Et si rien, en fait, n'avait vraiment changé ? Alors pourtant que le début de saison fracassant de Lewis Hamilton laissait à penser que l'un avait acquis une confiance indestructible et que l'autre avait définitivement sombré, le GP d'Espagne a rappelé que le duel entre les deux hommes était toujours fondé sur les mêmes bases. En 2013, déjà, Hamilton avait dominé Rosberg au début, avant que son rival ne reprenne la main au coeur de la saison et que l'Anglais ne fasse de même à la fin. Il n'y avait alors eu aucune tension. En 2014, même scénario. A deux gros détails près : tout d'abord l'abandon mécanique d'Hamilton en Australie qui avait fait croire que Rosberg dominait, alors que c'est bien Lewis qui était le plus rapide : 4 victoires et 4 pole positions en 5 grands prix. Deuxième détail, la détérioration de leur relation. En Espagne tout d'abord, puis à Monaco, au Canada et encore plus à Spa suite à leur accrochage. Depuis, ils ne s'entendent plus et ne se font plus confiance.
Lewis refait la tête
2015, donc, n'est pas si différent de 2014. A ceci près que Lewis n'a pas abandonné une seule fois. Sa domination en piste s'est ainsi concrétisée logiquement au classement des pilotes. Mais voilà que le changement habituel de tendance au niveau du début de la saison européenne s'est à nouveau opéré. En Espagne, Rosberg a signé la pole position et remporté le grand prix. Hamilton n'a certes pas vraiment pu se défendre, la faute à un mauvais départ et à un premier arrêt loupé par son équipe. A l'arrivée, en revanche, on a revu la profonde hostilité qui les oppose et les sentiments que cette hostilité génère à chaque fois. Si, en Chine, Rosberg avait cédé à des mouvements d'humeur exagérés, accusant son équipier de l'avoir ralenti pour que Vettel puisse le menacer, cette fois, c'est Lewis Hamilton qui est retombé dans ses travers. Mine vexée sur le podium, lunettes de soleil gardées pendant la cérémonie, ton sec et peu disert en conférence de presse, mais offensif devant les télévisions anglaises au point de critiquer son écurie, Hamilon a fait craquer son armure. Depuis Spa l'an passé, il avait su garder ses nerfs et opposer à l'agressivité de Rosberg un nouveau calme olympien qui avait fait mouche. Nico s'excitait tout seul en 2015, ce à quoi Lewis ne répondait pas ou alors répondait avec talent : en le renvoyant dans ses cordes. Là, d'un coup, Lewis a refait la tête et a une fois encore dramatisé sa deuxième place.
Ca promet pour Monaco
Si rien ne change au fils des ans, tout cela nous promet une saison plus intéressante que ce que les premiers grands prix semblaient dessiner. Notamment dès Monaco, symboliquement le lieu où tout a dérapé. Rosberg y est invaincu en course et en qualifications depuis deux ans. L'an passé, il a créé la polémique avec une erreur suspecte en qualifications, ce qui lui avait permis de garder sa pole position provisoire. L'Allemand y arrive doublement confiant. Il sait qu'il peut gagner de nouveau et il voit que Lewis est encore fragile. Capable d'être de temps à autres cynique, Nico va tout faire pour que les deux situations perdurent. Il devra appuyer plus fort sur ces deux cordes sensibles. Hamilton, lui, va vouloir venger l'affront de 2014 dans les rues d'une Principauté où il n'a plus triomphé depuis 2008. Il devra aussi se souvenir des progrès mentaux qu'il avait fait l'an passé après Spa. Hamilton est son propre ennemi. A lui de s'en souvenir.