F1 - Allonger le calendrier est-il bénéfique ?

Les patrons de plusieurs équipes doutent de l'intérêt d'allonger le calendrier. L'arrivée d'un budget plafonné pourrait mettre fin à cette nécessite.
Le calendrier tend à s'allonger depuis quelques années. Il y a
21 Grands Prix au programme cette année, un nombre déjà atteint en
2016 et 2018. Le calendrier comportait 17 courses il y a 10 ans, et
16 il y a 20 ans. Des épreuves comme celles de Barcelone et de
Mexico sont menacées pour 2020 mais le calendrier tend à
s'allonger.
Liberty Media, en charge des droits commerciaux, a confirmé une
course à Hanoï pour 2020, et un accord avec Zandvoort devrait être annoncé avant la fin du
mois. Des projets existent aussi à Miami ou à Londres, alors que Sepang aimerait réintégrer le calendrier.
Christian Horner, le patron de Red Bull s'inquiète de cette
expansion, que les membres des équipes auront du mal à assumer
: « Il faut réaliser qu’un week-end de Grand Prix est un
événement long, pas pour nous mais pour les gens dans les
stands, » a déclaré l’Anglais à Motorsport Week. « Pour
plusieurs postes, 21 Grands Prix, c’est déjà beaucoup. »
Quel intérêt pour le spectacle ?
L’aspect logistique n’est pas le seul que les équipes prennent
en compte. Un calendrier plus riche sera-t-il synonyme d’une
meilleure saison ? Christian Horner se pose la
question. « Je pense que nous arrivons à un point
critique, » indique-t-il. « Il faut regarder comment on
construit un week-end de Grand Prix. Faut-il autant d’essais ?
(Faut-il faire évoluer) la durée de la saison ? Tous ces facteurs
ont une influence sur les coûts, le plafonnement des budgets, etc,
et est-ce qu’au final cela fera de meilleures courses ? »
« Les chapitres sont limités dans un livre, et nous voulons
autant de chapitres passionnants que possible, que cela mène à une
apogée. Nous voulons éviter la saturation. »
Cyril Abiteboul partage cette interrogation. Pour lui, la F1 doit
aussi trouver le moyen d'exister face à toutes les offres de
divertissement : « Il (faut) cet équilibre entre quantité,
qualité, être attirant, offrir quelque chose de spécial, tout en
étant capables d’exister dans ce monde avec de nombreux contenus et
de nombreuses propositions, dans le domaine du sport, » précise le
patron de Renault. « Nous devons réussir à nous distinguer
dans l’espace actuel, et avec l’intérêt des médias pour la Formule
1. »
Pour Toto Wolff, chaque nouveau Grand Prix doit générer un intérêt
évident avant de trouver sa place au calendrier : « Je pense
que (Liberty) sait assez bien que s’il y a plus de courses, ils
doivent être créatifs et (...) faire des courses très attractives,
sur de nouveaux marchés » explique le patron de Mercedes
Motorsport. Il doute aussi qu'un calendrier plus riche soit
bénéfique : « Il faut (...) comprendre que la Formule 1 est un
championnat qui attire beaucoup, qui est glamour, est que parfois,
on fait mieux avec moins, » déclare Wolff.
Les coûts au coeur du débat
Augmenter le nombre de courses augmente mécaniquement les
revenus. Un Grand Prix paie sa présence au calendrier et plus il y
a de courses, plus il y a de contenu pour les diffuseurs, qui
peuvent donc payer les droits plus chers, et plus il y a
d'exposition pour les sponsors, dont les investissements peuvent
augmenter. « Pour notre entreprise, nous voulons
augmenter nos revenus et la source évidente de revenus est de faire
plus de courses, » confirme Wolff.
Cyril Abiteboul pointe les limites de cette stratégie. Elle
pourrait prendre fin en 2021 : un plafonnement des budgets devrait
être introduit et une équipe pourrait donc devenir viable
financièrement avec des revenus plus faibles. Elle ne serait plus
« esclave de ses revenus » selon les propos
d’Abiteboul... ce qui mettrait fin à la nécessité d’allonger le
calendrier.
« Avec le modèle actuel, la seule façon d’augmenter les
revenus est d’augmenter les courses, ou au moins d’en garder
autant, donc si nous pensons à l’avenir, nous devons changer de
modèle financier, pour ne pas avoir besoin d’augmenter les revenus,
» souligne le Français. « Cela implique de réduire les
coûts, de réduire la nécessité de dépenser pour être
performant. C’est peut-être l’un des éléments en faveur d’un
budget plafonné. »


