Toyota fait le point sur le KERS
Dès l'an prochain, les équipes auront le droit d'utiliser un
système de récupération de l'énergie cinétique (KERS) en course.
L'énergie générée lors des freinages sera récupérée, stockée, et
enfin ré-utilisée par le pilote, qui obtiendra un gain de puissance
de quelques secondes en appuyant sur un bouton.
"Nous travaillons d'arrache-pied pour développer et améliorer notre
système KERS," assure Luca Marmorini, qui gère le projet chez
Toyota. "Nous avons étudié plusieurs options et maintenant le défi
est de peaufiner le système avant de le faire rouler dans une
voiture pour la première fois."
Honda et BMW Sauber ont déjà fait des essais en piste, avec les
problèmes que l'on connaît: un mécanicien de BMW a reçu une
décharge électrique et l'écurie suisse-allemande a interrompu ses
tests. Chez Toyota, on ne voit pas l'intérêt de l'intégrer si tôt à
une monoplace.
"A cette étape, notre développement a été complètement basé à
l'usine, plutôt qu'en piste, parce que 95% du développement du KERS
peut être fait en simulation," explique Marmorini. "Le règlement
2009 induit que la TF109 sera assez différente de la TF108 donc
nous voyons un faible avantage à tester le KERS en piste dès
maintenant."
"Nous n'avons pas prévu de date [pour un premier essai en piste]
parce que cela dépendra de nos progrès à l'usine. Nous
n'utiliserons le KERS dans la voiture que quand notre système
répondra aux besoins requis pour la performance et la
sécurité."
La sécurité du KERS reste en effet en question après les problèmes
de BMW mais également de Red Bull, qui a dû faire venir les
pompiers après un essai à l'usine, le système ayant dégagé trop de
fumée. Marmorini n'est cependant pas inquiet pour la suite: "Les
systèmes hybrides de Toyota dans les voitures de série se sont
montrés sûrs et fiables, cela ne fait aucun doute, donc la
technologie ne pose pas problème," précise l'Italien.
Un gain de un à trois dixièmes par tour
Marmorini estime que l'énergie récupérée par le KERS ne pourra être
ré-utilisée que pendant quelques secondes par tour et il s'attend à
un gain en performance limité, même si le système pourrait
améliorer le spectacle en favorisant les dépassements.
"La FIA a défini les règlements pour éviter de grosses différences
entre une équipe qui a un bon KERS face à une équipe qui en a un
mauvais," explique Marmorini. "Le KERS ne fera pas de grosse
différence sur les chronos parce que la puissance ne sera
disponible que pendant environ 6,5sec par tour, donc un bénéfice de
0,1sec à 0,3sec est réaliste, sans prendre en compte la répartition
du poids et les modifications sur la voiture."
"Mais un avantage du KERS pourrait être d'aider les dépassements.
On ne sait pas si le KERS va améliorer la performance sur un tour
par rapport à une voiture qui roule sans parce qu'il faut prendre
en compte les problèmes de distribution du poids mais, avec plus de
traction, on pourrait avoir une chance de doubler."
Le KERS est en effet un système assez lourd, qui devrait empêcher
les écuries de jouer autant sur la répartition des masses
qu'aujourd'hui: "Notre voiture devrait toujours être au poids
minimum du règlement avec le KERS parce qu'actuellement la voiture
est significativement plus légère que les 605kg requis mais nous
utilisons des lests. Si le KERS rend la base de la voiture 25 ou
35kg plus lourde, on aura moins de lest et cela pourrait avoir un
impact sur les performances en empêchant les mouvements sur la
distribution de la masse."
Le KERS utilise des technologies qui n'ont jamais été employées en
Formule 1. Son développement est donc très coûteux:
"Inévitablement, une nouvelle technologie de ce genre demande des
ressources significatives pour développer une solution sûre et
efficace. Les coûts ont été très importants pour le KERS parce que
c'est une nouvelle technologie majeure en Formule 1 et qu'il y
avait plusieurs solutions possibles que nous avons dû étudier."
Expérience
En F1, le KERS permettra un gain de performance. Mais dans
l'automobile de série, un tel système permet d'économiser du
carburant, en remplaçant temporairement l'énergie du moteur par
celle du système.
Toyota a déjà une certaine expérience de ces solutions grâce à la
Prius, sa voiture de route hybride. Mais Luca Marmorini ne pense
pas que cela va procurer un avantage à son équipe. "S'il y a un
certain savoir-faire dans une entreprise, il faut que ce soit un
avantage mais nous ne pensons pas que cela va nous donner un
bénéfice tangible par rapport aux autres équipes parce que le KERS
n'est pas directement comparable à ce que nous faisons sur une
voiture de série," indique-t-il.
"La Formule 1 est un environnement unique où la réduction du poids
est vitale. La façon dont Toyota développe une voiture de route est
différente et le but est d'être efficace en termes de consommation
de carburant. La version idéale dans une voiture de route est plus
sophistiquée que le KERS de la Formule 1, parce que cela ne veut
pas simplement dire que vous pouvez réduire l'importance du moteur,
mais aussi prendre en compte d'autres critères, récupérer de
l'énergie à l'avant et à l'arrière sans limitation du temps où il
est utilisé."
En revanche, les progrès effectués pour la F1 pourrait avoir une
influence sur l'automobile de série, ce qui était l'un des
objectifs de la FIA, mais pas dans l'immédiat.
"Toyota est un leader mondial dans les technologies hybrides et
nous sommes le leader du marché dans les ventes de véhicules
hybrides, avec un million de ventes de la Prius hybride, un fait
dont nous sommes fier," rappelle Luca Marmorini. "Le développement
du KERS va inévitablement améliorer notre compréhension des
systèmes hybrides mais, pour le moment, nous ne pensons pas que
cela va permettre une grande percée dans le développement des
voitures de route."
"Toyota a déjà remporté les 24 heures de Tokachi avec un véhicule
hybride qui utilise des technologies plus avancées que le système
KERS en Formule 1."
Certaines rumeurs évoquent même un retour de Toyota au Mans dans le
futur, avec un système hybride...


