Essai - Maserati GranCabrio Trofeo (2025) : la "dolce vita" au long cours ?

Publié le 11 août 2025 à 15:00
Essai - Maserati GranCabrio Trofeo (2025) : la "dolce vita" au long cours ?

Trofeo ou pas, la Maserati GranCabrio incite à la "dolce vita". Rythmée par un V6 rentré dans les rangs et infiniment moins tonitruant que le V8 d’antan. Voyons ce qu’elle donne dans le cadre d’un voyage au long cours.

La scène s’est répétée une dizaine de fois au cours de notre périple. Tous âges et tous profils confondus : « Waouuuh, elle est ma-gni-fique. Ces Italiens… ils savent dessiner les voitures ! »
En l’occurrence, le designer à qui l’on doit ce coup de crayon s’appelle Klaus Busse, chef du style de Maserati depuis 2015 et Allemand de son état. Mais pas le temps d’entrer dans ce genre de détail, l’heure tourne. Direction l’île de Ré et sa région, pour une croisière au long cours.
L’idée de ce road trip est de redécouvrir la Maserati GranCabrio Trofeo après un galop d’essai qui nous avait laissés sur notre faim, nostalgiques que nous sommes du V8 atmosphérique, de son caractère impétueux et de sa sonorité inimitable.
Sur le plan du style en tout cas, il n’y a pas de regret à avoir. La gueule de squale fait mouche et la configuration de notre modèle d’essai en rajoute une couche : bleu Modena et capote grenat, notre GranCabrio se pose là.
Aucun risque de la confondre avec les BMW M8 cabriolet ou Mercedes SL de chez AMG. L’habitacle 2 + 2 est de la même veine, avec des cuirs rehaussés de surpiqûres, chic et sans fioritures.
En revanche, l’ambiance moins baroque que dans le passé est devenue non pas interchangeable, mais disons presque classique. Le caractère moteur et le châssis ont, eux aussi, beaucoup changé…

Maîtrise

Il y a prescription, donc je peux en parler : pour avoir expérimenté une série de tonneaux à 130 km/h sur une autoroute au volant d’une Maserati Coupé 4200 GT, je confirme que le comportement routier est moins scabreux que dans le passé.
Trois raisons à cela, une mécanique moins (!) bouillante, une transmission intégrale qui veille au grain et un empattement long comme un jour sans pain. Mais ce qui interpellera le plus les connaisseurs, c’est la discrétion du moteur. Le démarrage met la puce à l’oreille.
Hormis l’échappement qui vrombit, le cliquetis et les vibrations ressemblent presque à ceux d’une citadine quand la désactivation d’un banc de cylindres lui coupe la chique. Cela ne l’empêche pas d’avoir du répondant. Une fois ses liquides en température, la Trofeo passe du ronron docile aux grondements prolongés d’un multi-cylindre volontaire.
Sur le plan sonore, le plus spectaculaire reste la déflagration des silencieux qui accompagne les changements de vitesse en mode Corsa. Le bruit est sourd, rauque et feutré, mais manque d’aigus, même à l’approche de la zone rouge. Pas un ténor, c’est clair.
Mais le 3 litres abat ses cartes au fil des kilomètres. C’est un moteur rond, disponible, puissant et besogneux. Il manque néanmoins d’éruptions volcaniques. Surtout face à une concurrence qui place la barre très haut dans le domaine, telles la Porsche 911 Turbo, l’Aston Martin Vantage ou encore la Ferrari Roma cabriolet.
Sur autoroute, en revanche, ce caractère lissé et le filtrage des suspensions autorisent à parcourir de grandes distances, comme dans un TGV. L’autre bonne nouvelle concerne le permis de conduire, dans la mesure où ce V6 biturbo n’est pas un pousse-au-crime.
Disons qu’une 911 Turbo S ou une Ferrari Roma auront bien plus vite fait de vous faire péter les plombs, en clair, de prendre votre permis et d’en faire des confettis. En mettant le cap sur Rochefort, puis La Rochelle, la Maserati avale les kilomètres sur une mer d’huile. Les longues lignes droites laissent un boulevard pour se familiariser avec l’instrumentation.
C’est-à-dire l’écran tactile qui regroupe la quasi-totalité des fonctions. On se demande quand même pourquoi les réglages basiques, comme la climatisation, n’ont pas de simples boutons. Cela aurait permis de garder les yeux sur la route en permanence, ce qui ne semble pas idiot. Passons.
Après un premier arrêt à la pompe, il est temps de couper court à la monotonie de l’autoroute. En plongeant dans la bretelle qui mène vers la sortie, la Trofeo démontre une stabilité impériale et un équilibre sans faille. Ses mouvements de caisse sont bien jugulés, sans roulis exagéré ni verrouillage caricatural.
On sent le poids, sans jamais avoir l’impression de conduire une enclume. Avec 1 895 kg annoncés sur la balance, Maserati est dans la moyenne haute du segment. La répartition entre essieux et le centre de gravité relativement bas lui confèrent cependant un bel équilibre.
Sur les départementales de Charente-Maritime, la GranCabrio fait même preuve d’une agilité déconcertante. Pas au point d’inquiéter les cadors des G latéraux, mais suffisamment pour inspirer confiance et ne pas craindre de repousser occasionnellement ses freinages.
Derrière ses faux airs désinvoltes, cette Maserati peut facilement soutenir une cadence musclée. L’autre différence majeure par rapport aux Maserati d’antan concerne la motricité. Même sur des routes au bitume irrégulier, voire légèrement gravillonné, les remises de gaz se font sans arrière-pensée.
Les départementales des environs de Surgères, où des virages se referment parfois en aveugle, ne sont qu’une simple formalité. Il suffit de braquer. La position du moteur est assez reculée pour ne pas alourdir le nez. L’agilité est remarquable malgré l’empattement de péniche et tout se fait dans la plus grande fluidité.
Pour ne rien gâcher, le filtrage des suspensions est à l’avenant. Un nouvel arrêt à la pompe et un lavage en vue de la séance photos sont l’occasion de dresser un premier bilan. Si l’on regrette le tempérament impétueux de l’ancien V8 ? Evidemment !
La Trofeo a moins de caractère, mais elle n’est pas dénuée d’intérêt pour autant. En réalité, elle est à la croisée des chemins. Elle n’est pas aussi démonstrative qu’une 911 Turbo Cabriolet, pas aussi luxueuse qu’une Bentley Continental GTC ni aussi agile qu’une Ferrari Roma Spider, néanmoins elle présente des qualités de vraie GT. A commencer par une capacité surnaturelle à effacer les kilomètres.

Calme et volupté

La Rochelle disparaît dans les rétroviseurs et le port de Saint‑Martin‑de‑Ré se dresse à travers le pare‑brise, en cette fin de journée aux couleurs d’été. La Maserati arpente les ruelles désertes avec le V6 en sourdine, dans une lumière presque tamisée et un calme olympien. Malgré ses 550 ch, la Trofeo se cale volontiers sur un rythme coulé.
Pas de vague ni de saute d’humeur à l’accélérateur, le 3 litres repart avec la régularité d’un métronome. Rien à voir avec ces moteurs de course domestiqués qui piaffent d’impatience en guettant le moindre appel du pied pour décamper. La vraie nature de la Trofeo est éminemment docile.
Mais n’allez pas croire qu’elle soit soporifique, puisqu’elle vous fait ressentir la route à travers des remontées d’informations infiniment plus présentes qu’au volant d’une Mercedes‑AMG SL par exemple. En clair, on ne s’ennuie pas à son volant.
Même après quatorze heures de conduite quasi non‑stop à la recherche de la lumière parfaite pour clore ce premier jour de prises de vues. Et ne comptez pas sur Laurent Villaron, notre photographe émérite, pour en avoir assez.
Ce qui tombe bien, puisque je ne suis pas pressé non plus de quitter le siège baquet. En position ouverte ou fermée, la GranCabrio reste une invitation permanente au voyage. Surtout que l’air iodé ajoute un parfum de vacances avant l’heure.
Quant au plaisir de rouler décapoté, on pourrait en écrire un roman. Autant un cabriolet peut être imbuvable devant la terrasse d’un restaurant blindé, autant il n’a pas d’équivalent sur une route déserte, un soir d’été.
La Trofeo repart au trot dès l’aurore du lendemain. Avec une boucle jusqu’à ce décor de bout du monde, devant l’île Madame, au sud du fort Boyard, en face d’Oléron. Le temps semble s’être arrêté devant cette route submersible magnifique mais qui n’inspire pas assez confiance pour y poser les roues de notre carrosse, sous peine de l’imaginer tanqué dans le sable, à la marée montante.
Ne tentons pas le diable et profitons de l’ambiance de carte postale qui suffit au bonheur de notre photographe. La Maserati prend la pause puis rebrousse chemin en mettant le cap vers Les Sables‑d’Olonne. Le caractère infatigable du V6 se dévoile encore.
Et nous de répéter notre rengaine, à savoir le regret d’une mélodie et de vibrations plus suggestives. Mais l’agrément des relances est manifeste. La Trofeo survole ainsi les marais salants, en se dirigeant vers les forêts de pins. Toujours plein ouest, lorsque l’océan Atlantique et son bleu dur se dessinent dans le pare‑brise.
Une heure plus tard, le long capot arpente le port des Sables devant la foule des beaux jours. Sous les yeux du photographe qui n’en perd pas une miette, la Maserati se plie à tous les exercices. Le seul bémol concerne la fragilité des magnifiques jantes alu de 20 pouces et leur pneu à profil ultra‑bas, qui donnent l’impression de déborder du pneu.
Mieux vaut avoir le compas dans l’œil pour ne pas les frotter contre le trottoir lors des manœuvres de stationnement un peu serrées. Hormis cela, la prise en main de la Trofeo est d’une extrême facilité. Tout comme sa propension à se fondre dans la circulation sur un filet de gaz.
C’est à ce rythme que nous levons les voiles, en mettant le cap vers Nantes. De Brétignolles‑sur‑Mer à Sallertaine, le V6 ronronne et dépasse les camping‑cars d’un bref rétrogradage. Les relances sont énergiques, le couple est bien présent, mais il manque d’un je‑ne‑sais‑quoi.
Disons que cette voiture est tellement belle qu’on aimerait une bande‑son et des vibrations à la hauteur de sa plastique irréprochable. Il faut se faire une raison. Cela ne l’empêche pas d’être une auto remarquable. Notamment par sa faculté prodigieuse à aligner les kilomètres sans générer la moindre fatigue, et avec un style inimitable.

L'avis de Laurent Chevalier

Au terme de ces kilomètres sans compter, la Trofeo démontre une capacité surnaturelle à voyager. Notamment grâce à l’équilibre du châssis, à une stabilité et à une motricité qui offrent une sécurité active de premier ordre.
On regrette juste le tempérament mécanique de ce V6 certes puissant, mais pas assez communicatif. Voyons le verre à moitié plein, Maserati n’a jamais produit de GT aussi douée pour effacer les kilomètres.

Maserati GranCabrio Trofeo : fiche technique

  • Moteur : V6 biturbo, 24 S
  • Cylindrée : 2 992 cm3
  • Puissance maxi : 550 ch à 6 500 tr/mn
  • Couple maxi : 66,2 mkg à 3 000 tr/mn
  • Transmission : intégrale, 8 rapports auto
  • Antipatinage/autobloquant : de série/non
  • Poids constructeur : 1 895 kg
  • Rapport poids/puissance : 3,4 kg/ch
  • L - l - h : 4 966 - 1 957 - 1 365 mm
  • Empattement : 2 929 mm
  • Réservoir : 70 l
  • Prix de base : 207 050 €
  • Prix des options/malus : 19 912/70 000 €
  • Prix du modèle essayé : 296 962 € (malus compris)
  • V. max. : 316 km/h
  • 0 à 100 km/h : 3’’6
  • 0 à 200 km/h : 12’’2

Retrouvez notre essai de la Maserati GranCabrio Trofeo dans le Sport Auto n°762 du 27/06/2025.

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