Supertest BMW M2 (2017) sur le circuit du Mans

La "petite" M se veut la descendante des M3 et de l'enfant terrible 1 M. Un supertest génétique s'impose pour analyser ses cellules souches sportives.
Un gabarit idéal. Un look bodybuildé, sans verser dans
l'ostentatoire. Un 6 en ligne turbo de 370 ch à l'échappement
libéré (M Performance). Cette Série 2 a tout d'une véritable "M"
sur le papier et a de quoi faire craquer. L'effet nouveauté
accentue probablement le taux de dévissage de tête, mais celui-ci
est impressionnant. Râblée, bien campée sur ses ailes larges (+ 5,5
cm à l'avant, + 8 cm à l'arrière !), la M2 défile avec une
prestance de petite GT.
Les proportions évoquent la brillante M3 E46 (3,2 litres 343 ch),
mais la mélodie a changé. Terminées les vocalises rocailleuses
ascendant métal, partant dans les aigus. Place aux grandes orgues
explosives, orchestrées ici par M Performance (3.465€) et
commandées à distance. Le barouf est tel en mode Circuit que le
constructeur conseille de conserver le bouton magique dans la
poche... Au cas où un contrôle se présente.
Dans la pratique, il faut être en mode Sport + et double-cliquer
sur la télécommande cylindrique. Un "flap" retentit et les basses
sont réglées au maximum, en générant des contre-pressions au lever
de pied. Impressionnant et à froid, vos voisins vont adorer !
Indispensable, cet accessoire M Performance compense la timidité
maladive du 3 litres, étouffé par le turbo. Il ne change en rien la
puissance fiscale, ni les 370 ch promis. Une petite consultation
chez le docteur DM Performance s'impose. Il se trouve qu'au
contraire, des canassons manquent à l'appel : 354 ch maxi relevés
malgré de bonnes conditions ambiantes. Soit l'inverse de la grande
sœur M4 (vidéo avec de la glisse), qui en a offert 12 de plus
lors de son Supertest (vidéo du tour chrono).
Hiérarchie respectée
Il faut dire qu'elle est doublement dopée, alors que la M2 s'en
tient à un turbo à double entrée, intégré au collecteur
d'échappement. L'aînée concède tout de même ses pistons et son taux
de compression. Mais le constructeur évoque une « conception
nouvelle » pour ce 3 litres, que nous retrouvons à bord des « 40i
». Il a en effet revu les culasses, la lubrification, le
refroidissement et l'échappement, plus ou moins claironnant. Les M2
et M3/M4 se retrouvent sur leur caractère mécanique, linéaire et
plein comme un œuf de 2 500 tr/mn au rupteur. Oui, la benjamine
coupe les gaz plus tôt (7 400 contre 7 750 tr/mn) et cogne moins
fort, mais elle chante ici plus juste... Au bénéfice des
sensations. Merci l'échappement. La M2 enchante jusqu'au moment où
l'on rehausse le rythme sur le bosselé. La conduite devient alors
musclée et les réactions rock'n'roll rappellent la Série 1 M.
Précisons que les aînées peuvent en faire tout autant, par le biais
du pack Compétition (450 ch). La hiérarchie est donc respectée. Non
mais ! Il en va de même concernant les performances.
La jeune rebelle est maintenue à distance. Elle se rapproche
toutefois de l'univers des GT en exécutant des reprises canon grâce
à son overboost (51 mkg), un 0 à 100 km/h en 4''5 et un 1 000 m
sous la barre des 23''0 ! Ces chiffres confirment le pep débordant
ressenti au volant, quelle que soit la plage d'utilisation, et
s'obtiennent avec la boîte à double embrayage. Cette DKG
optionnelle, dont l'huile est refroidie par un radiateur
supplémentaire, inclut évidemment un launch control et remplit ses
fonctions à merveille : changements rapides, répondant au
rétrogradage. Une bonne élève dans l'ensemble, qui se montre
toujours lente lors des manœuvres et qui réclame de recourir aux
palettes sur circuit, car le mode Drive Sport + s'appuie trop sur
le couple. A moins d'être focalisé sur le chrono et la piste,
l'investissement ne se justifie pas. Pourquoi ? Parce que la boîte
100 % manuelle est un régal ! Très bien guidée, rapide, elle a le
mérite d'impliquer davantage le conducteur et de supprimer un
filtre, au bénéfice du feeling. Même pour un usage quotidien,
foncez ! Elle se révèle plus douce que les boîtes M d'antan
(frictions adoucies) et en conserve l'authenticité, qui sied à
ravir à ce coupé. Rappelez-vous, nous l'avions testé au côté de
quelques pépites à boîte manuelle. En voici la vidéo... Bref,
cette M2 enchante jusqu'au moment où l'on rehausse le rythme sur le
bosselé ou le circuit routier de Mortefontaine.
Rock'n'roll
La conduite devient alors musclée et les réactions rock'n'roll
rappellent la Série 1 M. La suspension passive offre pourtant du
débattement et des mouvements de caisse prononcés. Il n'empêche,
l'arrière peut décrocher et il n'est pas assez tenu lors des
détentes. En conservant les aides, cela génère des coupures de gaz
malvenues. En les écartant, il faut être réactif au volant ! Cela
amuse à allure « modérée », moins sur la bosse du circuit avalée à
environ 200 km/h. En sus, l'amortissement se montre ferme en
compression, au détriment du confort. En clair, la M2 est
perfectible sur les plans du filtrage et de l'efficacité de
suspension. Et aucune alternative pilotée n'est proposée. Dommage.
D'autant qu'elle repose sur les trains roulants des M3/M4 et que
ces dernières (typées soft) proposent cette option. Ce point commun
aurait été le bienvenu, à l'inverse de la masse, proche de celle
des grandes sœurs ! Triste surprise, malgré une longueur inférieure
de 20 cm, le coupé avoisine la 1,6 tonne. Décevant. Du coup, les
chances de battre la référence de la famille M au Mans, alias la
M4, diminuent. Mais il n'a pas livré tous ses secrets, comme un
équilibre et une motricité qui ont de quoi faire rougir l'aînée.
Foncez voir la vidéo du chrono de la BMW M2
2017 au Mans.
Chasse à la M4
La chasse à la M4 est donc ouverte. D'emblée, la M2 met en
confiance dans la courbe Dunlop, en restant sereine et stable.
Pourvu que cela dure, sachant qu'un gros freinage se profile avant
la chicane éponyme. Le mordant est au rendez-vous et les
décélérations satisfont. Ce ressenti est confirmé par nos mesures
depuis 200 km/h, relativement constantes : 141 m. Mais des
grognements apparaissent rapidement, accompagnés d'un
ramollissement de la pédale. Heureusement, ces désagréments
n'entachent pas l'efficacité, qui a le mérite de perdurer au fil
des tours. Nous avons constaté le phénomène à bord d'autres M2,
avec le même résultat : une bonne résistance, qui permet de
s'aventurer sur piste. Oui, on parle bien d'une BMW, qui plus est
se passant de disques en carbone/céramique ! Dès le premier coup de
volant, la souplesse de suspension saute aux yeux, comme le feeling
de direction un brin artificiel, qui oscille entre la légèreté (au
point milieu en normal) et la lourdeur dans les modes sportifs.
Mais sa réactivité réduit le phénomène de plongée de l'avant. En
résumé, la précision en prend un coup, mais l'équilibre d'ensemble
est préservé. Etant donné la vitesse d'entrée et le relief de la
Chicane Dunlop, l'arrière est facilement déstabilisé.
Ce qui n'est pas le cas ailleurs et de manière générale. Eh oui, le
bébé M garde des gènes de Série 2 (chrono de M235i par ici) et quand on le
bouscule, l'avant lâche prise le premier. Naturellement, le train
arrière, qui digère bien la puissance et en accepterait plus, se
montre sage sur le plat. Soit tout l'inverse d'une Série 1 M ! La
longue courbe de la Chapelle le démontre : la M2 se place gentiment
et accepte une remise de gaz assez tôt et généreuse. Un exploit de
la part d'une propulsion suralimentée de 370 ch ! Le virage
d'après, qui se referme, démontre que l'arrière ne bouge pas aux
freins. Il faut remettre du volant en entrée, comme par exemple au
Garage Vert, ou abuser de l'accélérateur dans le transitoire pour
survirer. La glisse est alors fumante (aides déconnectées), mais il
faut tricoter des avant-bras et se méfier des reprises de grip...
Bien que BMW M fasse appel à des Michelin Pilot Super Sport et non
à des semi-slicks. Au final, entre l'équilibre, la motricité et le
panache, la petite M cavale sur le Bugatti, au point de se hisser
dans le top 50 des chronos, juste derrière l'Evora 400 et à une petite seconde de la
M4 classique. Un bon résultat, qui peut être
amélioré sans mal, en revoyant la suspension, le poids, la
puissance... Et les conditions de piste, défavorables par rapport
aux camarades citées.
Quelques chiffres
Voici quelques données sur cette M2 qui souffle le chaud et le
froid. Le chaud car elle dépote et se montre efficace, endurante et
communicative (vive le pot M Performance !).
D'où le 4e feu vert. Mais l'amortissement et le feeling de
direction refroidissent. Si vous craquez, optez pour la boîte
manuelle !
> Moteur : 6 en ligne turbo, 3 litres, 370 ch à 6 500
tr/mn, 47,4 mkg à 1 400 tr/mn
> Transmission : roues AR, boîte 7 rapports robotisés en
option
> Poids constructeur/contrôlé : 1 495/1 595 kg
> Prix de base/modèle essayé : 61 750 €/76 145 €
Photo : C.Choulot / EMAS


