Bugatti Chiron Super Sport (2022) : comment atteint-elle les 440 km/h ?

Publié le 25 novembre 2021 à 16:20
Mis à jour le 25 novembre 2021 à 16:20
Bugatti Chiron Super Sport (2022) : comment a-t-elle atteint une vitesse de 440 km/h ?

Comment la Bugatti Chiron Super Sport atteint-elle sa vitesse supersonique de 440 km/h ? La marque de Molsheim nous révèle une partie des secrets de sa nouvelle bombe de 1600 chevaux.

Bugatti lève une partie du voile sur les modifications techniques nécessaires à sa nouvelle Chiron Super Sport, attendue pour livraison début 2022, pour qu’elle atteigne sa vitesse de 440 km/h. Bienvenue au pays de la démesure…

Un aérodynamisme optimisé

Une vitesse dépassant 400 km/h nécessite un moteur puissant, mais aussi une traînée la plus faible possible. Pour la Bugatti Chiron Super Sport, les ingénieurs et les designers ont travaillé pendant des mois sur le meilleur équilibre aérodynamique, la plus faible traînée et la plus grande déportance possible.

De nouveaux Air Curtains

Un comportement routier équilibré et sûr est indispensable. « Ce n’est que lorsque l’écoulement s’effectue parfaitement à l’avant de la carrosserie que les turbulences gênantes restent faibles et que l’air s’écoule proprement », explique Frank Heyl, directeur artistique adjoint de Bugatti. Afin de minimiser au mieux les turbulences latérales, l’équipe a intégré à l’avant de nouveaux Air Curtains – deux profilés semblables à des ailes – qui dévient l’air vers les coins de manière optimale.

Ils garantissent que l’air s’écoule le plus longtemps possible près de la carrosserie, ce qui stabilise le véhicule et réduit les pertes de pression et la résistance – un revêtement idéal pour une conduite rapide « Shaped by Speed ». Pour obtenir le meilleur écoulement latéral, les experts de Bugatti ont testé sur d’innombrables boucles de simulation la courbure et la force idéales de la pièce ainsi que le meilleur espacement par rapport au volume principal de l’avant. Des sorties supplémentaires sur les passages de roue avant contribuent à équilibrer davantage les charges aérodynamiques.

Un écoulement à travers l’avant du véhicule

L’écoulement de l’air idéal à travers l’avant du véhicule est tout aussi déterminant pour son équilibre à des vitesses élevées. La quantité d’air idéale doit donc passer par les radiateurs pour fournir suffisamment d’air froid au moteur W16 8 litres lorsqu’il tourne à plein régime. Sur la Chiron Super Sport, le débit massique d’air à travers les radiateurs est environ 8 % plus élevé que sur la Chiron afin de garantir un contrôle de l’air optimal. D’autre part, une grande partie du débit massique élevé s’écoule à une grande vitesse de sortie à travers les nouveaux Air Curtains. À vitesse maximale, les diffuseurs avant s’aplatissent et laissent passer moins d’air dans les passages de roues.

De nouvelles ailes

Les neuf sorties d’air sur les ailes avant s’inspirent du style de la Bugatti EB 110 (écoutez-la rugir). Si la première supercar pré-21ème siècle arborait déjà cinq entrées d’air cylindriques pour ventiler son moteur, la Chiron Super Sport en possède neuf. Grâce aux simulations réalisées à l’aide de la CFD, les experts calculent le flux d’air exact nécessaire pour obtenir l’équilibre aérodynamique parfait. Grâce aux sorties d’air, Bugatti évite que la pression dynamique dans les passages de roue ne lève la Chiron à l’avant. Cette pièce crée ainsi de la déportance sans pour autant générer de résistance supplémentaire – comme ce serait le cas avec un aileron additionnel. Ces ventilations produisent entre 20 et 30 kg de déportance supplémentaire à 380 km/h et aident ainsi à maintenir l’équilibre des déportances.

Une nouvelle ventilation dans les passages de roue

Les neuf sorties d’air dépassent d’environ 30 millimètres vers le bas à travers l’aile et sont reliées au passage de roue par un déflecteur en carbone spécial. Celui-ci garantit un écoulement optimal tout en empêchant que des cailloux n’arrivent à l’arrière par les ventilations. Les nouvelles ailes contribuent également à un meilleur refroidissement des freins. À l’instar d’une cheminée, une dépression du flux s’écoulant le long de la carrosserie extrait l’air des passages de roue. L’air est aussi aspiré des passages de roue par des orifices de ventilation spéciaux situés derrière les roues avant.

Des ailes fabriquées à la main

Les ailes, qui ne pèsent que quatre kilos, sont réalisées à la main en fibre de carbone. Chacune des neuf aérations est d’une taille différente. Par souci d’esthétisme, les rayons visibles sont identiques. De plus, les nouvelles ailes répondent aux normes de sécurité internationales relatives à la protection des piétons et à la protection antichoc. La rigidité très importante de la structure est réduite à certains endroits afin d’absorber l’énergie. À vitesse réduite, les ailes peuvent ainsi se déformer en cas de choc, tout en restant extrêmement rigides à grande vitesse.

« Long tail » pour vitesses élevées

L’arrière de la Chiron Super Sport, rallongé de 23 cm, est également appelé long tail. À grande vitesse, il garantit que l’air s’écoulant au-dessus et en dessous du véhicule atteigne, à l’arrière, une zone de séparation la plus petite possible. Pour obtenir un équilibre entre les forces de déportance et de portance, l’aileron arrière et le diffuseur, entre autres, sont parfaitement ajustés l’un à l’autre. À cette fin, Bugatti agrandit la section du diffuseur. L’arête de rupture du diffuseur est ainsi déplacée plus haut, ce qui réduit la zone de rupture à l’arrière. Les pertes générées et donc la traînée sont sensiblement réduites – car c’est bien elle qui freine un véhicule.

Un aileron arrière plus grand

En mode Handling, l’aileron arrière, allongé de 23 mm, soit une augmentation de 8 %, est associé à un diffuseur lui aussi plus grand afin d’améliorer nettement l’efficacité de l’aérofrein. En mode Top speed, en revanche, l’aileron est presque totalement escamoté : le principe de la long tail est ainsi pleinement valorisé et le flux laminaire peut rester en contact avec la carrosserie sur toute la longueur du revêtement, jusqu’à ce qu’il se rompe clairement à l’arrière, ce qui réduit nettement la résistance.

« En mode Top speed, la Chiron Super Sport ne génère qu’une résistance minimale, elle est ainsi parfaitement équilibrée et aussi efficace que la technique le permet », souligne Frank Heyl. L’objectif était de maintenir la déportance et la portance à l’équilibre au-delà de 400 km/h. « La Super Sport génère justement suffisamment de déportance pour rester neutre au-delà de 400 km/h. À cette vitesse, c’est indispensable pour ne pas sursolliciter les pneus », poursuit Heyl.

Un diffuseur lui aussi plus grand

Bugatti a aussi revu la conception du diffuseur. Grâce à l’arrière rallongé, il gagne environ 23 cm. Afin d’augmenter son efficacité et lui donner plus d’espace, Bugatti déplace le système d’échappement en position centrale, sur les côtés, en superposition. Les embouts sont placés l’un au-dessus de l’autre, deux par deux, afin de réduire le moins possible la surface efficace du diffuseur. Par rapport à la Chiron, la surface du diffuseur augmente ainsi de 32 %. « La zone centrale, la plus efficace en termes d’écoulement, est libérée », observe Christoph Dobriloff, ingénieur développement chez Bugatti.

Un système d’échappement en titane imprimé en 3D

Les deux embouts d’échappement constituent une particularité : l’impression 3D en titane permet de créer une double paroi extrêmement fine, qui ne mesure par endroit que 0,4 mm d’épaisseur et flirte donc avec les limites de la faisabilité technique. C’est une structure en treillis qui confère à la pièce sa stabilité et offre également de l’espace pour les canaux d’écoulement d’air.

Grâce à leur double paroi, les embouts en titane sont isolants et le flux d’air qui les entoure abaisse leur température. Afin de préserver les pièces en carbone environnantes d’une trop grande chaleur, la Chiron possède des entrées d’air supplémentaires dans le soubassement. Elles insufflent de l’air froid de manière circulaire autour des formes géométriques extrayant les gaz d’échappement à l’extérieur des embouts. Les gaz, qui peuvent atteindre une température de 850 °C, sortent enveloppés d’un manteau d’air froid, ce qui évite que les gaz chauds reviennent sur l’arrière.

« Même à plein régime et vitesse maximale, les gaz d’échappement n’endommagent aucune pièce et évitent les reflux », explique Jens Wenge, ingénieur construction chez Bugatti. Même le titane n’atteint son point de fusion qu’à 1 668 °C. Autres avantages de l’impression en titane : des arêtes précises, des joints réduits au minimum et donc un meilleur écoulement et un traitement ultérieur minime. Après l’impression 3D, les embouts d’échappement sont simplement sablés puis nettoyés à l’air comprimé. Sur demande, ils sont peints en noir. De plus, une pièce en titane imprimée en 3D pèse 570 g au lieu de 930, soit environ un tiers de moins que son équivalent en fonderie de précision.

Un moteur W16 plus puissant et plus rapide

Bugatti a fait passer la puissance maximale de son moteur W16 8 l à 1 600 ch (1 177 kW), soit une augmentation de 100 équidés. Pour offrir davantage d’agilité, le moteur tourne à plus de 300 tours supplémentaires par minute, soit un plateau de puissance nominale situé entre 7 050 et 7 100 tours. Le couple de 1 600 Nm est désormais atteint entre 2 250 et 7 000 tours, au lieu de 6 000 tours maximum. Pour pouvoir augmenter la puissance, les ingénieurs ont revu la conception de nombreuses pièces : des pistons plus puissants transmettent la force des 16 cylindres. La pompe à huile, grâce à un ressort régulateur de pression plus dur avec une pression d’huile plus élevée, envoie davantage de lubrifiant aux différents points tels que le vilebrequin, la distribution et la transmission par chaîne, la distribution variable et le refroidissement des pistons. À pleine charge et pleine vitesse, la pompe fait circuler plus de 140 litres par minute.

Tout cette augmentation génère davantage de vibrations qui sollicitent encore plus la transmission par chaîne et la distribution, dotée de quatre arbres à cames et de 64 soupapes. Afin de préserver la longévité à vitesse maximale, Bugatti redimensionne notamment l’axe de palier du guide de chaîne, mais doit donc également modifier la culasse. Les ressorts de soupape modifiés montés sur des supports en acier résisteront désormais certainement à des contraintes plus élevées. Afin de respecter les dispositions légales en matière d’acoustique, de nouveaux carters de chaîne acoustique composés de plusieurs couches de plastique renforcé en fibre de verre réduisent les émissions sonores. Sur le vilebrequin, un amortisseur de vibrations torsionnelles modifié, monté côté entraînement par courroie, garantit un fonctionnement du moteur particulièrement silencieux. Bugatti adapte également l’entraînement des accessoires – générateur, compresseur de climatisation, pompe à eau et pompe tandem – à l’augmentation du nombre de tours.

Des turbos plus efficaces

Outre l’augmentation du nombre de tours, c’est l’optimisation et la nouvelle conception des turbocompresseurs qui permettent d’augmenter la puissance. Les quatre compresseurs sont désormais dotés d’une roue de compresseur de 77 millimètres au lieu de 74 afin de pouvoir absorber les débits massiques plus élevés. La roue de turbine passe de 64,4 à 67,2 mm de diamètre afin de fournir la puissance de propulsion du compresseur nécessaire pour la pression élevée.

À plein régime, 4,8 tonnes d’air par heure passent par les quatre compresseurs. L’optimisation de la géométrie des pales permet d’augmenter le rendement thermodynamique et la réponse s’approche de celle de la Chiron. « Malgré l’augmentation de puissance, le moteur n’est pas plus lourd et la réponse des turbos correspond au bon niveau du moteur de 1 500 ch », complète Andreas Kurowski, ingénieur développement chez Bugatti.

Une boîte de vitesses modifiée

La boîte de 7 vitesses à double embrayage voit la longueur de ses rapports modifiée : le septième rapport s’allonge de 3,6 % par rapport à la Chiron. Grâce à l’augmentation de puissance, la boîte ne passe ainsi du sixième au septième rapport qu’à 403 km/h, à pleine charge et en accélération maximale. La Chiron Super Sport accélère de 0 à 200 km/h en 5,8 secondes, pour atteindre 300 km/h en 12,1 secondes.

La différence sur 0 à 400 km/h est encore plus importante que sur le sprint : la Chiron Super Sport atteint son objectif en seulement 28,6 secondes, quatre de moins qu’une Chiron, soit un gain de vitesse de 12 %. Pour que les occupants ne ressentent pas cette interruption de la force de traction lors du passage des vitesses, la régulation de la pression de suralimentation dans les rapports est réglée encore plus finement. Même à partir de 6 000 tours, l’accélération ne s’arrête pas, et donne à la Chiron Super Sport une formidable poussée jusqu’à 7 100 tours.

Un châssis à la conception et aux réglages renouvelés

Bugatti revoit la conception du châssis de la Chiron Super Sport pour s’adapter à ses vitesses élevées et à son nouvel aérodynamisme. Les ingénieurs augmentent ainsi la constante de ressort de l’axe arrière de 7 % par rapport à la Chiron afin d’améliorer la stabilité de la Chiron Super Sport lorsqu’elle dépasse les 420 km/h. « La long tail entraîne une répartition des charges par essieu différente, dont nous avons tenu compte avec précision lors du réglage du châssis », observe Jachin Schwalbe, responsable du développement des châssis chez Bugatti. Grâce à l’association de l’arrière rallongé et de l’avant modifié, la Chiron Super Sport atteint ainsi un équilibre aérodynamique à grande vitesse. À cet effet, les ingénieurs ont revu le réglage électronique du châssis et adapté l’amortissement des mouvements du véhicule.

De nouveaux pneus Michelin

Au-delà de 420 km/h, les nouveaux pneus Michelin Pilot Sport Cup 2, optimisés pour les vitesses élevées, offrent plus de rigidité et de confort sonore que sur la Chiron. Ce sont en outre les seuls pneus ayant été testés jusqu’à plus de 500 km/h. Cette nouvelle technologie, qui utilise des nappes de ceinture renforcées résistant à des forces gigantesques, a été testée sur un banc d’essai construit à l’origine pour les avions à réaction. Après la production, chaque pneu, monté en 285/30 R20 ZR à l’avant et en 355/25 R21 ZR à l’arrière, est passé aux rayons X afin de détecter la moindre irrégularité.

Un nouveau design pour des jantes légères

Afin de réduire davantage les masses non-suspendues, Bugatti met au point de nouvelles jantes aluminium à cinq rayons qui pèsent quatre kilos de moins par paire de roues que celles de la Chiron. Elles apportent encore plus de rigidité pour la dynamique longitudinale et sont donc parfaitement adaptées à la Super Sport. En option, Bugatti propose un jeu de roues en magnésium pesant 16 kg de moins que celui de la Chiron.

Avec la Chiron Super Sport, Bugatti met au point une hypersportive de l’extrême. De nombreuses modifications techniques et la recherche de la perfection ont donné naissance au véhicule de série le plus rapide au monde, doté d’un caractère propre, d’un design extraordinaire et d’un confort au luxe jusqu’ici inégalé. Bugatti construit la Chiron Super Sport dans l’atelier de Molsheim. Les premiers véhicules, d’une valeur unitaire de 3,2 millions d’euros (net), seront livrés début 2022 à leurs nouveaux propriétaires.

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À propos de l’auteur
Guillaume Alvarez
Rédacteur-Editeur pour Sport Auto, l'Auto-Journal et F1i. Je partage mon temps entre l'écriture, le reportage et les circuits, la plume et le micro portés par la passion de l'automobile et de la compétition, du Karting à la Formule 1, en noir et blanc comme en couleurs.
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