Essai - Maserati GranCabrio Trofeo (2024) : justifie-t-elle son statut de GT ?
Elle succède à l’une des divas les plus talentueuses de l’histoire. Mais elle ronronne plus qu’elle ne chante. Dommage, parce qu’une fois le toit ouvert, la nouvelle Maserati GranCabrio justifie pleinement son statut de GT.
On se retourne toujours sur sa ligne somptueuse, elle qui n’a
pourtant pas révolutionné ses traits. Elle reste imposante, très
longue (encore plus même, en frôlant les 5 m), large, et semble
poser pour les projecteurs sous tous les angles. Un charisme
indéniable qui conserve un traditionalisme bienvenu.
Elle préserve ses proportions, avec l’immensité de son capot, son
arrière ramassé, et l’attribution d’une capote ne rompt pas
l’élégance de l’ensemble. Elle n’en fait pas trop, mais aimante
l’attention des passants, même sur ses terres natales, près du lac
Majeur. La GranCabrio demeure une diva comme on les aime.
Et le couvre-chef planqué dans la malle ajoute une touche
d’exclusivité propre à toutes les découvrables. Elle opère la
transformation en 14 secondes, et sait le faire en roulant jusqu’à
50 km/h. De quoi profiter des éléments au grand air, et s’en mettre
plein les oreilles. Du moins, c’est ce que nous espérions.
En sourdine
On le sait, et la GranTurismo avant elle avait déjà planté un
couteau dans notre petit cœur nostalgique : le volubile V8 n’est
plus et ne trouve pas ici une descendance à la hauteur de son
lyrisme. On ne refera pas douze fois l’histoire, mais l’identité
sonore des anciennes Maserati était intimement liée à la
magnificence de cet orgue mécanique.
Il faudra désormais se contenter d’un V6 3.0 biturbo, le fameux
Nettuno, avec ses chambres de précombustion, issu de la MC20 et ici
dégonflé à 550 ch pour la version Trofeo. De la belle
artillerie certes, mais sans les démarrages signalés par un
miaulement langoureux, ni les notes haut perchées.
Sa sonorité rauque au quotidien est chaude mais sans saveur, et sa
désactivation de cylindres le fait tourner sur trois pattes avec la
bande‑son qui va avec. Tout s’explique ? Nous sommes probablement
mesquins, mais l’idée même d’une GT est de transformer le moindre
trajet en moment d’exception, musique à l’appui. Dommage, car tout
le reste y est.
La ligne renferme un habitacle dignement habillé pour une maison
italienne. Les cuirs sentent bon et les assemblages sont précis. Il
conviendra d’opter pour des harmonies claires afin de mieux
apprécier la multitude de détails, mais le travail est honorable.
Les concepteurs ont en revanche étiolé le classicisme de bon ton,
qui côtoie désormais les dalles numériques plus ou moins pratiques
à manipuler. Même la mythique horloge centrale s’est mue en un
vulgaire afficheur numérique.
Toujours est‑il que l’accueil se fait avec les égards, y compris au
second rang. Il ne faudra pas empiler deux grands adultes, mais les
places arrière n’ont rien d’une punition. La balade peut être
longue, et le confort de la partie.
C’est le cas de manière générale, cette GranCabrio offre un niveau
de filtration en adéquation avec son positionnement, et
l’insonorisation sur autoroute, capote fermée, est remarquable. Une
compagne de voyage idéale, pour peu que l’on voyage léger. Car le
coffre est coffre ridiculement petit : les grandes valises
resteront à la remise.
Une rigueur nouvelle
Splendide et accueillante, la nouvelle GranCabrio fait en
revanche table rase du passé côté technique. Il faut dire que la
précédente génération a connu une carrière à rallonge et n’a pas
forcément brillé par la rigueur de sa mise au point.
Avec sa nouvelle plateforme (capable d’accueillir la version 100
% électrique Folgore) et sa motorisation de pointe, l’italienne
change de registre. Sans se départir d’un niveau de confort plus
que louable, la GranCabrio sait presser le pas, et avec une belle
adresse.
En basculant sur le mode de conduite Sport, les amortisseurs se
raidissent sans excès, contrairement à la direction qui gagnerait à
perdre davantage en assistance. Mais peu importe. Le niveau de
performances pointe encore l’excellente santé du V6 maison, avec
des mises en vitesse remarquables.
Sa disponibilité et son allonge renforcent la sensation
d’efficacité, bien aidée par une transmission facile à mettre au
bon tempo. Surtout, celle qu’on laissait flâner en bord de rive
s’est transformée en une redoutable avaleuse de virages. Il faudra
faire abstraction des roues arrière directrices (qui seraient plus
utiles sur les manœuvres en ville que pour virevolter en virage de
toute façon) pour apprécier la bonne volonté du train avant et
l’équilibre bien senti de l’ensemble.
La stabilité profite de l’empattement XXL et de la rigueur de
l’amortissement. Le différentiel à l’arrière se montre plus coquin
en mode Corsa (aides déconnectées), et le renvoi de couple en
extérieur change sensiblement la donne à la réaccélération, sans
aller jouer avec les limites de ce grand paquebot.
Bref, un certain savoir-faire et une réelle maturité. Point
essentiel, l’abandon du toit en dur n’entame que très peu la
rigidité de l’ensemble. Sur les routes montagneuses et mal revêtues
du Nord de l’Italie, les vibrations sont quasi inexistantes, la
baie de pare-brise demeure stoïque et le rétroviseur central
grésille à peine.
Preuve d’une base technique solide et bien née, sur laquelle cet
imposant cabriolet repose. Reste tout de même le regret d’une
bande-son si ce n’est plus présente, du moins chantant plus juste.
Certes, en cravachant le Nettuno, les décibels grimpent. Mais même
dans ces hautes sphères, il souffle et crache davantage qu’il ne
rugit. Dommage.
Mais est-il encore nécessaire et pertinent de chatouiller les
tympans des passants à chaque démarrage ? Par les temps qui
courent, probablement pas. Et nous ne doutons absolument pas de la
faculté des maestros maison pour nous mettre au point un organe
plus volubile. Un choix assumé donc, qui participe
vraisemblablement à la sagesse de cette nouvelle génération.
La cohérence de la proposition est à saluer. Sculpturale,
accueillante, confortable et terriblement rapide, la GranCabrio ne
galvaude pas une appellation qui mériterait d’être contrôlée. Une
véritable GT, dont les aptitudes ne doivent pas se réduire aux
vocalises limitées de son V6, aussi performant soit-il.
Quant à ceux pour qui le ronron du moteur, c’est trop has been, la
GranCabrio se décline également en version 100 % électrique
Folgore. Une rapide prise en main nous a permis de découvrir les
performances décoiffantes de cette version de 762 ch, fatalement
plus lourde, mais non moins capable de virevolter sur les routes
secondaires. Si vous nous demandiez notre avis, la Trofeo, plus
organique et communicative, garderait encore notre préférence. Même
avec un chat dans la gorge.
L'avis de notre essayeur Walid Bouarab : 4/5
Avec une motorisation plus démonstrative et un intérieur moins recouvert d’écrans, cette Maserati GranCabrio Trofeo serait proche du sans‑faute. Ce que son tarif laisse supposer. Cela reste une superbe GT, réellement capable sur la route tout en étant confortable. Mais les temps évoluent, et l’arrivée de la toute première Maserati 100 % électrique presse le pas vers une transition que l’on voit dangereusement approcher. Profitons encore de ce qui subsiste de plus fameux dans la catégorie, et cette italienne en fait définitivement partie.
Maserati GranCabrio Trofeo : fiche technique
- Moteur : V6 biturbo, 24 S
- Cylindrée : 2 992 cm3
- Puissance maxi : 550 ch à 6 500 tr/mn
- Couple maxi : 66,2 mkg à 5 500 tr/mn
- Transmission : intégrale, 8 rapports auto
- Antipatinage/autobloquant : de série/non
- Poids : 1 895 kg
- Rapport poids/puissance : 3,5 kg/ch
- L - l - h : 4 966 - 1 957 - 1 365 mm
- Empattement : 2 929 mm
- Voies AV/AR : 1 646/1 660 mm
- Réservoir : 70 l
- Prix de base : 234 550 €
- Prix des options/malus : 48 343/60 000 €
- Prix du modèle essayé : 342 893 € (malus compris)
- V. max. : 316 km/h
- 0 à 100 km/h : 3’’6
- 0 à 200 km/h : 12’’2
Retrouvez notre essai avec la nouvelle Maserati GranCabrio Trofeo dans le Sport Auto n°752 du 30/08/2024.


