F1 - Comment Hamilton a pu battre Vettel

Mercedes a fait évoluer la stratégie de Lewis Hamilton plusieurs fois pour qu'il puisse gagner à Barcelone. Sebastian Vettel avait toujours un coup de retard.
Lewis Hamilton a remporté le Grand Prix d'Espagne grâce à sa
stratégie. Il était en pole mais Sebastian Vettel l'a doublé au
départ. Les dépassements sont toujours difficiles sur le circuit de
Barcelone et une fois deuxième, Hamilton ne croyait plus vraiment à
la victoire.
« Les chances de gagner la cette course, dans cette position,
derrière une voiture si rapide, étaient très, très faibles, »
a expliqué Lewis Hamilton en conférence de presse.
Mercedes a commencé à réfléchir aux solutions pour reprendre
l'avantage : « Il était important que Lewis reste proche de
Sebastian, » a précisé Toto Wolff, le patron de Mercedes
Motorsport, au site officiel de la F1. Hamilton avait 2,741sec de
retard au troisième tour, mais il a ensuite pu se rapprocher
légèrement. Mercedes s'est concentrée sur la stratégie
: « Il a fallu se poser la question de faire l'undercut,
» indique Wolff. En d'autres termes, anticiper le premier arrêt
pour que Hamilton bénéficie de pneus neufs, et se retrouve en tête
quand Vettel passerait aux stands à son tour. C'est finalement
Vettel qui s'est arrêté le premier. « Il était réaliste
que Ferrari évite l'undercut et fasse l'arrêt de Sebastian, »
précise Wolff.
« A partir de là, il était important de voir son évolution
dans le trafic. Nous espérions que (Daniel) Ricciardo compliquerait
la vie de Seb, mais le rythme de Seb était beaucoup plus rapide et
il l'a doublé assez facilement. Nous ne pouvions plus faire grand
chose donc nous avons décidé d'allonger le relais de Lewis et
d'espérer qu'à la fin de la course il ait des pneus en meilleur
état. »
Et pour augmenter cet avantage, Mercedes a décidé de modifier la
stratégie : « Nous avons eu une stratégie inversée, prendre
les pneus médiums et garder les tendres pour la fin, pour pouvoir
attaquer, » explique Wolff. « L'espoir d'attaquer
! »
Mercedes s'est également appuyée sur Valtteri Bottas. Quand
Sebastian Vettel a fait son premier arrêt, il a repris la piste
derrière le Finlandais et il a eu besoin de plusieurs tours pour le
doubler. Même s'il a fait un beau dépassement (vidéo), Vettel savait que cet épisode était
mauvais pour sa course : « J'ai perdu énormément de temps
donc je n'étais pas si content, parce que la vraie bagarre était
avec Lewis, » a indiqué Vettel en conférence de presse.
Le pari qui a tout changé
L'intervention de la voiture de sécurité virtuelle, après
l'accrochage entre Stoffel Vandoorne et Felipe Massa, a poussé
Mercedes a modifier le timing de sa stratégie. Lewis Hamilton est
repassé sur les pneus tendres plus tôt que prévu.
« Ca nous a forcés à repenser notre stratégie, » explique
Toto Wolff. « Notre groupe dédié à la stratégie a décidé de
faire l'inverse de ce qui était prévu : s'arrêter à la toute fin de
la voiture de sécurité virtuelle pour que Sebastian ne puisse pas
réagir. »
Hamilton est passé aux stands au moment même où l'interruption de
course prenait fin. « Notre timing a été parfait ! » se
réjouit Wolff. « Je tire mon chapeau à James (Vowles, le
responsable de la stratégie) et à son équipe pour ce
coup. »
Pourquoi choisir ce timing ? « Si on s'arrête dans des
circonstances normales, la perte est d'environ 21 secondes, avec
toutes les voitures qui vont très vites, » explique Wolff.
« Mais sous régime de voiture de sécurité virtuelle, chaque
voiture va moins vite et la perte dans les stands est plus faible,
et c'est là que nous avons gagné du temps. »
Ferrari a vite réagit, mais il était déjà trop tard. Sebastian
Vettel avait 7,760sec d'avance un tour avant l'arrêt de Lewis
Hamilton. Il s'est arrêté un tour à peine après l'Anglais et
il a repris la piste à ses côtés. Il a gardé l'avantage au premier
virage, après un petit contact. « J'étais un peu surpris qu'il
soit si proche, » a reconnu Vettel sur le podium. Mais
Hamilton était désormais dans ses roues, avec les pneus tendres,
alors que Vettel avait les médiums : « Je faisais tout ce
que je pouvais pour rester devant et j'ai été un peu chanceux parce
qu'il y avait toujours une voiture devant pour me donner
l'aspiration, mais dès que je me suis retrouvé seul, il m'a
facilement dépassé, » précise Vettel. Ce dernier n'a pas pu
contenir Hamilton (vidéo) et il a comparé l'Anglais à
un « train » par radio.
Au final, le temps perdu derrière Bottas puis dans le deuxième
arrêt ont coûté cher à Vettel : « Nous avons perdu
beaucoup de temps à nous battre avec Valtteri, nous avons perdu
quatre secondes, » a assuré Vettel en conférence de presse.
« Puis, je ne sais pas comment, nous avons fait disparaître
huit secondes au deuxième arrêt. Si on ajoute les deux, ça fait 12
secondes. »
Une fin de course sous tension
Une fois en tête, Lewis Hamilton n'avait pas la victoire assurée
puisque plusieurs paramètres étaient encore incertains. Il fallait
garantir que les pneus tendres tiendraient jusqu'à l'arrivée, avec
un relais plus long que prévu, et Mercedes ignorait si Sebastian
Vettel allait repasser aux stands, pour attaquer à son tour.
« Sous certains aspects, nous savions que nous aurions un
avantage en pneus tendres, » précise Toto Wolff. « Nous
savions aussi qu'il faudrait les garder jusqu'à la fin, un peu plus
de 30 tours, donc nous savions que nous avions notre chance, même
si c'était un pari. Nous ne savions pas si Ferrari prévoyait un
troisième arrêt pour nous attaquer, donc nous avons essayé d'avoir
une avance de deux secondes et demie, pour pouvoir réagir (en
faisant aussi un troisième arrêt). »
Ferrari a bel et bien envisagé ce troisième arrêt, en évoquant un
« plan C » par radio : « Nous avions une grosse
avance sur Daniel (Ricciardo, troisième après l'abandon de Valtteri
Bottas) derrière, donc nous pouvions tout faire, » explique
Sebastian Vettel. « Il y a eu une grosse conversation pour
essayer quelque chose. Nous espérions que Lewis souffrirait avec
ses pneus à la fin, mais normalement en fin de course, la piste a
beaucoup de gomme et les pneus tiennent longtemps, donc il n'a a eu
aucun problème. Nous avons essayé d'attaquer, de rester au contact,
mais je n'étais jamais assez proche. »
Hamilton devait attaquer, sans en faire trop : « C'était un
pari parce qu'on veut l'écart pour éviter l'undercut (de la part de
Vettel) mais on veut aussi faire durer les pneus, » souligne
Wolff. « Nous avons eu un travail d'équipe exceptionnel
dans la stratégie et dans le pilotage de Lewis ! »
Lewis Hamilton avait-il une chance de gagner sans cette stratégie ?
Il en doute, et il s'est totalement reposé sur ses ingénieurs
: « Je n'ai pas toutes les informations, ce que les
ingénieurs voient dans la stratégie, je n'en sais rien, à part
notre stratégie pour les arrêts et ce qu'ils me disent, »
indique Hamilton. « Je ne sais pas comment ça se passe, la
seule chose que je peux faire, c'est tout donner. »
« Je fais confiance à mes ingénieurs et à mes stratèges et ils
ont fait un travail incroyable. Ce qui nous a permis de rester très
proches (avant le dépassement du troisième relais), c'est que nous
étions décalés sur les pneus. Si j'avais eu les mêmes pneus que
lui, ça n'aurait probablement pas été aussi passionnant. »


