GP du Brésil F1 1991 : le jour où Ayrton Senna a triomphé sur une McLaren blessée
Homme vs machine : le Grand Prix du Brésil 1991 de Formule 1 ne pourrait mieux résumer la victoire du pilote sur sa mécanique lorsque Ayrton Senna l'emporta à domicile au volant d'une McLaren MP4/6 blessée au combat...
En cette semaine de Grand Prix du Brésil de Formule 1, Sport Auto remonte le temps, en route vers l'une des éditions les plus mémorables (et elles furent nombreuses !) de l'épreuve disputée du l'Autodromo Carlos Pace d'Interlagos, à Sao Paulo.
Ayrton Senna : sa célèbre McLaren MP4/6 à vendre
Les têtes pensantes de la maison RM
Sotheby's ont eu le nez fin en choisissant cette
semaine de l'année, à la veille de la 21ème manche du
Championnat du monde, pour annoncer la mise en vente
prochaine d'un sacré morceau d'histoire de la F1.
Comme vous pouvez le lire dans nos colonnes, c'est
une des monoplaces les plus mythiques qui
s'apprête à faire vriller les enchères : la McLaren-Honda
MP4/6 avec laquelle Ayrton Senna triompha à
domicile en 1991.
Cette 28ème victoire en F1, sur 41, le
natif de Sao Paulo alla la chercher au plus
profond de ses tripes, la faute à des conditions météo peu
clémentes et, surtout, une boite de vitesse
bloquée sur le sixième rapport en fin de course !
Car l'attente fut longue pour Senna. Malgré deux titres
mondiaux et une pluie de victoires et pole, jamais le
Brésilien n'était parvenu à remporter son Grand Prix
national, depuis sa première apparition en
1984, au volant d'une Toleman,
jusqu'à cette fameuse saison 1991. Entre problème mécanique, sortie
de piste, ou simple destin cruel : la malchance était toujours
là.
GP du Brésil F1 1991 : pilote vs machine
1991 : Interlagos intervient
en guise de deuxième épreuve de la campagne, débutée dans les rues
de Phoenix où Senna s'est d'emblée imposé.
Gonflé à bloc par le soutien du public, il signe
une nouvelle pole position à domicile.
Au feu vert, il prend le large mais doit composer avec la
pression des Williams. Bien décidé à lui mener la
vie dure, Nigel Mansell ne lâche pas d'une semelle
pendant près de 50 tours, jusqu'à ce qu'une
crevaison ne précipite son abandon.
Au fil des tours, le ciel se noircit et la pluie
s’invite, transformant le tourniquet pauliste en
véritable patinoire.
Senna s'accroche en tête. Au 60ème passage, la
malchance frappe à nouveau : sa boîte
de vitesses commence à se bloquer ! D’abord la quatrième
vitesse disparaît, puis la troisième, et la cinquième. Il ne
lui reste alors plus que la sixième !
Déterminé à rallier l'arrivée en vainqueur, le double
Champion du monde adapte son pilotage avec finesse et
maîtrise, négociant chaque virage sur un seul rapport, tout en
gérant le couple de son V12 pour l'empêcher de
caler...
GP du Brésil F1 1991 : la délivrance, dans la douleur
Sous une pluie de plus en plus forte, Senna
parvient à maintenir son avance sur un Ricardo Patrese
lancé à sa poursuite. Les dernières boucles sont un
calvaire pour le leader dont les bras et épaules sont
tétanisés sur le volant.
Sans assistance de direction et bloqué dans un rapport
unique, il lutte contre sa McLaren qui n'en veut plus,
contre les crampes et le chrono qui tourne.
Jusqu'à la délivrance et ce drapeau à damier tant attendu
!
Quand il franchit la ligne d’arrivée, le public est en délire. Dans
le cockpit, Senna pousse un cri de douleur et
d’épuisement à la radio, entendu en direct lors de
la retransmission en mondovision !
Epuisé mentalement et physiquement, il immobilise
sa machine meurtrie dans la ligne droite du circuit. Les
commissaires de piste accourent pour l'aider à s'extraire
de son cockpit. Les doigts crispés sur le rebord de son
habitacle, il nécessite même l'aide du personnel pour
retirer son casque et ses gants.
Les caméras de télévision sont là pour immortaliser le moment où
Senna montre enfin son visage, marqué par le soulagement
mais aussi par le terrible effort fourni. Emmené vers le
podium, il puise dans ses dernières forces pour recevoir
son trophée, qu'il a toutes les peines du monde à brandir
devant ses milliers de supporters.
"C’était la course la plus dure de ma vie. Mais je ne pouvais pas abandonner ici, pas devant mon peuple", confiera-t-il plus tard.



