Dallara F325 : la nouvelle monoplace de F3 de 2025 à la loupe (+ images)
Plus durable grâce à un carburant 100 % renouvelable et à quelques pièces en carbone recyclé, la Formule 3 en version 2025 entend rester une étape indispensable dans la pyramide des monoplaces.
Historiquement, la Formule 3 a toujours occupé une place
cruciale dans la formation des pilotes. S’il en existe bon nombre
ayant court-circuité l’échelon de la Formule 2 – parmi lesquels Max
Verstappen, Carlos Sainz et Esteban Ocon –, plus rares sont les
pilotes ayant zappé l’étape Formule 3.
Il y a six ans, la discipline – jusque-là ouverte à diverses
marques de châssis – a évolué. En fusionnant avec le GP3, la «
nouvelle » Formule 3 est devenue une discipline réglementairement
monotype gérée par le même promoteur que la Formule 2 : Formula
Motorsport Ltd.
Loin de pousser à un consumérisme forcené, la société de Bruno
Michel a fait le choix de différer la mise à jour de cette
monoplace lancée en 2019. « L’idée de départ est de changer la
voiture tous les trois ans. Cela permet d’avoir des autos qui
évoluent en matière de technologie et qui restent proches de ce qui
se pratique en F1.
En revanche, il y a eu des années durant lesquelles il ne nous a
pas paru envisageable de lancer une nouvelle voiture alors qu’on en
avait une qui fonctionnait très bien. Une nouvelle auto constitue
des investissements qui ne sont pas neutres pour les équipes.
»
Pour des raisons budgétaires tenant compte du contexte
économique post-Covid, il a donc été décidé de ne mettre à jour la
F3 que cette année, après six saisons de bons et loyaux services de
la Dallara F319.
Sa petite sœur ne présente d’ailleurs pas de grosses révolutions,
comme nous l’explique Pierre-Alain Michot, le directeur technique
de Formula Motorsport Ltd : « Elle suit le chemin de
sa grande sœur. Par conséquent, on n’a pas de révolution à
proprement parler, mais on a énormément d’évolutions, un petit peu
dans l’esprit de ce que l’on avait fait pour la F2 l’année
passée.
Il faut dire que nous avions une base qui était déjà très bien,
mais nous avions besoin de nous adapter aux dernières
réglementations de sécurité de la FIA. Nous avons ainsi mis à jour
tous ces paramètres-là.
Il y a une évolution considérable du côté de l’arceau de sécurité,
pour se mettre en conformité avec la nouvelle norme qui sera
instaurée en F1 en 2026. Il y a aussi plus de tests de résistance
qui sont imposés, et nous avons dû faire une grosse mise à jour au
niveau de la partie arrière – avec l’adoption d’une nouvelle boîte
de vitesses – et des crash box avant-arrière pour pouvoir encaisser
plus d’énergie en cas de choc.
La partie interne de la monocoque est la même que celle de la F2,
mais l’arrière est différent par la taille du réservoir, dont la
capacité est moindre. »
Nouveau carburant
En conséquence, le cockpit de la F3 est censé accueillir (comme
la F2) tous les types de morphologie. De quoi permettre à l’espoir
américain Ugo Ugochukwu (membre du Junior Team McLaren) de caser
ses 192 cm sans trop de problèmes !
Le Halo qui surplombe l’habitacle est en acier et non en titane,
comme en F2 ou en F1 : « Nous avons pris le parti d’un Halo un
petit peu plus lourd avec l’acier, qui est bien moins coûteux que
le titane », précise l’ingénieur français. Il est un domaine
dans lequel la nouvelle F3 innove par rapport à sa devancière : la
durabilité.
« Nous adoptons cette année un nouveau carburant renouvelable
développé par Aramco, indique Pierre‑Alain Michot. Il
s’agit d’un biocarburant issu de déchets alimentaires, comme de
l’huile de cuisson.
Nous avons fait énormément de tests avec Aramco et Mecachrome en
2024 pour trouver la bonne formulation de carburant qui nous
permette de rouler avec le même niveau de fiabilité et de
performance, ce qui était pour nous un critère d’ordre 1.
Les carburants durables sont parfois plus agressifs pour les
moteurs. Là, c’est l’inverse, il l’est un peu moins que ce que nous
utilisions dans le passé. Ce nouveau carburant est transparent en
matière de coût pour les équipes. Par ailleurs, nous avons beaucoup
travaillé pour obtenir une réduction de la consommation de l’ordre
de 3 à 5 %. »
Au-delà de l’adaptation à ce nouveau
carburant, le moteur toujours fourni et développé par Mecachrome
reçoit quelques évolutions : « Il a fallu changer certains
composants pour s’adapter à la nouvelle électronique – introduite
en F2 l’an dernier – et que nous implémentons en F3 cette année
», complète le directeur technique de la F3.
Carbone recyclé
Les préoccupations de durabilité ne se limitent pas à l’adoption
d’un biocarburant, comme le souligne Pierre-Alain Michot : « La
nouvelle monoplace intègre des éléments en carbone recyclé. Cela
concerne trois pièces principales : les dérives d’aileron avant, la
coquille du siège extractible et le capot moteur.
Pour bénéficier de la même résistance que le carbone normal, il
faut souvent ajouter des couches de carbone à la fabrication, ce
qui induit un petit surpoids. Nous avons préféré le carbone recyclé
à d’autres matériaux comme la fibre de lin, par exemple, car il
permet une bonne réparabilité. »
Il s’agit d’un premier
pas intéressant, bien qu’il reste très modeste (les pièces en
question ne représentent que 10 % des éléments de carrosserie, hors
structure de sécurité).
Si ces nouveautés sont assez invisibles pour les pilotes une fois
au volant, il en est une autre que les redoublants de la discipline
devraient sentir passer : le changement de taille des pneus
(toujours fournis par Pirelli). « Historiquement, la Formule 3
était équipée de roues de 13 pouces, explique le référent
technique de la discipline. Nous sommes passés à des jantes de
16 pouces pour nous rapprocher des roues de 18 pouces utilisées par
les grandes sœurs en F2 et en F1.
L’idée est de permettre aux pilotes de s’habituer à la gestion de
pneus à flancs étroits. Tout le monde va devoir apprendre, et cela
devrait rebattre un peu les cartes. Ce sont des pneus un brin plus
rigides qui aident à la tenue en virage rapide. »
Le
Français Alessandro Giusti – membre de la Williams F1
Academy et de l’équipe de France FFSA – confirme que l’impact
des nouvelles gommes est très sensible : « J’avais testé les
précédentes F3 lors des essais de fin de saison, l’an dernier. Pour
moi, le passage de 13 à 16 pouces représente une énorme différence
entre les deux générations de voiture. Cela demande une réelle
phase d’adaptation. »
Théophile Naël, l’autre Frenchie
débutant en F3 cette année, développe : « L’auto est un chouia
plus posée. Il est donc légèrement plus difficile de la piloter
dans les virages serrés. En revanche, ces pneus ont l’air de très
peu se dégrader. Ils semblent se refroidir plus facilement et tenir
plus longtemps en course. »
Ecart de puissance
Si les législateurs ont eu la bonne idée de vouloir simplifier
la pyramide menant à la Formule 1 avec une structure compréhensible
par tous (F4, F3, F2, F1), il faut reconnaître qu’il manque un
étage à cette structure entre la F4 (qui affiche 160 ch) et la F3
(qui dispose de 380 ch).
Cet échelon intermédiaire est occupé par les formules régionales,
dont la principale est l’ancienne Formule Renault désormais
rebaptisée FRECA (Formula Regional European Championship
by Alpine). Ces monoplaces délivrent 280 chevaux.
« Ça me paraît indispensable de passer par une catégorie
intermédiaire entre la F4 et la F3, confirme Théophile Naël,
ne serait-ce que pour se familiariser avec la bonne manière de
chauffer les pneus et être capable de les exploiter de façon très
rapide, dès le premier tour lancé.
Et puis, il y a un gros écart de puissance. Rien qu’en passant de
la F4 à la FRECA, j’avais été surpris par la différence de
perception de la vitesse. S’adapter visuellement prend du temps,
alors, entre F4 et F3, l’écart est forcément plus important.
»
Si les FRECA et les F2 sont mues par un moteur
turbocompressé, la F3 reste fidèle à un moteur atmosphérique qui
ravit Théophile Naël : « J’aime beaucoup. C’est un peu
différent et il faut un peu de temps pour s’adapter. Le
différentiel de puissance est vraiment sensible par rapport à la
FRECA.
Avec l’aéro, la vitesse de passage est vraiment étonnante, de même
que la puissance de freinage. Il faut parfois mettre jusqu’à 110
bar de pression. Je l’ai senti dès les essais de fin de saison
dernière et j’ai donc orienté ma préparation physique hivernale
là-dessus pour éviter les mauvaises surprises. »
La
Formule 3 peut s’appuyer sur quelques ambassadeurs très
convaincants. Deux météores ont en effet récemment démontré
l’excellence de la formation prodiguée par la F3 : l’Australien
Oscar Piastri – champion en 2020 – et Gabriel Bortoleto – champion
en 2023 – n’ont eu besoin que d’une saison (victorieuse) en Formule
2 pour qu’une écurie de F1 les engage…
Un conseil : si vous voulez vous familiariser avec les futures
stars de la F1, n’hésitez pas à suivre les courses de F3. Elles
sont diffusées sur Canal+ !
Dallara F325 (2025) : fiche technique
- Moteur : V6 atmosphérique, 24 S (Mecachrome V634)
- Cylindrée : 3,4 litres
- Alésage x course : 96 x 78,2 mm
- Distribution : 2 ACTA
- limentation : injection indirecte
- Puissance maxi : 380 ch à 8 000 tr/mn
- Couple maxi : 380 Nm à 6 000 tr/mn
- Accélérateur : électronique
- Châssis : monocoque Dallara en carbone, halo en acier, panneaux protecteurs en Zylon
- Suspension AV & AR : doubles triangles-ressorts et amortisseurs classiques (hélicoïdaux)
- Freins : disques acier, étriers 4 pistons Brembo Roues : 16 pouces
- Pneus : Pirelli (3 mélanges disponibles pour la saison, 1 seul disponible par meeting)
- Aérodynamique : ailerons AV & AR en carbone avec DRS arrière
- Transmission : propulsion, 6 rapports à commande séquentielle électro-hydraulique (Magneti Marelli)
- Boîte de vitesses : position longitudinale (3MO)
- Empattement : 2 943 mm
- Voies AV/AR : 1 585/1 520 mm
- Largeur : 1 857 mm
- Poids : 690 kg (en ordre de marche, avec pilote, sans essence)
Retrouvez notre article à la loupe de la Dallara F325 de Formule 3 dans le Sport Auto n°759 du 28/03/2025.


