Renault Mégane R.S. EDC 2018: secouez-là ! [ESSAI]

Sur le marché des sportives compactes, la frenchy pétille et revient sur le devant de la scène, en misant sur la polyvalence et des roues arrière directrices.
En deux générations, Renault Sport est parvenu à élever la
Mégane au rang d'icône des bombinettes. Faites un saut sur les
trackdays français et européens, dont la Nordschleife, et vous prendrez conscience de sa
notoriété. La troisième génération débarque dans 50 pays, dont le
Japon et l'Australie, et sur un marché européen en pleine forme,
qui représente 106.500 compactes hautes performances à l'année.
Le cru 2018 s'oriente vers la polyvalence, quitte à froisser les
puristes : niveau de confort, praticité avec une carrosserie 5
portes imposée - pour minimiser les coûts puisqu'il n'existe plus
de Mégane 3 portes -, boîte à double embrayage EDC... De quoi ravir
les citadins ou les familles, mais le tarif s'envole à près de 40
000 € (hors options et malus). Foncez voir la vidéo de l'essai de
la Renault Mégane RS EDC 2018.
Détendue
Il est certain que la R.S. se rapproche visuellement des petites
sœurs, même si elle fait des efforts : ailes élargies (6 cm à
l'avant et 4,5 cm à l'arrière), assiette rabaissée, appendices aéro
dont l'énorme diffuseur abritant un échappement central à la -
fausse -canule caricaturale. Mieux vaut opter pour une couleur flashy exclusive R.S. (jaune historique
ou nouvel orange), histoire d'être sûr de se démarquer. L'autre
point évoqué concerne le confort. Il est vrai que cette Mégane
atténue le bruit ambiant en mode Comfort en jouant sur
l'électronique (malgré les rapports courts), propose des baquets
moelleux ou une suspension douce. Renault Sport reste fidèle aux
amortisseurs passifs, en invoquant le feeling. Mais il a travaillé
avec Kayaba pour améliorer le filtrage, en ajoutant des butées
hydrauliques de compression (et non rigides). Ces petits pistons
placés en bout d'amortisseur ont déjà été utilisés pour la Clio
R.S., seulement à l'avant.
Le résultat est convaincant et la compacte survole les pires
difficultés avec brio, en conservant du débattement, de la
progressivité et sans verrouiller les mouvements de caisse. Cette
dernière est toutefois bien tenue et le compromis s'avère idéal
pour un usage quotidien. Quant à la boîte EDC (Efficient Dual
Clutch), elle séduit par sa rapidité d'exécution et les explosions
aux passages de rapports... Dans la même veine qu'une DSG made in
Volkswagen. Sauf que le pilotage est moins bien ficelé : lenteur
dans les manœuvres, constance en mode Drive Sport, levier non
commandable en manuel. « Il a fallu choisir entre les palettes et
le levier, car cette boîte n'accepte qu'un seul type de commande »,
précise Philippe Varet, ingénieur en chef. Pour l'anecdote, le
choix de cette boîte Getrag à 6 rapports a été dicté par le couple
élevé et elle équipe déjà la Mégane GT diesel ou des utilitaires.
Instinctivement, on opte et on joue avec les grandes palettes
solidaires de la colonne. L'EDC se montre alors obéissante. Mais
rien ne vaut le maniement du bon vieux levier ! Oui, il existe
encore et nous l'avons testé sur piste (cliquez ici pour l'essai de la Cup, en boîte manuelle).
D'après les prévisions de ventes, il devrait devenir minoritaire,
tant en Europe que dans le monde. Nous venons de le voir, les
acheteurs vont désormais se faciliter le quotidien grâce à une plus
grande polyvalence. Mais quid du plaisir ?
Downsizing
Le sourire a tendance à se figer. Rien de grave, mais la R.S. de
base n'est pas aussi pétillante que son aînée. Ce sentiment naît
d'une part de la mécanique, plus lisse et moins prenante
qu'auparavant.
Adieu le 2 litres turbo. Place au 1,8 litre turbo à injection
directe et distribution variable. Ce bloc connaît ses heures de
gloire dans le dos des passagers d'une Alpine A110, en configuration 250 ch.
Mais il a été inauguré par un « utilitaire » : l'Espace (225 ch).
Il possède ici une culasse spécifique, développée en collaboration
avec Viry-Châtillon, dans le but de la renforcer et de porter la
puissance à 280 ch : structure, refroidissement, traitement de
surface des poussoirs de soupapes et des chemises de cylindres,
admission et turbo à gros débit dont la pression culmine à 1,75
bar... Pourtant, le coup de pied au derrière caractéristique n'est
pas violent à 2 250 tr/mn. Le 4 cylindres masse vigoureusement à
bas régimes et grimpe dans les tours de manière linéaire, avant de
relâcher la pression au-delà de 6 000 tr/mn. Bref, il accomplit son
devoir, mais ne prend pas aux tripes.
D'autant que la sonorité manque de naturel. Rien à voir toutefois
avec la bande-son risible d'une 308 GTi. Les occupants n'ont plus droit au souffle
torride émanant de l'échappement (audible de l'extérieur), mais à
une amplification des grognements de l'admission via les
haut-parleurs. « Nous avons voulu supprimer ce souffle
d'échappement à bord et renforcer les harmoniques à l'admission »,
justifie Philippe Varet. Dommage, on a hâte de profiter d'un bon
Akrapovic à clapet actif ! Dans le domaine des sensations
mécaniques, le puissant 2,3 litres Ford Performance écrase le
segment : tempérament de feu, voix bien travaillée. Face à une
telle fougue et à une intégrale, la Mégane R.S. devrait être
larguée en accélérations. Ce serait omettre la différence de poids
(169 kg) et la rapidité de la boîte robotisée. Soulignons que la
française forcit de 20 kg, voire 43 kg avec l'EDC par rapport à la
précédente génération et que les Leon/308 pèsent un quintal de
moins ! La Focus partirait plus fort, puis la Mégane serait à
l'aspiration à la borne kilométrique. Pour une surprise. Cela dit,
les temps annoncés par Renault Sport paraissent optimistes, eu
égard à la poussée et au launch control, guère percutant à 3 000
tr/mn. Cette procédure et la célérité du double embrayage
permettent toutefois à la version EDC alourdie de revendiquer les
mêmes accélérations qu'avec le levier : 5''8 et 25''0. Soit un net
progrès par rapport à l'aînée. La vitesse maxi, elle, stagne autour
de 250 km/h. Une question de bride ? Non, les rapports sont courts
et cette vitesse est obtenue à fond de 6e . En raison de moindres
frottements, la R.S. à boîte manuelle et démultiplication quasi
identique terminerait sa course 5 km/h plus haut. En théorie, les
Civic Type R et Focus RS occupent les avant-postes sur cet exercice
mais au Ceram, elles n'ont pas atteint 260 km/h. Malgré une
puissance inférieure, la Mégane reste donc dans le coup, avant même
d'attaquer le premier virage.Vous n'avez toujours pas vu la vidéo
de l'essai de la Mégane RS 2018 EDC ? C'est par ici que ça se passe...
Derrière magique
Renault l'utilise depuis dix ans et le propose même sur l'actuelle
Mégane GT. Des actuateurs pilotés font contre-braquer les roues
arrière au maximum de 2,7° jusqu'à 60 km/h, améliorant ainsi la
vivacité, le braquage... Et le survirage de cette traction !
Au-delà, ils les font pivoter dans le même sens qu'à l'avant de
maxi 1°, afin de favoriser la stabilité. Le plus drôle ? Le point
d'inversion passe de 60 à 100 km/h en Race, histoire de se faire
plaisir sur circuit (voir
vidéo par ici). Le constructeur installe pour la
première fois ce dispositif sur une R.S., compensant ainsi les
réglages softs de train avant par un arrière qui pivote pour
faciliter le placement. Bien vu, d'autant qu'il se distingue ainsi
de la concurrence : technologie, déhanché. Le mode Neutral castre
cet entrain. Mais dès le Sport, le popotin se meut et il recouvre
sa liberté en Race, qui écarte les aides. Ces modes s'ajustent
depuis le bouton RS Drive ou l'écran tactile. Ils incluent aussi le
Comfort et le Perso, qui présente l'avantage de dissocier les aides
des autres paramètres. Sur routes ouvertes, on peut ainsi opter
pour des réglages sportifs, en conservant le correcteur de
trajectoire... Au cas où le revêtement soit trop glissant, comme
ici en Andalousie. Ces conditions n'arrangent pas le train
avant, dépourvu d'autobloquant (en option), qui se cherche et
réclame du dosage. Entre les réglages de suspension conciliants et
l'absence de blocage, il manque de mordant.
Dans la catégorie, la Leon et la 308 croquent davantage les cordes. En plus, le
débordement se ressent tardivement. La direction électrique épargne
les remontées de couple intempestives, au prix d'un feeling plutôt
dense et gommé. La précédente génération clarifiait davantage la
situation. Le bilan s'avère donc mitigé de la part d'une ex-reine
de la piste. Elle continue d'y briller par la constance de son
freinage, mais réclame d'écraser la pédale. Pas de quoi
décontenancer les amateurs de trackdays. En revanche, les nouveaux
clients attirés par la polyvalence risquent d'être décontenancé.
Ils seront peut-être moins regardants sur la note, par rapport aux
fans qui ont déboursé environ 30 000 € en 2009. Le joker de cette
génération se nomme 4Control. Bien vu, Renault Sport se distingue
ainsi de la concurrence par la technologie et le placement...
Survireur ! Cette fois, elle avoisine les 40 000 € et devient
sacrément pénalisée par le malus 2018 (+ 3 113 €). Avec les
options, elle s'envole ici à 50 000 €. On parle toujours d'une
compacte Renault ? La Trophy, programmée en fin d'année et portée à
300 ch, devrait retrouver la philosophie de l'aînée, en se
radicalisant et en incluant le pack Cup, les roues de 19 pouces ou
les freins allégés... Voire des pneus semi-slicks.
Mais à quel prix ?
Quelques données techniques
Voici quelques infos techniques sur la nouvelle Mégane RS EDC 2018, lancée le mois dernier.
C'est certain, la 3e génération gagne en polyvalence, sans
atteindre celle de la référence Golf GTI. Elle reste très efficace
et performante, grâce à la rigueur des trains roulants et au moteur
turbo. Le train avant est désormais moins tranchant, mais il est
compensé par un fessier très joueur. Le pack Cup et la boîte
manuelle sont incontournables (testés
en vidéo par ici). Vivement la Trophy !
> Moteur : 4 en ligne turbo, injection directe, 1,8 litre, 280
ch à 6 000 tr/mn, 39,7 mkg à 4 800 tr/mn
> Transmission : aux roues AV, 6 rapports robotisés
> Poids constructeur : 1 430 kg
> L - l - h : 4 364 - 1 875 - 1 435 mm
> Pneumatiques AV/AR : 235/40 R 18 (modèle essayé en Bridgestone
Potenza S001 245/35 R 19)
> Performances annoncées : 0 à 100 km/h en 5''8, 1 000 m D.A. en
25''0, 250 km/h
> Prix de base/modèle essayé : 39 400 €/ 45 150 €
Photo : Yann Lefebvre/EMAS


