BMW M Hybrid V8 : l'Hypercar du WEC 2025 nous livre ses secrets

Publié le 10 juillet 2025 à 11:00
BMW M Hybrid V8 : l'Hypercar du WEC 2025 nous livre ses secrets

Après une première saison 2024 un peu laborieuse, BMW fait partie des équipes en verve sur la scène du WEC. Dotée d’une identité visuelle très marquée, la M Hybrid V8 nous livre ses secrets.

La politique sportive de BMW n’est pas toujours facile à suivre. La marque bavaroise était par exemple revenue en championnat du monde d’Endurance en 2018-2019 avec la M8 GTE pour quitter la scène après une unique saison ! En matière de cohérence, on a connu plus convaincant…

Cap sur l’Endurance

Quoi qu’il en soit, après s’être retiré de la Formule E, BMW a décidé de mettre le cap sur l’Endurance avec un vrai projet de moyen terme basé sur une double participation : en GT avec la M3, et en Hypercar avec une voiture de type LMDh.
La décision définitive a été prise le 10 juin 2021 et la marque allemande s’est alors tournée vers Dallara (l’un des quatre fabricants homologués) pour la construction du châssis LMDh. Giampaolo Dallara avait déjà eu une occasion de collaborer avec BMW en 1977 lorsqu’il avait été consulté pour la conception de la M1.
La coopération entre les deux entités a été d’autant plus fluide que Maurizio Leschiutta, chef de projet initial de la M Hybrid V8, est italien (il a quitté BMW en novembre 2024 pour devenir responsable compétition de Lamborghini).
D’entrée de jeu, l’équipe chargée de ce projet a eu pour objectif de rendre cette Hypercar très identifiable : « La mission la plus délicate, le défi le plus ardu pour l’équipe de design a été que ce prototype soit nettement reconnaissable comme une voiture de BMW M Motorsport », explique Franciscus van Meel, le président de BMW M Motorsport.
Sur ce point, Michael Scully, le directeur global du design de BMW, et son équipe ont clairement atteint l’objectif. A l’image de la Peugeot 9X8, les gènes de la M Hybrid V8 sont visibles au premier coup d’œil avec sa grosse calandre soulignée par une signature lumineuse faite de LED.

Un moteur à partir d’une base déjà existante

Concernant la motorisation, là encore, les gènes de la marque sont bien présents. Pour des raisons de gain de temps, de coûts et de durabilité, il a été choisi de ne pas concevoir un moteur en partant d’une feuille blanche, mais de développer un groupe propulseur hybride à partir d’une base déjà existante, comme détaille Ulrich Schulz, le chef motoriste de BMW M Motorsport : « Nous avons considéré le 4 cylindres turbo P48 de la M4 de DTM ainsi que le 8 cylindres turbo P48 de la M8 GTE, mais le risque de problèmes liés à l’endurance du premier et au poids du second a joué contre ces options. »
C’est finalement le moteur P66 de la M4 de DTM des saisons 2017 et 2018 qui a été sélectionné. Il s’agit d’un V8 atmo de 4 litres qui utilise des stocks d’acier et d’aluminium constitués à l’époque où BMW était en F1 au début des années 2000.
Il présente, entre autres, l’avantage d’être porteur. « Convertir ce V8 atmo en moteur à double turbo puis le transformer en groupe propulseur hybride a été un processus assez complexe », reconnaît le motoriste allemand.
Comme pour toutes les LMDh, ce moteur a été associé à un système hybride standard composé d’un moteur électrique développé par Bosch et d’une batterie conçue par Williams Advanced Engineering.

Des débuts difficiles

Les premiers essais de la M Hybrid V8 ont lieu le 25 juillet 2022. Afin d’avancer par étapes, BMW a préféré se contenter de n’engager son nouveau fer de lance que sur un unique front dans un premier temps.
C’est donc dans le cadre du championnat américain IMSA que la LMDh a débuté en course à l’occasion des 24 Heures de Daytona 2023. Cette saison initiatique menée au sein de l’équipe américaine Rahal Letterman Lanigan Racing (RLL) a été assez difficile.
Parallèlement, Andreas Roos (un ancien d’Audi Sport qui a pris la succession de Mike Krack à la tête de BMW Motorsport) a choisi de confier le programme mondial – de 2024 – à l’excellente équipe WRT, qui venait d’être lâchée par Audi lorsque la marque aux anneaux a sacrifié son futur retour en Endurance sur l’autel de la F1.
Même si les règlements techniques WEC et IMSA sont similaires, les contextes de course sont assez différents et la manière d’exploiter une auto dans un championnat ou dans l’autre est assez distincte elle aussi.
De ce fait, WRT n’a que partiellement pu s’appuyer sur les acquis de RLL pour élaborer son assaut en WEC en 2024.
Une préparation par ailleurs assez perturbée par la météo, comme le rappelle le pilote Robin Frijns : « Lors de notre programme de test, nous avons souvent été gênés par la pluie. Nous sommes donc arrivés au Qatar, pour notre première course, très bien préparés pour la pluie, sauf que, évidemment, il n’y en a pas eu ! Compte tenu de ces essais pluvieux, nous n’avons pas vraiment pu explorer autant que nous le souhaitions le fonctionnement de la voiture, ce qu’elle nécessite. Donc, tout au long de l’année dernière, nous avons dû apprendre à tâtons lors des week‑ends de course. Une voiture testait un type de réglages et la deuxième en essayait d’autres. L’an passé a clairement été pour nous une période d’apprentissage. Nous continuons d’ailleurs à apprendre. »

Un autre souci récurrent...

Le pilote néerlandais nous dresse le profil de la M Hybrid V8 : « Elle est très bien dans les sections à grande vitesse, mais nous avons un petit déficit de traction dans les secteurs à basse vitesse ou exigeant beaucoup de traction. Mais nous avons progressé sur ce sujet. En fin de saison dernière, à Bahreïn, nous étions plutôt bien sur ce point. »
En 2024, la BMW souffrait aussi d’un autre souci récurrent, comme l’analyse le pilote Dries Vanthoor : « L’an passé, nous avions des problèmes liés aux freins. Ils freinaient bien mais ils influençaient la pression des pneus de manière inconstante : parfois en la faisant monter, parfois en la faisant descendre.
En conséquence, nous ne pouvions jamais être agressifs en matière de pression de pneus, au risque de tomber sous la pression minimale autorisée et de prendre une pénalité. C’est particulièrement gênant dans le contexte du WEC où la préchauffe des pneus est interdite. »
Pour remédier à cette faille, BMW n’a pas hésité à changer de fournisseur (Carbone Industrie a été remplacé par Brembo). « Les ingénieurs ont utilisé un joker pour modifier le système de freinage, poursuit Vanthoor, et cela a beaucoup amélioré la situation. C’est un autre monde par rapport à l’an dernier. »
Robin Frijns confirme : « La saison précédente, nous étions vraiment en souffrance en pneus froids, au début des relais, et nous avons fait un énorme bond en avant cette année. Globalement, j’ai le sentiment que nous sommes parmi les bons s’agissant de dégradation de pneus. »

Viser le podium avec une voiture améliorée

Les 6 Heures de Spa, disputées en mai, ont apporté une illustration intéressante de ces nouvelles aptitudes de la M Hybrid V8. La n°15 est quasi la seule Hypercar à être partie en pneus tendres et à avoir pu les maintenir en bon état pour en tirer profit.
Ainsi chaussé, Kevin Magnussen a réalisé un spectaculaire festival en début de course, notamment lorsqu’il a effectué un dépassement en roulant dans l’herbe en pleine ligne droite de Kemmel !
Transfuge direct de la Formule 1, le Danois est encore en phase de découverte : « C’est une voiture qui n’est pas si facile que ça à conduire. Par rapport à ce que j’ai l’habitude de piloter, elle est un peu plus lourde, a un peu moins d’aéro… Je dirais que c’est une auto qui se situe entre une GT et une LMP1.
La manière de la mener est assez spécifique, en fait. Le fait de ne pas pouvoir préchauffer les pneus est nouveau pour moi, par exemple. Il y a beaucoup de choses à apprendre par cœur, des procédures à retenir et les effets qu’elles ont sur l’équilibre de la voiture. C’est une auto très en avance dans le domaine électronique."
Les ingénieurs allemands ne chôment pas dans ce domaine. « Je crois que c’est le point sur lequel nous avons le plus progressé depuis le début du programme, confie Dries Vanthoor. La gestion de l’antipatinage et des différentiels est bien meilleure qu’auparavant. A chaque course, nous nous améliorons sur ce point. Au début, je pense que cela nous est arrivé de nous faire piéger. »
Tout ce travail mis bout à bout a permis d’effectuer des avancées tout à fait palpables depuis l’an passé. En 2024 déjà, BMW s’était offert son premier podium de WEC à Fuji, lors de l’avant-dernière manche.
Depuis le début de la saison 2025, les M Hybrid V8 sont toujours bien placées, que ce soit sur la grille de départ (première ligne au Qatar) ou course. Tant au Qatar qu’à Imola, la BMW était la première voiture à terminer derrière les Ferrari, ce qui s’est traduit en Italie par une très jolie deuxième place.

BMW M Hybrid V8 : fiche technique

  • Moteur : V8 à 90°, hybride, biturbo (BMW P66/3)
  • Cylindrée : 3 999 cm3
  • Position : centrale arrière, dans l’axe longitudinal ; moteur porteur
  • Alésage x course : 93 x 73,6 mm
  • Alimentation : injection directe haute pression (350 bar)
  • Distribution : double arbre à cames, 4 soupapes par cylindre
  • Couple : 66 mkg
  • Lubrification : par carter sec
  • Système hybride : ERS Bosch standard 170 kW (231 ch)
  • Gestion électronique : Magneti Marelli
  • Puissance maxi cumulée : 640 ch à 8 200 tr/mn
  • Transmission : propulsion
  • Boîte de vitesses : Xtrac longitudinale à 7 rapports semi-automatiques (+ marche arrière) avec commande pneumatique par palettes au volant
  • Châssis : monocoque en fibre de carbone
  • Suspensions : triangles superposés et poussoirs avec amortisseurs réglables, barres de torsion à l’avant et ressort hélicoïdal à l’arrière ; troisième élément à l’avant et à l’arrière pour contrôler la hauteur de caisse
  • Freins AV & AR : disques en carbone ventilés et étriers en alliage léger
  • Roues AV/AR : en aluminium forgé (18 x 12,5/18 x 14)
  • Pneus AV & AR : Michelin (29/71-18 & 34/71-18)
  • L - l - h : 4 991 - 1 994 - 1 200 mm
  • Empattement : 3 150 mm
  • Poids minimum : 1 030 kg

Retrouvez notre article à la loupe de la BMW M Hybrid V8 dans le Sport Auto n°761 du 30/05/2025.

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