Infiniti Q60 S (2017): le coupé de 405ch à l'essai

ESSAI. La discrète carrière du coupé Infiniti repart en France. Le Q60 succède ainsi au G37 et affronte les géants allemands à l'aide d'un V6 biturbo de 405 ch.
En 2002 apparaissait l'Infiniti G35, un coupé aux faux airs de
Nissan 350Z rallongé et assaisonné à la sauce guimauve. L'auto n'a
pas les arguments pour concourir au titre de Miss Car mais elle est
pourtant la voiture la plus vendue dans sa catégorie, pendant trois
années d'affilée, aux Etats-Unis. En 2007, le 350 Z laisse sa place
au 370 Z et devinez quoi : la G35 devient G37.
Aujourd'hui, arrive la Q60, en version S s'il vous plaît. Le coupé
n'était pas vilain en photos, il est carrément chouette en vrai et
conserve quasiment tous les gimmicks du concept Q80 Inspiration. «
Il nous a fallu dessiner la masculinité. La Q60, c'est design to
perform. » Gerardo Carmona n'est pas gérant d'un Tex-Mex mais
manager senior de la Stratégie globale produit chez Infiniti.
Excusez du peu.
Infiniti et les Etats-Unis, une histoire d'amour
C'est à lui que revient l'honneur de convertir les journalistes, très majoritairement américains, qui ont fait le déplacement aujourd'hui à San Diego. Oncle Sam et Infiniti, c'est une histoire d'amour sérieuse. Plus de la moitié de ces autos trouvent preneur ici. Le QX80, qui est au design automobile ce que le short en velours est au bon goût vestimentaire, se croise ici à tous les coins de rue. Et des coins, il a dû s'en prendre vu son visage congestionné.Heureusement, la Q60 est bien plus heureuse en termes de style. Dedans, c'est moins chatoyant. Pas de vraie personnalité, des matériaux de qualité parfois assemblés à la va-vite et une ambiance plus sérieuse qu'envoûtante. On vous embarque pour notre vidéo exclusive de l'essai Q60S.
Deux turbos, sinon rien
Techniquement, deux atouts majeurs pour le coupé japonais.
Primo, le VQ37VHR n'est plus, remplacé par le VR30DDTT. Non, il ne
s'agit pas d'un tirage des Chiffres et des Lettres mais des
appellations officielles de l'ancien V6 atmo et du nouveau 3 litres
doublement turbocompressé. Sa puissance varie de 304 (Q60) à 405 ch
(Q60S). C'est évidemment cette version que nous avons essayée. Ce
nouveau moteur est très compact. La plus puissante version emmène
deux pompes pour l'intercooler, au demeurant plutôt riquiqui (4,9
litres). Vous aimez les chiffres, en voici pléthore. Grâce à sa
nouvelle conception, avec notamment un collecteur d'admission
monobloc se greffant directement sur le haut moteur, ce V6 ne pèse
que 221 kg, système de suralimentation compris (26 kg).
Les turbos bénéficient d'une soupape de décharge contrôlée
électroniquement qui régule le flux à l'échappement. Les turbines
tournent à 220 000 tr/mn, voire 240 000 en pic, pour une pression
maximale d'un bar. Les chambres de combustion sont recouvertes d'un
traitement miroir qui permet là encore de sauvegarder du poids (1,7
kg) et de réduire les frottements des pistons de 40 %. On vous
laisse le temps de digérer tout ça. Deuxième changement technique :
la DAS, pour Direct Adaptive Steering, ou direction adaptative…
directe, dans le texte. Infiniti en est à la seconde génération de
ce système qui préfère les câbles aux relations mécaniques. Plus de
crémaillère mais une flopée de capteurs qui se chargent d'envoyer
instantanément les informations sur l'angle et la rapidité du
braquage à des actuateurs qui font tourner les roues de la façon
appropriée. Selon Infiniti, cette direction, de série en France sur la Q60S (à configurer par ici), n'a
que des avantages puisqu'elle permet de moins consommer et fatigue
moins le conducteur, les dégradations du bitume ne se répercutant
plus dans les organes mécaniques. « Et nous avons énormément
travaillé sur le ressenti, perfectible sur la première génération
», assène l'ami Gerardo. Voir la vidéo de notre essai en Californie.
Et le feeling ?
Mais la mariée est trop belle et tout n'est pas rose. Cette
fameuse direction, qui ne propose pas moins de sept programmes,
souffle le chaud et le froid. Oui, les heurts générés par le
goudron dépravé de l'arrière-pays californien sont quasiment
absents. C'est vrai aussi que pouvoir paramétrer à la fois son
assistance et la réactivité de la réponse au braquage a quelque
chose de stimulant mais cette direction n'est pas exempte de
reproches.En normal, le point milieu n'existe plus et les mises en
effort sont trop artificielles. En ôtant des organes mécaniques,
Infiniti a aussi tronqué en partie la liaison homme/machine.On se
console vite néanmoins à bord de cette Q60S. La suspension pilotée
peut être basculée en Sport sans arrière-pensée : les compressions
ne sont jamais percutantes. L'amortissement analyse en continu
plongée, cabrage, roulis, lacet pour maintenir au mieux l'assiette.
Cette dernière est bien garnie (1 890 kg) mais rien n'en tombe en
virage. Le comportement est très neutre, prévenant. L'avant manque
de grip mais pas dans des proportions gênantes. L'électronique, du
moins roues droites, est calibrée de façon assez laxiste, ce qui
n'est pas pour nous déplaire. La castration du moteur n'est pas
brutale, la boîte de vitesses non plus d'ailleurs.
Cette automatique à 7 rapports est du genre bien élevé mais aurait
pu abuser un peu plus de caféine. On lui reconnaît au moins le
mérite, une fois le mode manuel enclenché, de nous laisser vraiment
maître de la situation, le rupteur, à 7 200 tr/mn, étant atteint
sans que la vitesse supérieure ne s'engrène. Et ce nouveau moteur,
nous direz-vous ? Comme le reste de la copie : bien mais peut mieux
faire. Il y a un temps de latence des turbos, le boost déboulant
ensuite brusquement, engendrant des pertes de motricité.
L'accélérateur est un peu raide à notre goût et, si la plage
d'utilisation est appréciable, y compris à haut régime, quel
dommage que le timbre métallique du V6 ne soit pas mis en valeur
par un échappement digne de ce nom. Pas de déflagrations, ni de
beau râle envoûtant et grave : nous n'y étions pourtant pas
opposés. Mais compte tenu de l'offre pléthorique, du moins de ce
côté de l'Atlantique, en ce qui concerne la préparation, surtout
sur base de japonaise, la Q60S pourra accompagner ses accélérations
musclées d'un rugissement à la hauteur.
Un dernier regret : la version que nous avons essayée, simple
propulsion, n'est pas disponible en France, Infiniti jugeant
probablement les conducteurs français inaptes à dompter pareille
cavalerie sans l'aide de deux roues motrices supplémentaires.
Dommage car c'est le modèle le plus ludique… Ce coupé n'est ni
démonstratif, ni spectaculaire mais ce qu'il se propose de faire,
il le fait bien. Bonne tenue de route, mécanique vitaminée à défaut
d'être spectaculaire : Série 4 et Classe C coupé ont un adversaire
à prendre au sérieux.
Quelques chiffres
Voici quelques données sur le coupé Q60S. En France, il n'est
malheureusement disponible qu'en intégrale et en boîte auto. La
propulsion est réservée à la version quatre cylindres turbo de 211
ch.
Technique :
> Moteur : V6 biturbo, injection directe, 3 litre, 405 ch à 6
400 tr/m, 48,4 mkg à 1 600 tr/mn
> Transmission : aux roues AR (intégrale de série en France),
boîte 7 rapports auto
> Dimensions : L - l - h : 4 690 - 1 850 - 1 395 mm
> Pneumatiques AV/AR : 245/4 0 & 265/35 R 19
> Performances annoncées : 0 à 100 km/h en 5''0, 250 km/h.
> Prix de base/modèle essayé : 56 950 € (intégrale)/ 66 450
€
par Sylvain Vetaux


