Supertest - BMW M2 : on met son tempérament explosif à l'épreuve du circuit
Des lignes taillées à la serpe, un 6 en ligne au tempérament explosif et une architecture de propulsion : la plus petite des BMW M s’annonce comme un enfant au caractère bagarreur. Direction Le Vigeant pour découvrir la vraie personnalité de cette M2.
Certains s’attaquent à sa couleur pour juger le style de la
deuxième génération de M2.
D’autres abordent le sujet d’une façon plus directe. Au point même
de lui trouver des airs de magnifique coupé BMW, sorti d’une boîte
de Lego Technic.
Notre pilote préféré s’en amuse et prend un malin plaisir à
remettre une pièce dans le juke-box : "J’ai peut‑être des goûts
particuliers, mais j’aime bien le look de cette M2 ! Les designers
ont changé de voie et assument une certaine agressivité. Ses formes
carrées la font ressembler à une auto de course bodybuildée qui
colle bien à la marque M et la distingue des autres Série
2."
La nouvelle M2 suscite des avis aussi tranchés que ses
formes, et c’est très bien ainsi. A force de se perdre en chemin
dans le gigantisme d’un SUV XM conquérant de l’inutile, beaucoup
voient dans le dernier rejeton signé Motorsport un salvateur retour
aux sources.
Autrement dit, un coupé propulsion doté d’un 6 en ligne plein de
punch, d’un différentiel autobloquant et même d’une bonne vieille
boîte mécanique. Pas de chance, notre version se convertit à
l’automatisme, mais le reste de la recette sent autant la gomme
brûlée qu’elle incite à réviser son manuel de contrebraquage.
La M2 a beau avoir perdu deux des quatre phares qui font tout le
regard Béhème, la simple vision de ses hanches larges invite à la
gaudriole et à tatouer le bitume de la piste du Vigeant. La ficelle
est pourtant bien trop grosse pour en faire cette fameuse
descendante spirituelle des toutes premières M3 que l’on veut nous
vendre à tout prix.
En prenant 12 cm par rapport à sa devancière et en s’étirant sur
4,58 m, la M2 s’éloigne de l’idée que l’on
peut se faire d’un coupé compact. Surtout quand son capot long
comme un jour sans pain abrite un cheptel de 460 têtes !
La deuxième génération de la « petite » M monte en gamme et
récupère une bonne partie des dessous des toutes dernières M3 et
M4. A commencer par son train arrière multibras, identique à la
géométrie près et doté des amortisseurs de la M3 Touring avec
ressorts et hauteur de caisse spécifiques.
Le moteur, qui répond à la douce appellation S58B30T0, est
également identique, et ses deux turbos soufflent toujours à 1,7
bar, comme à bord de la grande sœur de 510 ch. Sauf qu’une
électronique revue lui fait perdre 50 ch, hiérarchie de gamme
oblige.
Ce partage d’éléments profite amplement à une M2, vendue 31 400 €
de moins qu’une M4 Competition. Revers de la médaille, cette
gémellité se ressent aussi sur la balance de Mortefontaine, qui
indique 1 724 kg avec 52 litres de sans-plomb dans le
réservoir.
Ceux qui pensaient à juste titre jouir d’une M2 plus légère que le
coupé de la gamme supérieure en sont donc pour leurs frais, puisque
BMW annonce sur les deux une même valeur de 1 725 kg. Pire encore,
la grande sœur pesée par nos soins lors du Supertest du numéro 722
s’en est tenue à 1 713 kg, soit 11 kg de moins. Cherchez l’erreur
!
Alors, certes, la présence d’un toit en carbone et d’autres
matériaux allégés réservés à la M4 lui permet de surveiller
davantage son poids, mais il est tout de même étonnant de constater
qu’une M2 est largement aussi lourde qu’un modèle dont
l’empattement et la longueur sont respectivement étirés de 110 et
214 mm.
Balle rebondissante
Alors que les baquets optionnels M Carbon des M3 et M4 imposent
des contorsions pour s’installer à bord, les sièges d’origine de la
M2 sont aisément accessibles. La position un peu moins basse qu’à
l’accoutumée apparaît moins sportive, mais le confort correct
s’apprécie sur le trajet autoroutier qui nous mène au Vigeant.
Le 6 en ligne se fait oublier, contrairement à la gestion de la
boîte auto à 8 rapports, qui refuse parfois de passer la vitesse
supérieure, sans raison apparente. Quelques trépidations troublent
légèrement le confort, même dans le mode le plus paisible. Une fois
sur le réseau secondaire, la M2 s’accroche à un bitume lisse avec
talent.
Le grip des semi‑slicks Michelin Pilot Sport Cup 2 montés sur notre
exemplaire d’essai l’aide autant que le châssis rigide. La plus
abordable des M encaisse sans broncher les gros appuis, se montre
imperturbable en entrée de courbe et profite d’une excellente
motricité pour en ressortir aussi vite, sans pratiquement jamais
réveiller le témoin d’ESP.
Une légère paresse du train avant dans les passages plus serrés et
une sensation de lourdeur générale malgré le grip impressionnant
constituent les seuls petits bémols d’un comportement rigoureux. La
M2 est efficace et compresse les côtes en virage, mais elle manque
hélas de ressenti, comme trop souvent chez BMW.
Trop légère en mode Normal et artificiellement lourde en Sport, la
direction à assistance électrique n’est pas une grande bavarde.
Difficile donc de sentir l’adhérence disponible sur le train avant
au moment de la placer en entrée. Le freinage mordant mais doté
ensuite d’une course morte ne facilite pas son dosage, même si son
efficacité est irréprochable.
C’est pourtant bel et bien quand le revêtement se dégrade que la M2
perd de sa superbe. Son amortissement piloté devient alors
rebondissant, et sa poupe se dandine sur les saignées. Cela
s’arrange un peu en mode Sport où les mouvements verticaux sont
plus contenus, mais le coupé bavarois manque vite de précision sur
revêtement bosselé.
Heureusement, la piste du Vigeant est assez lisse pour mettre cette
M2 sur le gril. A peine installé à bord, Maître Tinseau peste
contre l’insuffisance de maintien des sièges. De l’extérieur, le
passage du coupé blanc fait preuve d’une étonnante sobriété.
Les Michelin Pilot Sport Cup 2 gémissent davantage à l’avant qu’à
l’arrière, et aucun léger contrebraquage n’est en vue. Trois tours
plus tard, le chrono s’arrête sur 1’47”80. La M2 précède l’Alpine
A110 R d’une courte tête (1’47”88), pareillement chaussée.
Elle s’offre même le scalp de la M4 Competition (1’48”34), qui
s’est contentée de « simples » Michelin Pilot Sport 4 S. La grande
sœur aurait sûrement fait respecter son droit d’aînesse à gommes
équivalentes, mais la performance de la benjamine mérite amplement
d’être soulignée.
Plus sérieuse que facétieuse
De retour au stand, l’ami Christophe confirme les impressions
visuelles du bord de la piste : « Le train avant est paresseux. Je
suis constamment obligé d’attendre pour ne pas élargir la
trajectoire. » A juste titre. La M2 est ultra‑stable lors des gros
freinages, avale les portions rapides avec une insolente sérénité
et n’a pas son pareil pour vous mettre en confiance.
Sauf que ses roues antérieures peinent à engager, même en s’aidant
des freins, et donnent cette impression de refuser l’obstacle.
Difficile donc de garder de la vitesse au milieu du virage
puisqu’il faut patienter avant de retrouver du grip sur l’essieu
directeur. Contrairement aux M3 et M4, la M2 reprend le train avant
de la Série 2 Coupé (G42), avec des composants et paliers adaptés à
cette déclinaison M.
De là à en faire la cause de son équilibre sous‑vireur, il y a un
pas difficile à franchir. Une fois la proue calée, l’excellente
motricité permet de s’extraire de la difficulté en moins de temps
qu’il n’en faut pour l’écrire. Les amateurs de travers fumants
risquent d’être déçus tant il est nécessaire d’en faire des tonnes
pour la faire venir au gaz en sortie.
Ensuite, le décrochage brutal d’une poupe jusqu’ici collée par
terre demande un minimum d’habileté pour profiter de l’équilibre
BMW et obtenir les cinq étoiles sur l’analyseur de drift repris des
M3 et M4. Ce n’est pas un problème pour le sieur Tinseau, même si
la glisse devient moins naturelle : « Il faut mettre beaucoup
de volant pour la déclencher. Un train avant plus tranchant aurait
permis de faire venir la poupe plus tôt et d’entretenir une dérive
plus facilement. »
Les M3 et M4, un peu plus incisives et
dotées d’un empattement plus long, se prêtent avec davantage de
talent à l’exercice. L’énergie du 3.0 biturbo suffit autant pour
s’amuser que pour raccourcir les lignes droites : « Il a du
couple et permet de rapidement passer le rapport supérieur »,
ajoute Christophe.
Son punch disponible dès 2 500 tr/mn se joue des 1 800 kg de la
bête avec son pilote à bord, même si son caractère n’apparaît pas
aussi rageur que celui de la M4 Competition à l’approche du régime
maxi, fixé à 7 200 tr/mn. Résultat des courses, la M2 déboule à 235
km/h dans la ligne droite opposée et rend 7 km/h à la grande
sœur.
La hiérarchie est également respectée sur notre base de mesures à
Mortefontaine. En passant de 0 à 100 km/h en 3”9, la M2 démarre
très fort pour une propulsion, mais les 510 ch de la M4 font mieux.
L’écart se creuse ensuite sur le 0 à 200 km/h (13”0 contre 11”7) et
le 1 000 m départ arrêté (21”7 contre 21”1).
Dans sa catégorie, en revanche, la M2 ne craint personne. La boîte
automatique contribue sûrement à signer de meilleurs chronos, mais
elle reste encore perfectible : « Elle manque de réactivité à
la descente des rapports, même dans son mode le plus rapide »,
regrette Christophe.
Elle n’offre pas non plus la rapidité des meilleures unités à
double embrayage et peut frustrer en utilisation intensive sur
piste, serait‑on en droit d’ajouter. Dans les parties techniques,
notre pilote émet une petite critique sur le châssis : «
L’amortissement un peu souple donne l’impression qu’elle lève
parfois sa roue avant intérieure au virage. Je m’attendais à
quelque chose de plus radical. »
La M2 ne propose effectivement pas la rigidité d’une vraie pistarde, mais ses
mouvements de caisse sont suffisamment contenus pour conserver sa
dignité. Dans la partie rapide du « S du sanglier », son caractère
imperturbable lui permet de passer à fond, même si le train avant
commence à élargir la trajectoire.
La M2 est efficace et rigoureuse et elle n’oublie pas non plus de
freiner et longtemps. Vu que son accastillage chipé aux M3 et M4
est un peu moins sollicité par les mises en vitesse légèrement
inférieures, c’est tout à fait compréhensible.
L'avis de notre essayeur Jacques Warnery
Ceux qui espéraient de la bagarre au volant seront un peu déçus. A défaut d’être bien amortie sur route bosselée, la M2 est efficace pour chasser le chrono. Elle est par ailleurs performante et charme par son 6 en ligne. En revanche, il lui manque cette pointe de folie et ce caractère facétieux que l’on est en droit d’attendre d’une petite BMW M.
BMW M2 : en chiffres
BMW M2 : fiche technique
- Moteur : 6 en ligne, biturbo, 24 S
- Position : AV, longitudinale
- Cylindrée : 2 993 cm3
- Alésage x course : 90 x 84 mm
Rapport volumétrique : 9,3:1 - Régime maxi : 7 200 tr/mn
- Puissance maxi : 460 ch à 6 250 tr/mn
- Puissance au litre : 154 ch/l
Couple maxi : 56,1 mkg de 2 650 à 5 870 tr/mn - Couple au litre : 18,7 mkg/l
- Transmission : roues AR, 8 rapports automatiques
Autobloquant : de série - Antipatinage : de série + correcteur de trajectoire
- Suspension AV/AR : type MacPherson, amortisseurs pilotés et barres antiroulis/essieu multibras, amortisseurs pilotés et barres antiroulis
- Direction : crémaillère, assistance électrique
- Tours de volant/diamètre de braquage : 2,1 tours/11,9 m
- Freins AV/AR : disques ventilés (380 mm, étriers 6 pistons/370 mm, étriers flottants)
- Antiblocage : de série
- Poids constructeur/contrôlé : 1 725/1 724 kg
- Répartition AV/AR : 53/47 %
- Rapport poids/puissance : 3,8 kg/ch
- L - l - h : 4 580 - 1 887 - 1 403 mm
- Empattement : 2 747 mm
- Voies AV/AR : 1 617/1 605 mm
- Réservoir : 52 l
- Roues AV & AR : 9,5J x 19 & 10,5J x 20
- Pneumatiques AV & AR : 275/35 R 19 & 285/30 R 20
- Prix de base : 81 100 €
- Options/malus : 14 285/60 000 €
Retrouvez notre Supertest de la BMW M2 dans le Sport Auto N°746 du 29/02/2024.



