Vergne ou Ocon pour Renault ?

Même si le retour de Renault est tout sauf acté, la question du pilote français se pose déjà. Car Grosjean file chez Haas. Alors, Vergne ou Ocon ? On en débat.
Pendant près de 10 ans, lors de son premier retour en tant qu'écurie complète en 2002, Renault nous a sorti la même soupe. "Nous sommes une société internationale et nous ne cherchons pas un pilote français, mais un pilote rapide." Sans la moindre once de chauvinisme, on veut bien reconnaître qu'il est stupide de prendre un pilote français moyen à la place d'un pilote étranger très bon. Personne, d'ailleurs, n'a jamais demandé de choisir un Français à la place de Fernando Alonso, par exemple. En revanche, il doit bien y avoir une petite place pour un Français, quand il est bon, dans le second baquet. Or pendant cette période, Renault a bâché les espoirs des Bourdais, Montagny, et n'a jamais ne serait-ce que tenter d'évaluer des pilotes qui cartonnent ailleurs maintenant (Duval, Pagenaud...). Or il est fort à parier qu'ils n'auraient pas fait plus mal que les Fisichella, Kovalainen, Piquet Jr ou Petrov. Passons, ceci est de l'histoire ancienne.
Les temps ont changé chez Renault
Maintenant que Renault envisage de revenir, et même si c'est
encore loin d'être fait, la question se repose. Heureusement, à des
gens plus ouverts sur la question que les dirigeants de Renault à
l'époque qui ne faisaient alors que lire ce que Briatore leur
dictait. Quelqu'un comme Cyril Abiteboul a très bien compris qu'une
touche française est importante. Et comme elle ne peut avoir lieu
ni dans la situation géographique de l'écurie, ni avec les
ingénieurs, alors, le pilote reste le symbole le plus puissant.
D'autant plus que sur le marché il n'y a aucune star disponible et
que le deuxième pilote, Pastor Maldonado, est imposé par la
situation contractuelle et le rush financier.
Ne pas prendre un Français en 2016 serait une erreur. Surtout qu'il
y a de quoi faire. Deux noms sortent du lot et paraissent les seuls
en lice : Jean-Eric Vergne et Esteban Ocon. Voici les chances et
faiblesses de chacun.
Jean-Eric Vergne, 25 ans, 58 GP :
Même si Toro Rosso l'a fait passer pour un vieux en le remplaçant
par un pilote de 17 ans (Verstappen), Jean-Eric Vergne reste jeune
! A 25 ans, il est encore en progression. Champion de France de
Formule Campus, Champion de F3 Anglaise, vice-champion de Renault
3.5, le Parisien (natif de Pontoise) a disputé 58 GP chez Toro
Rosso de 2011 à 2014. Pendant trois ans, il a été successivement
déclaré perdant par Red Bull contre Daniel Ricciardo, promu en
2014, puis Daniil Kvyat. Alors que sur deux années sur trois, c'est
lui qui a inscrit le plus de points chez Toro Rosso, et au total,
il avait contribué à hauteur de 51 points aux 89 inscrits par Toro
Rosso.
Mais JEV a payé, chaque année, sa relative baisse de forme au
moment où la pression était maximale. En avance sur Ricciardo
jusqu'au Canada en 2013, il a ensuite un peu plongé mentalement.
Ricciardo, plus décontracté, l'a mieux vécu et a convaincu Red Bull
qu'il serait le meilleur choix pour aller affronter Vettel. L'an
passé aussi, le Français avait mieux démarré que Kvyat avant de
perdre son duel en qualif par la suite : 12 à 7. En course en
revanche, il reprit le dessus pour marquer 14 points de plus. Pas
assez, selon Red Bull, face à un rookie.
Red Bull a eu des raisons de toujours préférer soit Ricciardo soit
Kvyat à Vergne. La preuve, on ne peut pas dire qu'ils se soient
trompés, Ricciardo ayant battu Vettel et Kvyat faisant jeu égal
avec Ricciardo cette saison. Sans doute les deux hommes étaient
plus forts dans leur tête. Mais la force de la filière Red Bull est
justement d'avoir produit plusieurs excellents pilotes. Et JEV en
est un. L'épreuve d'être évincé de Toro Rosso lui a servi et il est
désormais un homme plus costaud.
51 des 89 points de Toro Rosso en trois ans
Les critiques souvent adressées à Vergne lui reprochent de ne
pas avoir assez réalisé d'exploits en F1. C'est oublié un peu vite
ses deux 6e places de Monaco 2013 et Singapour 2014. Surtout celle
de Monaco. Ou ses qualifications en 6e et 7e position en Australie
2014 et Canada 2013. Vergne a plusieurs fois très bien performé
dans une Toro Rosso moins réussie que celle de 2015. Il lui a
manqué, c'est vrai, de la constance et de la chance. Il a connu 5
abandons lors des 8 premières courses de 2014.
La rapidité n'est pas un problème pour lui. Il l'a prouvé en
Formule Electrique en débarquant à Punta Del Este et en signant la
pole d'entrée, sans jamais avoir essayé la voiture. Il a signé deux
autres pole positions ensuite.
Vergne a pour le moment un contrat avec Virgin-DS pour la saison
2015/2016 de Fe mais il donne la priorité à la F1. Il espérait
revenir chez Haas, mais sa meilleur chance est maintenant de
devenir pilote officiel Renault... Pas mal !
Esteban Ocon, 19 ans :
Champion de F3 FIA l'an passé, Ocon a été l'un des stars de la
saison 2014. Il a ainsi battu Max Verstappen, aujourd'hui un pilote
très en vue dans les grands prix. Le Hollandais avait remporté plus
de courses (10 à 9) mais Ocon avait signé plus de pole position (15
à 7). Max n'a pas toujours été servi par son moteur Volkswagen,
face au Mercedes du Français.
Esteban, donc, a du talent. Enormément de talent. La barrière de
l'âge a également explosé, Verstappen ayant débutant à 17 ans. A 19
ans, Ocon peut légitiment espérer. Surtout qu'il a déjà conduit 4
fois une F1, dont une fois en essais libres à Abu Dhabi l'an passé.
Il avait d'ailleurs été excellent.
Adaptation rapide chez Lotus
Cette saison, Ocon souffre plus que prévu en GP3. On l'imaginait
déjà facile champion de la discipline mais il se casse les dents
sur un italien, Luca Ghiotto. Ghiotto mène 3 victoires à 1, et
surtout 5 pole positions à 0. Le Normand est encore dans la course
au titre mais il a moins marqué la GP3, tout étant très bon, que la
F3. La saison de son rival Ghiotto est assez étonnante. L'italien
avait débarqué à Spa l'an passé en signant la pole position puis
avait rétrogradé en fond de grille. En 2015, il semble intouchable,
dans une écurie Trident abonnée aux bonnets d'âne depuis 2011.
Ocon a rejoint depuis quelques mois la Filière Mercedes, qui en
fera peut-être un futur titulaire de DTM à défaut de F1, Pascal
Werhlein ayant la priorité, voire un candidat au titre en GP2 chez
ART. Mercedes ne serait sans doute pas contre de prêter Ocon à
Renault, voire de le céder. Car l'ancien champion de F3 a
énormément de potentiel, et surtout ses essais chez Lotus ont
montré qu'il pourrait vite s'adapter. La France peut miser de gros
espoirs sur lui.
Conclusion :
La France a la chance d'avoir deux bons pilotes disponibles.
Renault doit en profiter. Ils sont jeunes, ont un palmarès et sont
populaires auprès des amoureux de sport auto. Le plus logique
serait de faire appel aujourd'hui à Vergne. Il a l'expérience de
trois saisons de GP, d'une année de simulateur chez Ferrari et n'a
été absent des circuits que depuis 1 an. Une année de plus et tout
retour deviendrait trop compliqué pour lui.
Alors que Renault se voit imposer Maldonado pour des raisons
financières, il ne faut pas se louper sur le leader de l'écurie. Il
faut marquer des points, ce que Vergne a fait chez Toro Rosso. En
plus, JEV a travaillé avec les ingénieurs moteur de Renault en
2014. Et contrairement à certains, il ne les a jamais critiqué
outre mesure. Enfin, Jean-Eric est passé par les formules de
promotion du constructeur français : 2.0 et 3.5. Son arrivée dans
l'équipe d'usine Renault ferait sens. Et piquer Vergne à DS et
Carlos Tavarès (ex-Renault parti chez PSA) ne serait pas pour
déplaire à Carlos Ghosn !
Utiliser Ocon tout de suite est également possible. Et alléchant.
On a hâte de voir s'il peut nous faire une Verstappen bis. A côté
d'un Maldonado erratique, ce serait un choix un peu plus risqué.
Quoique. Une année en GP2 serait une bonne idée mais Renault
pourrait déjà le nommer troisième pilote et lui faire faire
plusieurs vendredi de grand prix. Et qui sait, en 2017, vrai année
1 du retour de Renault (2016 étant une année de transition) un duo
français capable de lutter avec les meilleurs. Aucune raison que
ceux-ci ne puissent pas un jour gagner un grand prix, voire
plus.
Un mot pour finir sur un autre Français, Pierre Gasly. Actuellement
en GP2, le pilote de la filière Red Bull souffre plus que prévu,
notamment face à son équipier Alex Lynn, mais a du potentiel.
Surtout qu'il n'a que 19 ans comme Ocon. Il a signé sa première
pole position à Monza. Il est monté à 3 reprises sur le podium sans
encore l'avoir emporté. A surveiller si la filière Red Bull
s'effondrait en cas de départ de la F1. Renault a sans doute un
oeil sur Gasly.
Et vous qu'en pensez-vous ?


