Torque Vectoring orchestré par les deux moteurs avant (un
par roue, octroyant ainsi la « transmission intégrale ») semble
bien faible eu égard à l’énorme machinerie qui actionne le train
arrière.
L’effet autobloquant qui est censé ramener le museau vers la corde
en réaccélérant est peu sensible, au contraire. Aides déconnectées,
la Revuelto est clairement une propulsion. Il en faut peu, et sans
brutalité, pour faire décrocher un arrière volage, qui emporte vite
et loin l’imposant engin.
Assez rare pour être souligné : notre pilote Christophe Tinseau a
préféré effectuer son tour chrono avec les aides électroniques
activées. C’est dire ! Avec 1’41”43 affiché au chronomètre, la
performance aurait de quoi décevoir.
Mais le comportement pointu de la Revuelto y est pour quelque
chose, tout comme la monte pneumatique retenue par Lamborghini pour
cet exercice. Tandis que certains rivaux ont fait le choix des
semi-slicks pour notre grand oral, les ingénieurs maison ont opté
pour des Bridgestone Potenza Sport.
La raison ? « C’est ce qui est proposé aux clients, alors nous
voulons garder une cohérence. » Louable, mais on ne peut
s’empêcher de spéculer sur le gain que des Pirelli PZero Trofeo RS
auraient apporté.
L’efficacité au détriment des sensations
Pour la première fois, la supercar Lamborghini a droit à une
assistance électrique pour sa direction. Avec une calibration très
directe, la Revuelto donne cette première impression de voltiger
selon les injonctions communiquées au volant.
La vectorisation de couple sur le train avant surprend parfois, à
rythme plus doux, mais on finit par s’y faire. En revanche, ce que
l’on gagne en fonctionnalités est fatalement perdu en ressenti. Si
la consistance plutôt légère peut être soumise à appréciation
personnelle, le niveau d’informations transmises, lui, chute.
Comparée à une Aventador, la Revuelto en dit moins et de manière
moins claire. C’est d’autant plus dommage pour cette brûlante
italienne à la truffe un rien mollassonne.
Côté sensations, on peut aussi évoquer la pédale de frein. Comme
sur toutes les hybrides, la gestion entre les différents types de
freinage (récupératif vs mécanique) requiert un dosage savant. Ici,
on gagne en puissance ce que l’on perd en attaque de pédale, plus
franche sur une Aventador, par exemple.
A contrario, on ne peut que saluer le système de freinage CCB
(carbone-céramique) de Lamborghini. Après une journée intense sur
le tracé du Vigeant, aucun signe d’essoufflement n’était à
déclarer, et Christophe a pu s’en donner à cœur joie.
Plus globalement, l’endurance de la Revuelto sur l’exigeant
exercice du Supertest est à encenser. Plus de 1 000 ch et 2 t à
trimballer d’un virage à l’autre ne nous ont pas empêchés de
prendre sereinement la route après plusieurs sessions de
sprint.
Sans le plus petit signe de fatigue, sans tremblement, sans
grincement de frein et sans le moindre bug d’une technologie
pourtant de pointe. La Revuelto dévoile là aussi une sérieuse mise
au point et un niveau de qualité de fabrication remarquable.
L’avis de Walid Bouarab : 4/5
Surpuissante, grisante… Les qualificatifs ne manquent pas pour encenser la synthèse de cette Revuelto, qui a su garder une personnalité chère à la marque. Par ailleurs, sa réputation caractérielle s’est assagie. Elle n’a jamais été aussi efficace, et finalement aussi « facile ». Elle continue cependant de s’adresser à un public averti de son tempérament. On regrette surtout que la surenchère dont elle fait preuve soit la raison même de ses principaux défauts.
Lamborghini Revuelto : quelles performances en piste ?

Lamborghini Revuelto : sa fiche technique
- Moteur : V12 atmosphérique, 48 S
- Position : AR, longitudinal
- Cylindrée : 6 498 cm3
- Alésage x course : 95 x 76,4 mm
- Rapport volumétrique : 12,6
- Régime maxi : 9 500 tr/mn
- Puissance maxi thermique : 825 ch à 9 250 tr/mn
- Puissance au litre thermique : 126 ch/l
- Couple maxi thermique : 73,9 mkg à 6 750 tr/mn
- Couple au litre thermique : 11,4 mkg/l
- Puissance électrique : 220 kW (essieu avant) + 110 kW (transmission)
- Puissance cumulée : 1 015 ch
- Capacité batterie (brute) : 3,8 kWh
- Autonomie électrique : 10 km
- Transmission : 4 roues motrices (uniquement électrique à l’avant), 8 rapports auto à double embrayage avec générateur électrique (110 kW)
- Autobloquant : non
- Antipatinage : de série + Torque Vectoring sur essieu avant
- Suspension : double triangulation, suspension magnétorhéologique
- Direction : crémaillère, assistance électrique
- Diamètre de braquage : non communiqué
- Freins AV/AR : disques ventilés, étriers à 10/4 pistons (410/390 mm)
- Poids constructeur/contrôlé : 1 772/1 961 kg
- Répartition AV/AR : 44/56 %
- Rapport poids/puissance : 1,75 kg/ch
- L - l - h : 4 947 - 2 033 - 1 160 mm
- Empattement : 2 779 mm
- Voies AV/AR : 1 720/1 701 mm
- Réservoir : 85 l
- Jantes AV & AR : 9,5J x 20 & 12J x 21
- Pneus AV & AR : 265/35 ZR 20 & 345/30 ZR 21
- Prix de base : 506 808 €
- Options/malus : 54 434/70 000 €
- Prix du modèle essayé : 631 242 € (malus compris)
Retrouvez notre Supertest de la Lamborghini Revuelto dans le Sport Auto n°761 du 30/05/2025.


