Essai - Cupra Formentor VZ TSI : véloce, sympa à conduire… mais un malus indécent !
Vous n’avez pas le choix : avec la famille, il vous faut de la place, de la polyvalence. Mais rouler en monospace hybride est inconcevable. Alors pourquoi ne pas se tourner vers l’un des SUV compacts les plus réussis du marché, le Cupra Formentor, dans sa version VZ 333 ch ? L’ibère est véloce, bien dessiné, plutôt sympa à conduire… mais frappé d’un malus indécent !
Le Formentor adopte le nouveau langage de design de Cupra avec sa face avant en forme de nez de requin, ses feux Matrix LED triangulaires et son logo éclairé intégré. » Nous sommes d’accord ? A la lecture de tels propos, on s’attend à un chambardement esthétique. Que nenni !
Le restylage passe inaperçu, et ce ne sont pas les antibrouillards triangulaires, les sièges couverts de microfibre recyclée à 73 % ni le capot nervuré qui changent la donne. Ce n’est pas un reproche : en septembre 2023, j’étais reparti agréablement surpris de l’essai du Formentor.
Mais à l’époque, il carburait au 5 cylindres Audi, un moteur pour lequel, je le confesse, j’ai une tendresse particulière. Pour des raisons écolo-fiscalo-politiques, cette version n’est plus distribuée ni en France, ni sur les autres marchés européens. Le groupe Volkswagen est prêt à garder ce 2,5 litres dans une RS 3, pas dans un SUV familial…
La gamme 2024 est désormais coiffée par le 4 pattes TSI 2 litres, poussé à 333 ch, mais perd les doubles sorties superposées qui faisaient le charme du modèle VZ5. L’agrément mécanique est moindre, forcément.
Il n’y a plus ces gargouillis atypiques, ces grognements au-delà de 4 000 tr/mn et cette force inépuisable sur les relances. Je ne dis pas que le 4 cylindres est un poumon. Je dis juste qu’avant, c’était mieux. Bien mieux ? N’exagérons pas : cela reste un SUV.
¡Viva Cataluña!
Cupra, c’est Seat, et Seat, c’est Barcelone. Il n’y a qu’à voir l’immense « casa », plaça del Cinc d’Oros, pour comprendre qu’ici, la marque joue à domicile. Les metteurs au point finalisent leur boulot sur les routes de l’arrière-pays, entre Talamanca et Sant Llorenç ou sur la BP-1103, qui encercle la montagne de Montserrat par le nord, terrain de jeu extra que tous les constructeurs de la planète nous invitent à pratiquer depuis des décennies.
Ces routes, je les avais empruntées en Ioniq 5 N il y a quelques mois, et le Cupra, certes moins performant (presque deux fois moins puissant), y fait encore meilleure figure. Et pour cause : Cupra annonce 1 566 kg, sans conducteur, soit une demi-tonne de moins que la coréenne.
Le comportement est plaisant mais très rigoureux, surtout lorsque le bitume est chaud comme une baraque à frites et que les Goodyear Eagle F1 SuperSport sont à température. Dans ces conditions, le mode Drift, qui envoie, par le différentiel arrière multidisque hérité de la RS 3, jusqu’à 100 % du couple sur la roue extérieure pour contribuer à déhancher, n’est guère utile.
Le Formentor ne se mue pas en M3 même quand les aides sont débranchées. Est-ce condamnable ? J’en doute. La vocation première de l’auto est de trimballer ses proches, pas de tenir la tête d’affiche du prochain Fast & Furious. Il n’empêche que la tenue de route du Cupra est très loin de celle des premiers SUV.
La direction, faiblement démultipliée (2 tours de butée à butée), à assistance électrique, se montre un brin trop artificielle au point milieu et offre une consistance variable. Mais elle a au moins le mérite de commander un essieu frontal bien réglé, à la fois accrocheur sur les appuis constants, réactif lors des changements de cap impétueux et pas trop sous-vireur.
Certes, sur les départementales très sinueuses, le Formentor est un peu mollasson à l’inscription, mais la transmission intégrale se charge de sortir dignement du virage. Notre monture fait le plein d’options entre les sorties d’échappement Akrapovic et les freins Akebono (disques percés et ventilés à l’avant, juste ventilés à l’arrière).
En dépit de cette tubulure plus libérée, on ne s’enthousiasme pas pour le récital mécanique même si les rototos au lever de pied font esquisser quelques sourires. Le rupteur intervient à 6 700 tr/mn, mais le 2 litres perd de sa force dès 5 500 tr/mn.
Réservé à la version haut de gamme, le programme Cupra rend l’accélérateur plus sensible (0 à 100 km/h en 4”8), la direction moins assistée et les passages de rapport plus rapides… en théorie.
C’est vrai pour les deux premiers points, mais en ce qui concerne la vélocité de la DSG (7 vitesses), nous l’avons connue plus réveillée. Les petites palettes solidaires du volant, au toucher trop plastique, ne semblent pas toujours en contact avec le carter de boîte. Les rétrogradages tardent, au même titre que les passages supérieurs, et le changement de pignon n’est pas aussi instantané que ce que revendique la brochure.
Politiquement (in)correct
A l’issue de cet essai, il est compliqué de s’enthousiasmer pour le Formentor VZ TSI 333 ch. Mais il est totalement impossible de voir en lui un vulgaire transporteur de troupes sans saveur. Et à choisir entre lui et des SUV plus prestigieux et puissants, je lui donne la priorité.
Pourquoi ? Cayenne, X5, RS Q8 et consorts sont tous plus rapides, voire plus drôles à conduire, mais chez ces tanks, l’efficacité prime sur tout le reste, y compris sur les sensations, bien trop filtrées. Le Formentor, lui, n’oublie pas son conducteur.
Son comportement n’est pas sportif, mais contrairement à d’autres, l’espagnol nous apprend ce qu’il se passe sous ses roues de 19 pouces. Le roulis est contenu, pas annihilé, et les limites de grip n’en sont que plus faciles à cerner.
Sa suspension (MacPherson à l’avant, multibras à l’arrière, amortissement piloté en continu et paramétrable) n’est pas exempte de défauts avec, une fois les modes de conduite sportifs sélectionnés, un confort médiocre. A l’inverse du VZ5 essayé quelques mois plus tôt, les freins nous ont ravis.
Le dégressif n’est pas simple à obtenir avec, en fonction de la déclivité du virage, une amplification variable à la décélération, mais leur puissance et leur endurance nous ont rassurés. L’absence d’hybridation lui joue des tours sur le plan fiscal, mais le conducteur retrouve des sensations en voie de disparition. Le rapport poids/puissance du Formentor est de 4,7 kg/ch.
Cela équivaut à une Nissan 370Z, une Opel Speedster Turbo, une M3 3.2 E36 ou une Z4 M40i. Aucune ne prétend au titre de sportive de sa décennie, mais cela permet de recentrer le débat. Le Cupra n’est pas un déplaçoir peinturluré pour se différencier de ses voisins de ruelle. Il ne répond plus aux critères édictés par nos têtes pensantes.
Il n’est pas l’engin familial pour entamer l’ascension (et la descente) des plus jolis cols de montagne. Il n’est pas tout cela, mais il demeure une auto bien plus agréable à conduire, y compris de façon politiquement incorrecte, que ce que son positionnement marketing laisse supposer. Alors, merci au constructeur espagnol de continuer de proposer des voitures répondant aux besoins d’une poignée d’illuminés : c’est parce qu’elles ne conviennent pas aux attentes du plus grand nombre qu’elles sont si attachantes.
L'avis de notre essayeur Sylvain Vétaux
Le Formentor VZ TSI 333 ch est dans la moyenne basse des autos que nous avons la chance d’essayer. Le VZ5 avait eu droit à une pastille verte supplémentaire, en raison de son moteur plus joyeux et de ses performances musclées. Sur le plan du comportement, cette génération fait aussi bien que par le passé avec un accent mis sur la neutralité, sans le penchant pantouflard.
Cupra Formentor VZ TSI : fiche technique
- Moteur : 4 en ligne turbo, 16 S
- Cylindrée : 1 984 cm3
- Puissance : 333 ch à 5 600 tr/mn
- Couple : 42,8 mkg à 2 100 tr/mn
- Transmission : intégrale, 7 rapports à double embrayage
- Antipatinage : de série déconnectable
- Autobloquant : de série + AR piloté
- L - l - h : 4 451 - 1 839 - 1 511 mm
- Empattement : 2 680 mm
- Roues : 8 x 19
- Pneus : 245/40 R 19
- Poids annoncé : 1 566 kg
- Prix de base : 55 730 €
- Prix des options/malus : 5 630/60 000 €
- Prix de la version essayée : 121 360 €
- V. max. : 250 km/h
- 0 à 100 km/h : 4”8
Retrouvez notre essai du Cupra Formentor VZ TSI dans le Sport Auto n°752 du 30/08/2024.