F1 - Comment les pilotes trouvent la confiance

Les pilotes doivent avoir confiance au volant pour attaquer. Romain Grosjean et Kevin Magnussen expliquent leurs besoins et leur travail avec les ingénieurs.
Depuis un an, Romain Grosjean a régulièrement des problèmes avec les freins de sa Haas. Ils n'ont pas toujours eu un comportement constant, ce qui mine sa confiance au volant. Dans son pilotage, l'un des éléments les plus importants est de pouvoir parfaitement anticiper le comportement de la monoplace.
« On veut savoir ce qu’il va se passer, » souligne Grosjean. « En fait, on veut savoir si ce à quoi on s’attend sera ce qu’on aura quand on fait quelque chose. Quand on à ça, je ne dirais pas que c’est facile d’être rapide, mais ça va beaucoup plus vite. Par exemple, si on entre dans un virage un peu trop vite, on aura un peu de survirage, mais si c’est la même chose à chaque tour, on peut essayer de trouver la bonne limite et la bonne approche, et avoir confiance dans la voiture, pour qu’elle n'ait pas une réaction folle. Si à un tour on a du sous-virage, qu’au tour suivant on essaie de le compenser mais qu’on a un énorme survirage, ça va empirer les choses. On veut vraiment avoir ce qu’on attend. »
Kevin Magnussen trouve surtout cette confiance vient avec une monoplace stable : « En général, la plupart des pilotes ont les mêmes besoins, » estime-t-il. « Certains pilotes aiment un peu plus ou un peu mois de choses comme le sous-virage ou le survirage. En général, on veut de l’adhérence, mais ensuite on veut de la stabilité, pour pouvoir attaquer et freiner plus tard afin de garder de la vitesse en courbe et mettre la puissance plus tôt. La plupart de ces éléments nécessitent un bon arrière. Evidemment, si on ne peut pas tourner, si on a trop d’adhérence à mi-courbe pour tourner, ce n’est pas bon non plus. Donc il faut aussi une bonne adhérence à l’avant. Neuf fois sur 10, on se retrouve à dire que la voiture est instable en entrée de courbe, qu’elle a du sous-virage en milieu de courbe et qu’elle survire à la sortie. »
Les réglages sont surtout des ajustements
Pour trouver cette confiance, les pilotes doivent trouver les bons réglages. Ce travail se fait surtout le vendredi, avec des relais courts puis des relais longs. La dernière séance, le samedi matin, est consacrée à des ajustements, et peu de changements sont possibles après les qualifications, puisque les monoplaces sont sous régime de parc fermé. Concrètement, les changements de réglages sont plus de petits ajustements qui peuvent avoir de grosses conséquences. Romain Grosjean attache une grande importance à ce travail.
« Il se passe beaucoup de choses après une journée difficile, ou quand la voiture n’est pas vraiment comme on le veut, » explique le Franco-Suisse. « Evidemment, on essaie de trouver la meilleure solution pour l’aérodynamique, les pneus, le moteur, les suspensions, le pilotage, tout ensemble. Parfois, peu de changements, mais de bons changements, peuvent faire une grosse différence dans les chronos. On cherche toujours ça le vendredi soir. Evidemment, après les qualifications, on n’a plus trop de possibilités pour la course, mais on essaie d’améliorer ce qu’on a. »
Parfois, un progrès dans un domaine peut accentuer une faiblesse dans un autre. Il faut savoir trouver le bon équilibre : « La course, c’est le compromis, » explique Grosjean. « On a rarement une voiture parfaite dans tous les virages du circuit. Il faut identifier les virages dans lesquels on perd le plus de temps et se concentrer sur ceux là. Ça pourrait ne pas favoriser d’autres parties, mais l’idée est de se concentrer sur les zones où on peut gagner le plus de temps. »
Il arrive que l'équation soit impossible à résoudre : « C’est très sensible, en particulier quand des problèmes arrivent en même temps si on n’a pas le bon équilibre, ou qu’on n’est pas dans la bonne fenêtre avec les pneus, ou peut-être qu’on a n’a pas le bon niveau d’appuis. C’est comme si la question ne trouvait jamais de réponse, on cherche toujours une pièce du puzzle. »
Le travail de réglage tourne souvent autour des pneus. Entre l'évolution des conditions de piste, que ce soit les températures ou la gomme qui se dépose, et les réglages de la monoplace, il est souvent difficile de bien exploiter les pneus : « C’est un élément clé, un domaine dans lequel nous progressons et nous continuons à apprendre, » estime Grosjean. « C’est là que l’expérience est très importante. Evidemment, avec une équipe qui n’a qu’un an et demi, nous n’avons pas cette expérience. Nous travaillons énormément pour comprendre les pneus, et oui, parfois c’est frustrant de passer autant de temps pour bien les faire fonctionner, mais c’est la priorité numéro un. »
L'humain passe avant tout
Ce travail de réglage n'est pas qu'une question de calculs et de simulations. Les ajustements se font entre le pilote, qui livre ses sensations, les ingénieurs, chargés de trouver de solutions, et les mécaniciens, dont le rôle est de mettre en oeuvre les réglages. Une cohésion est nécessaire entre chaque membre.
« C’est très important, » souligne Grosjean. « Nous ne sommes pas des robots et les ingénieurs non plus. Nous essayons de retranscrire nos sensations en mots, et ces mots doivent être retranscrits en données ou en nombres. Ces nombres sont liés aux sensations dans la voiture. Parfois, les données diront une chose, mais on en ressentira une autre. C’est là que les relations humaines, entre le pilote, les ingénieurs et les mécaniciens, sont capitales. Il faut les développer et trouver une solution. »
Pour Kevin Magnussen, le pilote doit avant tout savoir ce dont il a besoin. Il juge le travail avec les ingénieurs très précieux : « C’est très important, » confirme le Danois. « Il n’y a pas de meilleure solution théorique pour régler une voiture. Elle doit convenir au pilote. Le pilote doit savoir ce qu’il veut et ce dont il a besoin dans la voiture. Ensuite, évidemment, il faut énormément travailler avec les ingénieurs et l'équipe pour essayer de retrouver le comportement qu’on veut dans la voiture. »