Supertest Mercedes-AMG GT R (2017) : drogue dure !
VIDEO. La Mercedes-AMG GT R est carrément addictive. Sport Auto l'a passée sur le gril du Supertest : Le Mans, Ceram... Récit.
Ça se ressent au premier coup de volant. La Mercedes-AMG GT R
fait partie de ces rares autos qui donnent l'impression de lire
dans les pensées de ses concepteurs. Pas le genre à se focaliser
sur la conduite autonome et à passer leur temps à fignoler des
Powerpoint. Cette auto a été imaginée, construite et mise au point
avec les tripes d'une bande de doux dingues, surdoués et
authentiquement passionnés. Ça fait toute la différence.
Surtout quand je repense à la SLR (2003), ce missile sans tête
chercheuse guidé par la seule quête de l'ultra-exclusivité et dont
le comportement brouillon générait plus de déceptions que
d'émotions. La GT R corrige le tir : pile dans le mille ! Foncez
sans plus attendre voir le tour chrono de cette GT R 2017.
Action
Le ciel s'assombrit, mais il y a encore une chance de passer entre
les gouttes à Mortefontaine. Mauvaise pioche, la pluie s'abat sur
le circuit au moment où le museau de la GT R franchit la barrière
automatique. Ça partait d'une bonne intention, qui consiste à
mesurer les accélérations et les freinages avant de limer les Sport
Cup 2 sur les vibreurs du Bugatti. La bonne nouvelle, c'est que les
prévisions sont au beau fixe pour le lendemain au Mans, avec un
possible affolement du chrono. Tout n'est pas perdu pour
aujourd'hui, puisqu'il reste le passage sur la balance pour
vérifier le poids revendiqué par le constructeur, et un détour par
le routier gras mouillé avec 70 mkg sous le pied. Notre modèle
d'essai dépasse la valeur annoncée par Stuttgart d'une vingtaine de
kilos, soit 1 649 kg mesurés tous pleins faits.Cette auto a été
imaginée et mise au point avec les tripes d'une bande
d'authentiques passionnés. Ça se sent et ça fait toute la
différence ! Rappelons qu'il est équipé des freins en acier de
série, traditionnellement plus lourds que la céramique.
Ceux qui voient le verre à moitié vide rappelleront qu'une Porsche 911 GT3 revendique 1 430 kg seulement.
Ceux qui le voient à moitié plein noteront la répartition
majoritaire sur l'essieu arrière à 52 %, grâce à l'implantation
moteur reculée et à la boîte transaxle. Question équilibre, donc,
ça se présente plutôt bien. D'autant que les roues arrière
directrices donnent un coup de pouce pour faire pivoter l'auto. On
y reviendra. Pour le moment, la GT R prend un bain de foule entre «
J'adore ce vert ! » et « Elle a vraiment de la g... ! » avant de
prendre un bain tout court, sur la piste. Malgré l'adhérence
précaire, le train arrière reste derrière et l'auto file plutôt
droit. Pas question d'écraser l'accélérateur sans retenue, mais
l'électronique veille au grain sans couper la chique au V8 à tout
bout de champ. Même avec les accélérations latérales limitées par
l'humidité, le train avant laisse entrevoir une rapidité et une
précision surnaturelles. Vivement demain ! En attendant, on file
chez DM Performance pour mouliner sur le banc de puissance. Ce qui
revient, depuis Mortefontaine, à traverser le grand Paris du
nord-est au sud-ouest. Pas loin de 100 km d'agglomération avec un
monstre de 585 chevaux, au volant duquel ne pas allumer un seul
radar revient à traverser une chambre d'enfant, pieds nus, de nuit,
sans marcher sur un Lego.
Statistiquement, c'est risqué. Pas loupé, deux pour le prix de deux
: 77 km/h au lieu de 70 et 108 km/h au lieu de 90. Bien fait pour
moi, j'aurais pas dû passer la troisième. La GT R se défoule sur le
banc de puissance. Verdict : 584,1 chevaux à 6 250 tr/mn et 72,8
mkg à 2 750 tr/mn.
Allez, un dodo en essayant de ne pas se relever la nuit pour
démarrer le V8 et direction Le Mans pour le grand oral. Voir le
tour chrono de la Mercedes-AMG GT R 2017 au Mans.
Formalité
Les 200 km qui séparent Paris du Mans ne sont qu'une simple
formalité, à condition de ronger son frein et de contenir l'envie
de souder l'accélérateur au plancher sur cette autoroute déserte.
Une bonne rasade de sans-plomb 98 et la GT R monte sur le ring.
Christophe enfile son casque, saute dans le baquet et le V8 remonte
consciencieusement la ligne des stands, au pas. Plein gaz après le
feu vert et la Mercedes plonge dans la courbe du Dunlop. La boîte à
double embrayage rétrograde de deux rapports au freinage avant la
chicane, en faisant imploser les silencieux. Franchement, ces pots
qui ratatouillent au lever de pied, c'est du Mozart. Gauche/droite
avant de piquer une tête sous la passerelle, le temps de se rendre
compte du bon maintien latéral des baquets, puis Christophe se
remet progressivement en ligne et shoote dans l'accélérateur pour
filer vers la Chapelle. Calée sur sa trajectoire en un coup de
cuillère à pot, la GT R offre un grip latéral et une stabilité
extraordinaires. Quant à la remise de gaz pour attaquer le Musée,
elle est copieuse. Les Sport Cup 2 sautent à la corde en crissant
de bonheur. Tiens, quelqu'un a dû raccourcir le bout droit jusqu'au
Garage Vert. Christophe relance la mitraillette des silencieux en
sautant sur les freins, avant de s'extirper du droite serré, avec
un regard amusé : « Ça va ? » Disons que ça pourrait difficilement
aller mieux. D'autant que le V8 repart de plus belle vers les
virages du Chemin-aux-Bœufs, qui arrivent comme des balles dans le
pare-brise. Re-gros freinage et re-remise de gaz jusqu'à plus soif.
Encore ! La GT R reste droite comme un i, sans concéder de
mouvement de caisse, mais en vous balançant de gauche à droite,
dans le baquet, comme un hochet. Un coup de vibreur à gauche, un
coup de vibreur à droite, puis la boule de flipper est catapultée
dans les S Bleus, avant d'atterrir dans le raccordement en deux
temps trois mouvements.
Vient le plat de résistance : l'AMG égraine ses rapports sur la
longue ligne avant de se jeter dans la courbe du Dunlop à 246 km/h
chrono. Le dessert, c'est Christophe qui va le faire, seul à bord,
pour ôter la masse de ma carcasse et recouvrer un rapport
poids/puissance décent. Résultat : 1'47''24 ! A titre de
comparaison, l'AMG GT S avait signé 1'51''29 sur le même parcours
en 2015 et la McLaren 570S, également sur l'ancien enrobé,
n'est qu'à 9 dixièmes devant. Pour l'anecdote, la Lamborghini Aventador est à 6 centièmes
derrière, avec 1'47''30. Christophe, lui-même, est bluffé : « Ils
ne se sont pas loupés, et je trouve l'auto étonnante sur le
ressenti. Je ne me souviens pas avoir eu autant de train avant sur
l'AMG GT S. Les roues arrière directrices, fatalement, ça aide. »
Reste à valider les félicitations du jury par un détour à
Mortefontaine, sans la pluie, cette fois. Le 0 à 100 km/h est avalé
en 3''5 et le 400 mètres D.A. est expédié en 11''2, avant de
clôturer le 1 000 mètres D.A. en 20''1 à 268 km/h chrono. Autant
dire, une balle ! Quant aux freinages, c'est correct, avec 147
mètres de 200 km/h à 0, mais la troisième prise de mesure s'allonge
avec l'échauffement. Suffisamment pour donner l'envie de recourir à
la céramique optionnelle, en essayant d'avaler la pilule du coût en
cas de remplacement. Ce bémol est loin de ternir l'éclat de ce
diamant brut. Pour avoir la chance de côtoyer le gratin des
supersportives, la GT R est l'une de mes plus grandes surprises au
cours de ces dernières années. Son train avant précis, son train
arrière qui enroule, son moteur plein comme un œuf et ses pots qui
explosent de bonheur me donnent littéralement la chair de poule. A
tel point que la GT R est à ranger au pinacle des ultra-sportives à
moteur avant, aux côtés de la Ferrari F12 tdf, par exemple. Celles qui se
comptent sur les doigts de la main et dont le comportement est
tellement réussi qu'elles parviennent à quasiment donner
l'impression d'un équilibre de moteur central arrière.
Revoyez la vidéo du tour chrono de la GT R 2017 par ici.
Quelques chiffres
Voici quelques caractéristiques sur la plus efficace des
Mercedes-AMG de route produite à ce jour. Sport Auto été bluffé par
la GT R lors d'un premier galop d'essai et le Supertest ne fait que confirmer son sentiment :
c'est une auto absolument extraordinaire. Ce n'est pas qu'une
question de puissance, mais de charisme. En efficacité, en
performances et en plaisir, cette Mercedes est à classer parmi les
coups de cœur de ces dernières années.
> V8 biturbo, 585 ch à 6 250 tr/mn, 71,4 mkg à 1 900
tr/mn
> Transmission : roues AR, 7 rapports robotisés
> Poids constructeur/contrôlé : 1 630/1 648 kg
> Accélérations mesurées : 0 à 100 km/h en 3"5, 1 000 m D.A. en
20"1
> Vitesse maxi annoncée : 318 km/h
> Chrono au Bugatti : 1'47''27
> Prix de base/modèle essayé : 174 800 €/202 020 €
Photo : Greg/EMAS


