F1 - Comment Häkkinen a battu Schumacher à Spa

Publié le 18 août 2015 à 15:27
Mis à jour le 20 novembre 2020 à 10:39
F1 - Comment Häkkinen a battu Schumacher à Spa

Mika Häkkinen a réalisé un dépassement sur Michael Schumacher resté dans l'histoire en 2000 à Spa. Le Finlandais raconte la préparation de cette manoeuvre.

A Spa en 2000, Mika Häkkinen a réalisé l'un des dépassements les plus spectaculaires de l'histoire, sur Michael Schumacher. Cette course ne pouvait pas lui échapper.
Häkkinen avait signé la pole et il menait en début de course, sur une piste humide. Il a ensuite fait une erreur, ce qui a offert la tête à Schumacher.
« J'ai fait une petite erreur à Stavelot, en touchant un vibreur, et le résultat a été un désastre : j'ai fait un demi-tête-à-queue dans l'herbe, et avant que je puisse contrôler la voiture et repartir, Michael était passé, me reléguant à la deuxième place, » déplore le Finlandais dans son blog sur le site de McLaren.
« Je m'en voulais. Mais j'étais déterminé à ne rien faire de stupide, donc je me suis concentré pour avoir un pilotage doux et sensible, en consolidant ma deuxième place. Devant moi, Michael enfonçait vraiment le clou, et au 20ème tour il était 10 secondes devant. »
Häkkinen a commencé à réduire l'écart : « Une trajectoire était sèche sur la piste, mais c'était encore humide hors trajectoire, donc rouler à fond était un risque, parce que je savais que la moindre erreur serait punie par un nouveau demi-tête-à-queue, ou pire, ce que je ne pouvais pas me permettre. Mais, malgré ça, j'ai commencé à attaquer plus, et j'ai commencé à rapprocher ma McLaren-Mercedes argentée de la Ferrari rouge écarlate de Michael. »

La première tentative a été ratée

Une fois revenu sur Michael Schumacher, Mika Häkkinen a voulu attaquer une première fois Michael Schumacher après l'Eau Rouge. L'Allemand a réagi avec un manoeuvre discutable.
« Au 40ème tour, j'étais dans ses roues, » explique Häkkinen. « En arrivant à l'Eau Rouge dans ce tour là, nous avons tous les deux momentanément levé le pied, et nous avons ré-accéléré avant Les Combes. L'Eau Rouge était un virage majestueux à cet époque, presque à fond mais pas totalement, un vrai défi pour l'homme et la machine. Je l'avais bien pris, peut-être un peu mieux que Michael, et, en approchant la zone de freinage pour Les Combes, j'ai décidé de tenter de freiner plus tard que lui. »
« J'ai plongé le nez de ma McLaren-Mercedes aux côtés de sa Ferrari, et j'étais préparé à freiner tard. Mais Michael m'a vu arriver, et il s'est rapproché de moi, à 300km/h (...), son pneu arrière-droit a touché la dérive gauche de mon aileron avant et j'ai levé le pied pour abandonner la manœuvre. »
« Après la course, Michael a reçu beaucoup de critiques pour cette manœuvre à haute vitesse mais, maintenant, 15 ans après, je n'ai pas de problème avec ça. J'ai énormément aimé ma carrière en Formule 1, et l'un de ses moments forts a été ma rivalité permanente avec Michael. Je le respectais, et je pense qu'il me respectait. On se battait vraiment, mais la plupart du temps nous nous battions également sportivement. C'était un concurrent d'une combativité terrifiante, mais on pourrait dire ça de tous les grands champions. On ne remporte pas sept championnats du monde en étant doux, et Michael ne l'a jamais été, mais il était un superbe pilote, l'un des meilleurs de l'histoire du sport en fait. »

Häkkinen devait prendre un risque

Les dégâts sur la McLaren étaient minces et dans le tour suivant, Mika Häkkinen a décidé de s'attaquer une nouvelle fois à Michael Schumacher, en prenant plus de risques.
« Dans le reste du tour 40, je pouvais voir que, même si ma dérive d'aileron avant était un peu endommagé, ma voiture avait toujours un bon comportement, » souligne-t-il. « Je sentais que l'entrée des Combes était le seul endroit où je pouvais doubler Michael, mais je savais aussi que ma manœuvre devait être très décisive, tout simplement parce que Michael n'abandonnerait pas la tête facilement. Il l'avait déjà clairement montré. Donc, quand nous avons débuté le tour 41, j'ai décidé de prendre un risque. »
« C'était un gros risque, mais un risque calculé. J'allais prendre l'Eau Rouge à fond. A cette époque, prendre l'Eau Rouge à fond n'était pas une chose pour les timorés. C'était extrêmement difficile, et la sanction si on se manquait était en général un énorme accident. Pire que ça, la piste était encore humide hors de la trajectoire, donc je savais que je devais être parfait au millimètre, une chose pas évidente à faire dans le virage le plus intimidant au monde, le pied au plancher, en visant la corde dans une sortie à l'aveugle. »

L'Eau Rouge à fond

Pour prendre l'Eau Rouge sans lever le pied, Mika Häkkinen a dû accepter de prendre un grand risque. S'il échouait, tout espoir était perdu.
« En approchant ce fameux virage, j'étais juste derrière Michael, » précise-t-il. « En tournant, chaque fibre de mon être m'implorait de lever le pied. J'ai décidé de compter jusqu'à trois, en me préparant à garder le pied planté sur la pédale en comptant, en sachant qu'en arrivant à trois, soit j'aurais pris l'Eau Rouge à fond, soit j'aurais fini dans les barrières. Il n'y avait pas de demi-mesure, j'en étais sûr à 100%. »
« "Un", ai-je dit à haute voix, et la voiture a commencé à trembler, prise d'assaut par d'énormes forces G, latérales et frontales. Je savais que je devais me battre avec la voiture si je voulais éviter un accident, et je serai honnête : je savais aussi que je devais combattre ma propre peur. »
« "Deux", ai-je haleté, en regardent le volant alors que la voiture allait dans un sens puis l'autre. Durant une fraction de seconde, juste au milieu du virage, j'ai pensé que je n'allais pas pouvoir pas la contrôler. La voiture était vraiment sur un fil, mais après elle a repris l'adhérence. »
« "Trois", ai-je lâché, alors que la voiture sortait avec effroi du virage. Encore une fois, la voiture est restée en piste. Je l'avais fait. J'avais pris l'Eau Rouge à fond, dans une course, pas une séance de qualifications, avec seulement une fine trajectoire humide sur laquelle le faire. »

Zonta au centre du dépassement

C'est alors que Mika Häkkinen a pu réaliser son célèbre dépassement sur Michael Schumacher. Les deux hommes prenaient un tour à Ricardo Zonta, et sa présence a aidé le Finlandais.
« Devant moi, dans la ligne droite, Michael n'avait clairement pas pris l'Eau Rouge à fond, parce que je revenais très vite sur lui, » décrit-t-il. «En approchant des Combes, devant nous j'ai vu la BAR-Honda de Ricardo Zonta. »
« Je me suis dit "Quel que soit le côté où Michael ira, j'irai de l'autre". Il est allé sur la gauche, donc je suis allé sur la droite, en freinant aussi tard que je l'osais, sur une piste encore humide, à 300km/h (...). En tournant, je l'avais fait, j'avais doublé Michael, j'avais repris la tête. »
Schumacher a tenté de mettre la pression sur Häkkinen, en vain: « J'ai conservé mon calme, en murmurant "Mika, reste calme, reste calme, reste calme", » s'amuse-t-il.
Häkkinen a finalement décroché l'un de ses plus célèbres succès.

Schumacher reste dans un état inconnu

Les duels entre Michael Schumacher et Mika Häkkinen appartiennent désormais à l'histoire. Cette rivalité a laissé place à une certaine complicité. Schumacher conserve des séquelles inconnues de son grave accident de ski et Häkkinen souhaite le revoir sur pieds.
« Je ne prétends connaître aucun détail sur sa condition, mais j'ai été satisfait de voir que dans une interview vidéo diffusée il y a quelques mois, sa manager Sabine Kehm a dit que sa condition s'améliorait lentement, » indique-t-il.
« J'espère et je prie pour que ces signes encourageants se poursuivent. Non, il ne fera plus jamais de course, non, il pourrait ne jamais remarcher, il pourrait ne jamais reparler, d'après ce que je sais. Mais, de l'autre côté, il pourrait. Les miracles se produisent parfois, et j'espère vraiment qu'un miracle se produira pour Michael rapidement. »
« Continue à te battre, mon vieil ami. »

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