Porsche visée par un procès à 300 millions de dollars à Miami !
En Floride, le concessionnaire The Collection attaque Porsche et lui réclame 300 millions de dollars, l’accusant de représailles après son refus d’ouvrir un showroom dédié à la marque.
Dans un marché du luxe automobile déjà sous
tension, une plainte déposée en Floride menace de
mettre à nu les fragilités du modèle
Porsche. À Miami, le constructeur
allemand se prépare à affronter un procès
de 300 millions de dollars, soit environ 280
millions d'euros, intenté par The Collection, l'un des
plus grands distributeurs de voitures haut de
gamme des États Unis, qui l'accuse d'avoir
restreint l'accès aux modèles les plus
demandés.
L'affaire ne porte pas seulement sur des voitures
livrées ou non, mais sur la manière dont une marque
sportive veut désormais se comporter comme une
maison de très grand luxe. Au coeur du
dossier se trouve la façon dont
Porsche gère ses prix, la rareté
de ses véhicules et la docilité attendue de son
réseau de concessionnaires.
Porsche : une stratégie de rareté contestée par les concessionnaires
Depuis la pandémie Covid 19, Porsche a choisi
d'augmenter fortement ses tarifs et de jouer
davantage sur la rareté, une stratégie que
certains acheteurs ont surnommée la
"ferrarisation" de Porsche.
Après une pénurie de puces qui a permis de vendre
de nombreuses voitures avant même leur arrivée en
showroom, la marque a continué à pousser ses
prix, portée par une demande
soutenue pour des unités devenues rares.
Cette montée en gamme assumée séduit une partie de
la clientèle mais crispe des distributeurs
puissants, dont The Collection à Miami qui
revendique un rôle historique dans les ventes de
Porsche aux États Unis. Un équilibre que la
justice américaine va maintenant disséquer.
La comparaison avec Ferrari ne
doit rien au hasard. Le constructeur italien
limite volontairement sa production à environ 14 000
voitures par an, ce qui entretient une
rareté réelle et des listes d'attente très
longues.
Porsche écoule, lui, plus de 310 000 véhicules par
an, un volume qui l'expose à un arbitrage
plus délicat, notamment quand les prix décollent :
"Après la crise du Covid, Porsche a appliqué une politique
tarifaire extrêmement agressive, augmentant sans cesse les prix de
tous ses modèles", explique Scott Sherwood,
analyste indépendant spécialisé dans les marques
de voitures de luxe, dans des propos rapportés par
le Financial Times. "Ce n'est pas la bonne
méthode pour fidéliser sa clientèle."
La flambée des prix n'est pas seulement venue du
constructeur. Les distributeurs américains de
Porsche disposaient d'une grande
latitude pour facturer certains
modèles bien au delà du prix de
vente conseillé, ce qui a créé de fortes
disparités d'une concession à l'autre.
À partir de 2022, la marque a cherché à
reprendre la main en étendant son influence sur le
réseau américain, en incitant ses
partenaires à bâtir des showrooms
entièrement dédiés à Porsche.
The Collection, qui vend aussi
Ferrari, McLaren et Aston
Martin, dit avoir été prié d'investir des dizaines de
millions de dollars dans une nouvelle
installation exclusive dans la région de
Miami, à Kendall ou Cutler Bay.
Le concessionnaire a refusé, qualifiant ces sites
de "lieux éloignés, suburbains" avec "relativement
zéro marché pour les Porsches.", selon sa plainte
déposée en Floride.
Porsche : showrooms exclusifs et "spirale infernale"
Dans sa plainte déposée en 2022, The
Collection affirme que Porsche en Amérique du
Nord a utilisé des tactiques de "coercition" en liant
l'attribution de voitures au projet de nouvelle
salle d'exposition.
Après le refus du concessionnaire de construire un
site exclusif, le constructeur aurait commencé à
retenir une partie des pool cars, ces véhicules
distribués à la discrétion de Porsche et qui
peuvent représenter jusqu'à 20% de
l'approvisionnement total d'une concession.
Le groupe allemand Porsche AG a tenté à plusieurs
reprises de se retirer de la procédure en tant
qu'entité étrangère, mais un juge de Miami a
rejeté cette demande, ouvrant la voie à un procès
prévu en mars prochain : "Ce litige porte sur les
relations entre les concessionnaires, leurs distributeurs et les
fabricants, certainement dans tout l'État de Floride, mais comme
une grande partie de l'Amérique a des réglementations similaires en
jeu, le litige concerne l'industrie dans tout le pays", a
déclaré Sean Burstyn, fondateur du cabinet Burstyn
Law à Miami, qui représente The
Collection.
Le constructeur allemand et ses deux
filiales ont nié toute violation de la loi
floridienne sur les franchises de
concessionnaires et rejettent l'idée que leurs
décisions d'allocation aient précipité les ventes
du distributeur dans une "spirale infernale", expression
employée par The Collection dans sa requête.
Dans ses conclusions en défense, Porsche souligne
que les ventes de véhicules de la marque au sein
de cette concession déclinent depuis près de dix
ans et rappelle que "The Collection a délibérément choisi de ne
pas investir dans une nouvelle concession Porsche exclusive, malgré
la baisse des ventes de véhicules neufs de la marque Porsche depuis
près de dix ans".
En parallèle, Porsche Cars North America a refusé
de commenter le procès en cours, tout en mettant
en avant le fait que ses 204 concessionnaires
franchisés américains restent
indépendants et que la marque est
arrivée en tête des enquêtes 2025 de JD Power sur
la satisfaction en vente et la fidélité de la
clientèle.
Ce bras de fer intervient alors que les
livraisons reculent de 6% en
Amérique du Nord sur les neuf premiers mois de
l'année, de 25% en Chine et de 16% en
Allemagne, dans un contexte de lourds investissements dans
l'électrique et de revirement coûteux sur la
stratégie autour des Macan et
Cayman.
La hausse des droits de douane décidée par
Donald Trump sur les voitures
importées pousse aussi Porsche à
relever encore ses prix, ce qui tend un peu plus
les relations avec le réseau
américain dont la marque a pourtant plus que
jamais besoin.


