F1 - Mercedes juge aussi sa domination néfaste

Mercedes a conscience que sa domination est nuisible. L'équipe veut séduire avec le duel entre Lewis Hamilton et Nico Rosberg, sans qu'il soit trop tendu.
Adrian Newey, le responsable technique de Red Bull, s'est
plaint du règlement actuel. Le développement
est très limité et il fige la domination de Mercedes, alors que la
FIA a par le passé plutôt tenter d'éviter une telle situation.
L'équipe allemande a elle-même conscience que sa domination nuit au
spectacle.
« Notre domination est mauvaise pour la Formule 1, » a
reconnu Toto Wolff, le patron de Mercedes Motorsport, au Daily
Mail. « Ca rend la course ennuyeuse. Le résultat devient
prévisible. Le sport a besoin de plusieurs vainqueurs. Il faut des
résultats aléatoires. Il faut que le second couteau gagne. Au
moment où on devient la force dominante, on souffre et la marque
souffre. »
« C'est arrivé à Red Bull. Ils ont rejoint le sport. Ils ont
sauté dans la piscine quand ils ont fini troisième à Monaco avec
Coulthard. Ils avaient les Formula Unas, les filles dans le
paddock. Ils avaient le Red Bulletin (un magazine satirique). Ils
créaient la controverse. Ils avaient une marque superbe. Mais
après avoir gagné quatre titres consécutifs, ils sont devenus une
marque antipathique. Personne n'aime l'establishment. »
« Donc notre domination est mauvaise pour la Formule 1 et elle
est mauvaise pour nous, mais que puis-je faire ? La seule
chose à faire est de rester humble, de garder les pieds sur terre,
d'accepter que ce sont des circonstances particulières, qu'elles
pourraient être différentes à l'avenir, et de tenter d'apprécier le
moment. »
Le duel entre Hamilton et Rosberg pourrait tout relancer
La domination de Mercedes peut créer des jalousies. Toto Wolff
pense qu'elle doit être un modèle, mais que l'équipe doit aussi
trouver des solutions pour rester populaire.
« Nous vivons dans un monde où personne ne veut que les autres
réussissent, » estime Wolff. « Il semble que nous sommes
heureux des malheurs des autres. C'est une erreur. Si on est
heureux des malheurs des autres, ça rend malheureux aussi. Ca
revient comme un boomerang. »
« Ca reste un environnement compétitif mais je suis plutôt
inspiré par quelqu'un qui réussit. Je préfère m'en inspirer plutôt
que l'envier. Donc je veux que la domination se poursuive mais si
elle doit continuer comme ça, je dois penser à ce que nous devons
faire pour ne pas devenir l'ennemi et comment nous pouvons aider le
spectacle. »
A la fin des années 1980, McLaren a très largement dominé le
championnat, avec un écart plus gros que celui que Mercedes a
aujourd'hui, mais cela n'a pas été vu comme un problème puisque
l'équipe permettait à Alain Prost et Ayrton Senna de
s'affronter.
Mercedes veut faire la même chose avec Lewis Hamilton et Nico
Rosberg. L'équipe leur a pourtant imposé des stratégies identiques en 2015, ce
qui pouvait nuire au spectacle, mais elle envisage une
nouvelle approche.
« Peut-être qu'il faut lâcher ces deux là (Hamilton et
Rosberg) totalement, » précise Wolff. « Les faire avoir
leur propre stratégie. Ca serait une solution. »
Wolff veut contenir la concurrence au sein de l'équipe
Même si Toto Wolff a conscience que la rivalité entre Lewis
Hamilton et Nico Rosberg est l'un des seuls atouts pour que la
domination de Mercedes soit acceptée, il ne veut pas qu'elle
devienne trop forte. Il a prévenu les deux pilotes que leurs places
sont menacées si la situation ne s'apaise pas
et il craint une escalade des tensions.
« Ca pourrait prendre une autre dimension, » souligne
Wolff. « Je veux contenir ça. Je ne veux pas une bagarre dans
l'équipe. J'aimerais que les boxeurs se battent mais pas que les
entraîneurs, les physios et tout le monde soient sur le
ring. »
« Je veux que les boxeurs se comportent comme des boxeurs qui
se battent vraiment mais après le combat, on peut être sportif et
embrasser son rival. Mais le dilemme est là. C'est facile en
théorie. »
Wolff estime qu'une rivalité exacerbée pourrait nuire à l'équipe : « Il faut
comprendre qu'on est un modèle. Si vous créez la controverse, votre
animosité, vos humeurs, votre comportement inconstant, ça se
répandra dans l'équipe. Les gens vont réagir à ça. Je veux avoir un
état d'esprit positif. Ce message n'était pas que pour eux. Ce
message était pour toute l'équipe. »
Un équilibre dur à trouver
Mercedes veut trouver le bon équilibre entre une rivalité
interne, sans désigner un numéro un et un numéro deux, et une
relation qui reste saine.
« Je préfère continuer comme ça, » assure Wolff.
« Pour la F1, il faut peut-être des éruptions volcaniques
entre eux. Peut-être que ça finira en un accident et de
l'animosité, peut-être que pour le divertissement c'est ce qui
manque dans la domination de Mercedes. Peut-être qu'il faut ça,
mais fondamentalement, je ne pense pas que l'équipe en a
besoin. »
« Il y a deux ans, j'ai discuté avec Alain Prost et je lui ai
demandé : "Quand est-ce que c'est devenu incontrôlable entre
vous et Senna ?". Et il a dit que c'est devenu incontrôlable
quand ils ont tous les deux senti qu'il y avait des choses
planifiées dans l'équipe, que ce n'était pas honnête et
transparent, on sentait toujours que l'autre était traité d'une
façon différente ou mieux. Ca a créé de l'insécurité pour les deux.
Donc j'ai tenté d'être très transparent. »
« Je peux vous donner une exemple simple. Avec Lewis, il ne
peut pas avoir la sensation d'être sous la contrainte. Dans son
ancienne équipe, il n'y avait pas beaucoup de discussions. Il y
avait plutôt des contraintes. Et si on contraint quelqu'un dans son
adolescence, on en fait un rebelle. »
« Nico a besoin de plus de messages clairs sur ce qui est
attendu et ce qui ne l'est pas. Ils comprennent ce qui est
important et bon pour l'équipe. Dans la chaleur de leur bagarre,
c'est parfois oublié et il faut le rappeler sous différents
aspects. »


