F1 - Comment la Formule 1 filme un Grand Prix

Filmer un Grand Prix pour la télévision est un véritable défi. La Formule 1 a une équipe composée de plusieurs réalisateurs et d'experts pour faire ses choix.
Les 21 Grands Prix du calendrier sont tous réalisés par le
championnat, à l'exception de Monaco. La F1 fournit ensuite les
images à chaque diffuseur, comme Canal + en France. L'arrivée de
Liberty Media, qui a pris en charge l'aspect commercial de la F1
début 2017, a mené à des changements dans la façon dont les
informations sont présentées, et des données sont régulièrement ajoutées, notamment autour des
stratégies.
La réalisation est en grande partie faite sur place même si une
équipe au Royaume-Uni participe également à la production. La
diffusion est très technique et à Hockenheim, un incendie dans un camion a failli perturber le week-end.
Autour des tracés, le dispositif est lourd : à Singapour, la F1
aura 23 caméras autour de la piste, auxquelles il faut ajouter les
images des caméras embarquées. Peu de compétitions sont aussi
difficiles à filmer qu'une course automobile puisque les cadreurs
et l'équipe de réalisation doivent suivre ce qui se passe à chaque
échelon de la course et sur chaque portion du circuit.
« Dans un Grand Prix, 20 histoires différentes ont lieu en
même temps, et il faut raconter ces histoires en étant les plus
complets possibles, » souligne Dean Locke, le responsable de
la diffusion des courses au sein de la F1. « A titre de
comparaison, si besoin, on peut couvrir un match de football avec
une seule caméra, on a un seul ballon et un petit terrain. Nous
avons 20 ballons et un très grand terrain ! Dix équipes sont sur ce
terrain et elles jouent un jeu différent entre elles. Pour
équilibrer toutes ces strates, il faut jongler d'une manière
complexe. »
Comment la F1 fait ses choix
Des essais jusqu'à la course, l'équipe de réalisation de la F1
cherche à trouver un équilibre entre les images du direct, les
replays ou les caméras embarquées. De nombreuses personnes sont
impliquées. « Nous avons des couches (de réalisation), »
précise Dean Locke. « Les replays sont effectués par un
réalisateur de replays, ce qui se passe en piste par un réaliste de
piste et nous avons un réalisateur qui se consacre aux images des
caméras embarquées. Ensuite, il y a le réalisateur principal qui
assemble et équilibre ces éléments, avec les arrêts aux stands et
les caméras de l'allée des stands. »
« Nous avons aussi un groupe qui regarde les choses dans leur
ensemble. Avons-nous assez-vu les leaders, faut-il se concentrer
sur des bagarres en particulier, faut-il analyser les décisions
stratégiques pour mieux expliquer les choses ? Nous avons
également un réalisateur éditorial qui travaille de près avec un
producteur exécutif. Ils se concentrent surtout sur les
classements. Nous avons aussi quelqu'un qui suit la position des
voitures sur le GPS. Il y a également un producteur graphique (...)
qui se concentre plus sur la stratégie et un producteur commercial
qui garantit que nos partenaires commerciaux sont vus. »
« Il nous arrive d'échanger avec les commentateurs, parce que
l'expertise des diffuseurs est souvent utile, et nous incorporons
(ces idées) dans les prises de décisions, quand nous le jugeons
nécessaire. Nous suivons aussi les réseaux sociaux, pour voir ce
dont tout le monde parle et un sujet évoqué peut être intégré dans
notre traitement d'un aspect de la course. »
« Enfin, nous avons nos propres experts qui sont assez bons.
Ross Brawn (le responsable de la compétition de la F1) participe un
peu, comme Roberto Dalla, notre responsable des médias et de la
technologie. Rob Smedley (consultant technique de la F1) est
toujours en communication aussi, donc nous pouvons parler de
possibles stratégies avec lui. »
Des choix difficiles
Les choix sont parfois difficiles à faire, comme au départ du
Grand Prix d'Italie. La réalisation a préféré montrer d'abord la
lutte pour les premières places, avant de diffuser des replays des
incidents du premier virage, impliquant notamment Max Verstappen,
parti en fond de grille.
« Monza est difficile à cause de la première chicane, »
explique Locke. « Dans le premier tour, les pilotes arrivent
très vite dans cette chicane. Cette année, nous avons eu une très
bonne bagarre à l'avant, entre trois ou quatre voitures. En même
temps, à l'arrière, il y avait aussi un pilote très rapide, Max
Verstappen, et il fallait faire un choix. Nous savions que des
choses se passaient à l'avant et nous savions que des pilotes
coupaient la chicane. Mais si vous avez deux voitures côte à côte à
l'avant, il faut rester sur ça. »
La F1 privilégie les duels pour les places qui rapportent le plus
de points : « Nous cherchons des bagarres et plus elles sont
pour les premières places, mieux c'est. Si cette bagarre est à
l'avant, il faut rester sur ça. Nous n'avons pas peur de descendre
à la 13ème, 14ème ou 15ème place s'il se passe moins de choses à
l'avant et qu'il y a une belle bagarre. »
Le réalisateur doit parfois attendre plusieurs tours avant de
diffuser les images du départ sous plusieurs angles
: « Pour les replays, ce qui est difficile en Formule 1,
c'est que nous n'avons pas de pause naturelle, » indique
Locke. « Nous ne sommes pas comme le tennis ou le cricket.
Nous devons diffuser les replays pendant qu'il se passe des choses,
sauf si nous avons une voiture de sécurité. Si vous demandez à un
réalisateur de sport la chose la plus difficile (...) dans le
direct, ils citera les replays. Et c'est difficile quand il n'y a
pas de pause naturelle. Nous cherchons une accalmie et à Monza,
c'était très difficile avec tout ce qu'il se passait à l'avant dans
les premiers tours. »
La F1 pourrait pallier à ce problème en laissant l'image du direct
dans une vignette mais elle juge ce système peu efficace
: « Nous avons le mécanisme pour le faire mais nous avons
tendance à l'éviter parce que nous avons déjà beaucoup
d'informations à l'image et beaucoup d'éléments graphiques, c'est
très compliqué d'en ajouter, » explique Locke. « C'est
également difficile pour les commentateurs. »
Singapour sera un défi unique
Ce week-end, le Grand Prix de Singapour sera un défi particulier
pour l'équipe de réalisation de la F1. Marina Bay est l'un
rendez-vous les plus difficiles de l'année pour les pilotes et les
équipes, en raison du décalage dans le programme et de la chaleur.
Les conditions, la longueur du tracé et les spécificités d'un
circuit urbain posent également de nombreux défis pour la
réalisation.
« C'est l'un des circuits les plus longs du calendrier et il fait
chaud, donc c'est physique pour le personnel sur la piste, »
explique Dean Locke. « Sur le plan logistique, c'est la
longueur de la piste (qui est difficile). Il y a 23 virages sur le
circuit de Marina Bay et il faut les couvrir avec 26 caméras sur la
piste. Il n'y a pas de dégagement, sauf dans les virages 1 et 2,
donc les caméras sont au dessus des voitures, et elles suivent à
travers de petites ouvertures. Le nombre d'angles est limité et si
elles sont dirigées dans le mauvais sens, elles manquent quelque
chose. »
« En plus, nous devons vraiment mettre en avant la ville, ces
gratte-ciels incroyables et ces immeubles fantastiques. Toutes les
pistes et toutes les courses sont uniques. Nous devons montrer
cette spécificité aux supporters, les tifosi à Monza, les feux
d'artifice à Singapour, le Foro Sol à Mexico, etc. Nous devons
transmettre cela autant que possible. C'est difficile à Singapour,
mais sincèrement, la diffusion d'une course est un gros défi quel
que soit le circuit. Filmer un Grand Prix est très différent des
autres catégories. »
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